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Société de la Saskatchewan
Société historique de la Saskatchewan

Revue historique: volume 8 numéro 2

Vol de banque à Coderre

par Adrian Paton
Vol. 8 - no 2, décembre 1997
Prologue
La Canadian Investment Company a été fondée à Weyburn (Saskatchewan) en 1899. Elle avait pour but de spéculer sur le prix du terrain mais elle était aussi dans le marché de la vente de bois de construction. En 1902, la Canadian Investment Company a été absorbée par une compagnie nouvellement formée, la Weybum Security Company. La nouvelle compagnie offrait aussi des services d'hypothèques, de prêts et de banques.

En 1929, la Weybum Security Company avait 33 succursales dans la province, dont une à Coderre. Comme c'était le cas pour toutes les banques à cette époque, lorsque la Weybum Security Company avait fait demande pour une charte, elle avait aussi demandé la permission d'émettre ses propres billets de banque. Lorsqu'elle avait obtenu cette permission, en janvier 1911, elle avait commandé des billets de 5$, 10$ et 20$.

En 1931, la compagnie a été vendue à la Banque Impériale du Canada. La plupart des billets de la Weybum Security Company ont été détruits par des officiers de la banque. Les derniers billets ont été détruits le 1er mai 1931. La Banque Impériale du Canada a ensuite assumé la responsabilité de tous les autres billets à recouvrer.

Le vol
Le matin du 24 janvier 1931 a commencé comme tout autre matin pour le gérant de la banque de Coderre, Owen Kimball, et son caissier, Gordon Wadswarth. L'ouverture de la banque allait être la dernière chose habituelle de lajournée pour les deux hommes. Voici le récit de leur journée tel que raconté dans l'édition du soir du Times de Moose Jaw. «Bandits Get $8,000 From Coderre Bank; Staff Was Held Up.»

Selon l'article, le vol avait eu lieu en pleine journée. Le gérant Kimball et son caissier Wadswarth avaient été ligotés et poussés de force dans le coffre-fort. Des policiers battaient la campagne pour les voleurs. «While residents of Coderre went about their ordinary duties andfarmers from the district with their wives were doing their weekend shopping, dramatic happenings were occuring within the premises of the Weybum Security Bank, where the manager and teller were trussed up by bandits, the bandits making off with $8,000 in currency. »

Le vol avait eu lieu un samedi matin vers 9 h 30. Deux hommes étaient arrivés devant la banque dans une voiture Ford coupe. Ils étaient entrés dans l'édifice et avaient menacé Kimball et Wadswarth avec des fusils tout en leur disant: «stick 'em up». Menacés avec de telles armes, le gérant et son caissier s'étaient conformés aux directives et ils avaient été ligotés et abandonnés alors que les deux voleurs étaient partis à la recherche d'argent et autres fonds. Leur recherche avait récolté environ 8 000 $.

«All the available currency was scooped up and the robbers vanished with all haste in their automobile, having chosen the time for the hold-up with the greatest care in order to avoid interruption by local residents.»

La poursuite
L'alerte a vite été sonnée et des renseignements au sujet du vol ont été envoyés aux quatre coins de la région. On a fait circuler les numéros des billets volés parmi les autres banques afin d'empêcher les voleurs de les échanger ailleurs. Un avis du vol a immédiatement été transmis au détachement de Gravelbourg de la Gendarmerie Royale du Canada. Le Caporal Bell s'est empressé de voyager les 20 milles à Coderre. «A police cordon has been drawn around the district in which the hold-up occurred and all roads are being carefully watched for the bandits and their automobile, while all police forces have been urged to be on the look out for a car answering the description of that which is carrying the fleeing hold-up men.»

Au cours des prochains mois, la police a mené une enquête approfondie et a éventuellement soupçonné les frères Dockendorff, Jack et Bernard. Les deux hommes vivaient 9 milles au sud-ouest de Coderre et étaient propriétaires d'une voiture semblable à celle décrite par les témoins du vol. Ils ont été arrêtés à Moose Jaw et accusés formellement du vol de la banque de Coderre. La date de leur procès a été fixée pour octobre lors de la session d'automne au Palais de justice de Gravelbourg.

