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Des gens

Tancrède-Oscar Saucier

Depuis le début du siècle, bon nombre de médecins ont apporté leur contribution à la vie franco-catholique en Saskatchewan. Pour une très forte majorité, ils ont été formés dans les facultés de médecine de l'Université Laval à Québec ou à sa succursale de Montréal. Les préoccupations d'ordre national y étaient à l'honneur, quoique l'on ait généralement prêché le respect et la soumission à la Couronne britannique. Les étudiants recevaient donc, sous la direction de l'Église, la formation intellectuelle nécessaire pour mener le peuple canadien français. On encourageait aussi ceux qui ne s'intéressaient guère à l'action politique ou qui ne se sentaient pas le talent de descendre dans l'arène publique, à choisir d'autres moyens d'exprimer leur ferveur nationaliste. Ainsi, le Dr Saucier, de Saskatoon, contribua pendant de nombreuses années, de sa plume, à l'essor nationaliste canadien français.
Joseph-Tancrède-Oscar Saucier est né le 17 février 1872 à Maskinongé, petit village situé sur la rive nord du Saint-Laurent, à quelque distance de Trois-Rivières. Son père est marchand général et la famille, profondément catholique, donne à l'église un prêtre et deux religieuses. Joseph-Tancrède étudie la médecine à l'Université Laval, où il obtient ses diplômes en 1897. La profession est encombrée au Québec à cette époque et le jeune médecin part s'établir au Wisconsin, dans le comté d'Oconto, le long de la Baie Verte, dans une région où les Français ont fondé des établissements permanents dès 1670 et qui encore à la fin du siècle passé est en très grande partie peuplée de Canadiens français. C'est là qu'il rencontre et épouse Éva Lacoursière, dont les parents sont eux aussi originaires de la région de Maskinongé.

Le jeune couple vient s'installer au Manitoba vers 1907 puis, au printemps de 1916, le Dr Saucier est accepté par le Collège de Médecine de la Saskatchewan; c'est tout probablement vers cette époque que la famille s'établit à Saskatoon. Quelque temps plus tard, le Dr Saucier se rend à Chicago où il effectue des études avancées dans le traitement des maladies des yeux, du nez, des oreilles et de la gorge.

Le Dr Saucier maintient des liens étroits avec la province de Québec. Il reçoit régulièrement plusieurs journaux, dont L'Action catholique et La Presse, ainsi que diverses revues médicales et autres. Il contribue aussi à L'Indépendance et à La Presse, ainsi qu'à des revues littéraires et politiques de France. Ses poèmes, ses analyses politiques et religieuses, de même que ses articles sur la médecine attirent favorablement l'attention. En novembre 1923, il est reçu membre de l'Association des auteurs canadiens français de Montréal.

Un de ses poèmes, publié dans un journal de la région de Maskinongé en 1925, explore sur un thème agricole, l'idée que chaque chose doit être accomplie en son temps propre:

Au temps de la moisson quand les champs brillent fort
De l'éclat du soleil plus n'est temps des semailles;
Les faucheuses s'en vont coupant les épis d'or
Que la batteuse aura bientôt dans ses entrailles.

Il est trop tard pour les semailles,
Trop tard! faut-il le dire encor?
Il est trop tard pour les semailles.

Maintenant c'est l'hiver. La tourmente et le froid
Vous recouvrent de neige et chemins et prairies;
Ce vent porte regret, tristesse, pleurs, effroi!
Plus d'oiseaux, plus de chants, plus de sentes fleuries!...

Semer! c'est hors saison, ma foi;
Il est trop tard, mes chers, chéries;
Semer! c'est hors saison, ma foi.

Mais quand l'herbe verdit, que la branche bourgeonne,
Votre guerêt soit fait, retournez le terrain;
C'est le temps de semer: – au nid pigeon, pigeonne,
Vous les hommes aux champs: en terre votre grain.

Oui, semez, et semez d'entrain
Il faut semer pour qu'on moissonne,
Oui semez et semez d'entrain.

En juin 1928, Le Patriote de l'Ouest signale que «notre ami le Dr J.-T.-O. Saucier est de retour d'un long voyage d'études en Europe.» Dans le but d'offrir à ses patients les traitements les plus modernes, le Dr Saucier avait en effet pris la décision à l'automne précédent d'effectuer un stage dans divers hôpitaux et cliniques de Paris et de Londres. Installé rue de Vaugirard à Paris, le médecin saskatois adressait au Canada des articles substantiels sur ses cours, ses professeurs, les hôpitaux où il étudiait, et la vie en France. Il en profita aussi pour visiter les lieux de pèlerinage, dont Lisieux et Lourdes.

De retour dans les Prairies après un an d'études, il continue à exercer la médecine. Toujours profondément attaché à la foi catholique, il accueille avec joie la nouvelle de la création de la paroisse des Saints Martyrs Canadiens à Saskatoon. Il contribuera pendant de nombreuses années à la vie paroissiale.

Le Dr Saucier, accompagné d'autres membres de sa famille, est grièvement blessé dans un accident de la route au début d'août 1957 et il succombe à ses blessures le 17 août, à l'âge de 86 ans.

(poème «Suo tempore», dans L'Écho de Saint-Justin, mars 1925; renseignements: Le Patriote de l'Ouest, 14 novembre 1923, p. 8 et 20 juin 1928, p. 8; dossier de soeur Rita Saucier, a.p.s collection S.h.S.)





 
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