Le mystère devient plus intéressant
En attendant leur procès, les deux hommes avaient été libérés sous cautionnement. Un soir, l'aîné, Jack, s'est rendu chez son voisin, Joe Bradley, et lui a annoncé qu'il s'inquiétait de son frère Bernard. Dernièrement, Bernard agissait de façon très étrange. Il avait quitté la maison plus tôt cet après-midi-là pour aller faire du «stooking» et il n'était pas encore revenu. Joe Bradley a donc accompagné Jack à la ferme des Dockendorff où ils ont trouvé Bernard mort dans une coulée. Il avait formé quatre ou cinq meulons de gerbes de blé avant de planter sa fourche dans la terre pour manger son déjeuner.

Le Star de Gravelbourg avait un article dans son édition du 8 octobre 1931 au sujet de cette affaire. «Bernard Dockendorff committed suicide.» Un jury composé de J.H. Lambert, J.A. Dion, H. Lemyre, N.E. Chabot, J. Thorson et A.J. Belisle avait été mandaté
d'enquêter les circonstances de la mort de Bernard Dockendorif. Le verdict du jury était que la cause de la mort était un suicide par ingestion de strychnine. «Having viewed the body on September 11th, 1931 and having heard the witnesses at the inquest, we all agree that he came to his death on September 10th, 1931 at an old dam on the Dockendorfffarm by committing suicide by taking strychnine (poison).»

Le docteur Maurice Gravel, coroner, était président de l'enquête. L'avocat W. H. Rose, K. C. (King's Council) de Moose Jaw représentait le Procureur-général à l'enquête et E.M. Culliton représentait le frère de la victime. L'enquête avait duré une journée et demie; plusieurs témoins avaient été entendus. Monsieur Lewis, un analyste du gouvernement avait témoigné avoir trouvé une graine et demie de strychnine dans l'estomac de la victime et qu'il s'agissait là d'un volume suffisant pour causer la mort.

L?édifice du Palais
Photo: Laurier Gareau
L?édifice du Palais de justice de GravelBourgn?est plus utilisé aujourd?hui pour des procès comme celui de Jack Dockendorff en 1931

Jack Dockendorif avait été soumis à un interrogatoire de plus de trois heures par l'avocat W.H. Rose. Dockendorif et autres avaient témoigné que le matin du 10 septembre, Bernard Dockendorff avait quitté la maison avec un goûter pour aller faire du «stooking». Il n'était pas de retour à l'heure du souper. Vers 9 h du soir, son frère avait découvert qu'il n'était pas chez son ami et était parti à sa recherche avec d'autres hommes. Bernard avait été trouvé mort près d'un vieux barrage, face contre la terre. Il avait mangé très peu de son goûter. Plus tard, on avait trouvé près de la victime, sous une gerbe de blé, une petite enveloppe en papier brun contenant de la strychnine.

Le corps de Bernard Dockendorif avait ensuite été envoyé à Gravelbourg où le docteur M. Lavoie de cette ville avait fait une autopsie. Les résidus de son estomac avaient été envoyés à Regina pour une analyse détaillée.

Le procès de Jack Dockendorff pour vol
Le prochain épisode de cette histoire a été raconté dans le Star de Gravelbourg du jeudi 22 octobre 1931. «John Dockendorff Found 'Not Guilty' Bank Officials Identify Him As One Of The Bandits.» Accusé du vol de 3 769 $ de la Weybum Security Bank de Coderre, le 24 janvier 1931, Jack Dockendorif avait fait face à un jury au Palais de justice de Gravelbourg lors de la session régulière des Assises Criminelles du Banc du Roi en la présence dujuge Brown. Une foule de plusieurs centaines de.personnes s'était vue refuser l'entrée dans un Palais de justice déjà rempli à capacité.

Il y avait un intérêt extraordinaire dans cette affaire à cause de la mort par suicide d'un des accusés, Bernard Dockendorff. Le village de Gravelbourg ne pouvait pas accueillir tous les spectateurs des environs qui voulaient suivre le procès.

Selon le gérant de la banque de Coderre, O.L. Kimball, l'accusé et son frère s'étaient présentés à la banque le 23janvier pour savoir si un nommé Errickson avait laissé de l'argent pour eux. Ils conduisaient une voiture Ford Roadster 1926. Après leur visite à la banque, les deux hommes avaient acheté trois gallons d'essence chez Louis Rabee avant de se diriger vers leur ferme 9 milles au sud-ouest de Coderre. Le témoin avait précisé que l'accusé portait alors un pansement autour de la tête.

Le lendemain matin, 24 janvier, les deux hommes s'étaient à nouveau présentés à la banque, entre 9h00 et 9h30, dans la même voiture, avec la même requête au sujet d'Errickson. Pendant la conversation, l'accusé avait pointé un fusil dans la direction du gérant et avait pris de la petite monnaie et autres billets dans la caisse avant d'ordonner à Kimball d'ouvrir le coffre-fort. Quand le gérant leur avait informé qu'il ne pouvait pas ouvrir le coffre-fort, l'accusé lui avait demandé d'appeler son comptable John J. Wadswarth qui était alors occupé au soussol à pelleter du charbon dans la fournaise. Wadswarth avait ensuite été tenu d'ouvrir le coffre-fort dans lequel les bandits avaient trouvé environ 4 000 $. Le gérant et le comptable avaient ensuite été ligotés etjetés dans le coffre-fort, que les bandits avaient laissé ouvert.

Au procès, Kimball et Wadswarth avaient identifié l'accusé, Jack Dockendorff, comme un des deux bandits qui avaient volé la banque. Au moment du vol, les bandits étaient dans la voiture que les Dockendorff avaient utilisée la journée précédente et Jack avait encore un pansement à la tête.

Au lendemain du vol, Jack Dockendorff s'était rendu à Moose Jaw où il avait échangé son Ford Roadster contre une autre voiture. Lorsque Jack et Bernard Dockendorif avaient été arrêtés à Moose Jaw, les gendarmes avaient trouvé 18 billets de la Weybum Security Bank sur la personne du frère de l'accusé. Plus tard, les policiers avaient aussi trouvé de la petite monnaie et des étampes de la régie dans l'étable de la ferme des Dockendorif.

L'argument de la défense était que les deux hommes avaient été vus à Moose Jaw le mêmejour et le matin du vol. Le jury a pris quatre heures avant de revenir avec un verdict d'innocence. W. M. Rose, K. C. de Moose Jaw et W. 0. Smythe de Kincaid étaient les procureurs de la couronne tandis que E.M. Culliton de Gravelbourg et J.R. Tingley, K.C. de Regina étaient les avocats de la défense.

Coupable? Innocent? Vol? Suicide? Aucun autre billet de la Weybum Security Bank n'ajamais été trouvé ou dépensé dans la région. Les gens ont méticuleusement fouillé de nombreux trous de blaireaux et vieux puits pour l'argent. Plusieurs années plus tard, les bâtiments de la ferme Dockendorff ont été démolis pièce par pièce. Sans succès.

Il semblerait qu'on ne connaîtra jamais la vérité au sujet du vol de la banque de Coderre et de la mort de Bernard Dockendorif.

Nombreuses ont été les compagnies
Photo: Archive de la Saskatchewan
Nombreuses ont été les compagnies qui ont opèrè des banques en Saskatchewan au fil des années, comme banque d?hochelaga, la Weyburn Security Bank ou encore la Nortern Crown Bank, la deuxième banque construite à Ponteix.

Epilogue
Mon intérêt dans cette histoire a commencé quandj 'étais petit garçon. J'étais enchanté par toutes ces histoires de «rum-runners», de la famille Bronfman, du «home brew», Al Capone, la rue River de Moose Jaw avec ses femmes de la nuit, son gambling et son commerce d'opium. Mais mon histoire favorite était celle du vol de la banque de Coderre. Plusieurs histoires de cette affaire m'ont été contées par notre vieux voisin célibataire, Joe Bradley. Le vieux Joe avait une remarquable habilité pour raconter une bonne histoire. Il avait aussi été un voisin qui avait bien connu les deux accusés du vol. J'ai toujours été persuadé que si Hollywood avait entendu l'histoire du vieux Joe, ils en auraient fait un film de la semaine.

En 1931, le vol de la banque de Coderre était un de ces mystères sans solution. Aujourd'hui, plus de soixante ans après le fait, il est fort probable que l'histoire va demeurer un mystère.

Bill Paton vivait dix milles au sud de Coderre. Il était propriétaire d'une voiture semblable à celle utilisée dans le vol de la banque de Coderre. Deux policiers lui avaient rendu visite. Un s'était rendu à l'étable où il trayait ses vaches tandis que l'autre était allé interroger sa femme dans la maison. Selon lui, les policiers avaient été brusques voulant savoir «où il était le matin du 24 janvier, etc. etc...»

Della Marchand (Dougherty) de Gravelbourg avait aussi de bons souvenirs de cette aventure. Son père croyait que ce serait une bonne leçon pour sa fille de 13 ans si elle assistait au procès. Della m'a assuré que c'était bien le cas. Elle se souvenait des arguments que Culliton avait adressés au jury, même si elle ne se souvenait pas de ses paroles exactes. «Je me souviens de la façon quit partait aux membres du jury. Il se promenait de long en large devant la boîte dujury . Il tenait dans sa main un bout de la corde utilisée pour ligoter le gérant; il le roulait et le déroulait tout en parlant. J'étais hypnotisée.,> (Traduction) Elle se souvenait qu'une des témoins avait été poussée à révéler qu'elle avait donné naissance à un bébé illégitime. Pour une jeune fille de 13 ans, de la ferme, cette révélation était certainement plus étrange que celle du vol de la banque.

Eddie Coderre avait pour dire qu'un acquittement était prévisible puisqu'il s'agissait d'unjury de fermiers. Poussé à s'expliquer, il a ajouté: «en 1931, aucunfermier n'aurait condamné une autre personne pour avoir volé une banque.» (Traduction)


Le Patriote de l'Ouest, mars 1924

Willow Bunch, Sask.
Notre dévoué curé, M. Lemieux est de retour d'un voyage de plusieurs semaines dans la province de Québec. Il a fait ce voyage dans l'intérêt de sa paroisse, en vue de la fondation d'un collège à Willow-Bunch, qui serait sous la direction d'une communauté de Frères enseignants. Il n'est pas revenu avec des Frères mais certaines communautés lui auraient laissé entendre que plus tard, s'ils ont assez de sujets, ils ouvriraient peut-être des maisons dans l'Ouest. Évidemment ce n'est guère attrayant pour une communauté de venir s'établir dans l'Ouest quand on songe que le seul collège à base française de la Saskatchewan ne peut se soutenir que très difficilement et qu'avec de très grands sacrifices de la part de la vaillante communauté des Oblats de Marie-Immaculée. Espérons que d'ici à cinquante ans nos paroisses soient assez prospères pour voir surgir plusieurs maisons d'éducation qui font l'honneur de bonne vieille province de Québec. D'ici là, il serait peut-être téméraire de multiplier les collèges: ils courraient grand risque de mourir d'inanition. Le collège Mathieu doit vivre.! Il faut qu'il vive et qu'il progresse! Il dépend de nous de faire cette maison d'éducation viable et prospère.

(Avons-nous atteint les souhaits de cette auteur soit d'avoir plusieurs maisons d'éducation française?)









 
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