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Saint-Louis

Chronique locale (Prince Albert): Il est maintenant décidé que la construction du pont du Grand Tronc à St-Louis va se faire cet hiver. Les soumissions sont lancées et très probablement les travaux commenceront en novembre. La ligne serait prête à l'été. Cette nouvelle voie fera grand bien à la ville et à tout le district environnant.

Le Patriote de l'Ouest
le 30 octobre 1913
Au printemps de 1882, plusieurs familles métisses quittent les communautés de Saint-Charles, Saint-François-Xavier et Baie Saint-Paul au Manitoba pour se diriger vers le district de la Saskatchewan dans les Territoires du Nord-Ouest. Il s'agit des familles Baptiste Boucher, William Bremner, Pierre Boyer, Baptiste Delorme, Joseph Vermette et John Fidler.

Ces familles viennent s'établir près de Batoche, dans la région de «South Saskatchewan House». «Arrivés à Batoche, les voyageurs suivirent la Rivière Saskatchewan passant à “South Saskatchewan House” endroit du massacre de 1794 par les Gros Ventres, féroce tribu d'Indiens. À deux arpents de ces ruines, Louis Schmidt, secrétaire de Louis Riel dans le gouvernement provisoire du Manitoba, était venu s'installer.»(1)

Alors que les familles de Baptiste Delorme, Joseph Vermette et John Fidler vont s'établir au sud de Batoche, les autres se dirigent vers le nord et l'est. Ils s'arrêtent à environ trois kilomètres à l'ouest de l'actuel village de Saint-Louis. «C'était une belle vallée bordée par des collines boisées au sud et la rivière au nord.. La terre était fertile et plus facile à cultiver que les terrains plus glaiseux au large de la rivière.»(2)

Au début, les nouveaux colons métis se rattachent à la mission de Saint-Laurent de Grandin, environ 25 kilomètres à l'ouest et sur la rive ouest de la rivière Saskatchewan Sud. «Les pionniers de St-Louis traversaient la rivière Saskatchewan sur des skiffs, marchaient à St-Laurent, assistaient à la messe, visitaient sans doute avec leurs nombreux parents, puis retournaient ensuite à St-Louis, une distance d'environ 30 milles.»(3)

En 1884, deux ans après l'arrivée des familles Boucher, Bremner et Boyer, la petite mission de Saint-Louis de Langevin est établie et nommée en honneur du roi saint Louis de France. La mission est desservie par les pères oblats de Prince Albert — André, Vègreville, Dommeau et Lecoq. La messe est célébrée dans la maison de Jean-Baptiste Boucher.

Les pionniers métis de Saint-Louis ont de nombreux liens de parenté avec ceux de Batoche. Il est alors tout à fait normal, lorsque la guerre éclate en 1885, que plusieurs des hommes de Saint-Louis s'alignent avec Gabriel Dumont. Maxime Lépine est un des pionniers de Saint-Louis qui prend les armes pour défendre son pays.

Après la défaite des Métis, le 12 mai 1885, la pauvreté règne dans la région. Hommes et femmes doivent même se cacher des soldats de l'armée canadienne. «Toutes les familles de Saint-Louis avaient dû s'enfuir à la hâte, de leurs logis; les hommes s'enrôlaient au service de Riel; les femmes et les enfants se cachaient dans les forêts pour échapper à la terreur des soldats.»(4)

En 1887, d'autres familles métisses et françaises sont venues s'établir dans la région de Saint-Louis: Alcide Légaré, John Bruce, Charles et Jonas Laviolette, Alex et Sam McDougall et O. St-Denis. Comme à Batoche, les Métis de Saint-Louis ont divisé leur terre en lots de rivière, comme l'avaient fait auparavant leurs ancêtres du Québec. Les lots de rivière commencent avec l'actuel village de Saint-Louis (lot 1) et se dirigent vers l'ouest. Jean-Baptiste Boucher, père, est installé sur le lot 9, son fils, Jean-Baptiste, est sur le lot 12. En 1887, le père Pierre Lecoq, o.m.i., s'établit sur le lot 13 et y fait bâtir une petite chapelle. «Le père E. Lecoq vend sa maison, son buggy et sa montre pour bâtir l'église; ses paroissiens donnent leur temps.»5 Certains pionniers disent que le père Lecoq avait vendu cheval, voiture et montre pour payer les matériaux de construction. Les planches et les bardeaux sont achetés du moulin à scie de Prince Albert.

Donc, comme a été le cas dans de nombreuses autres régions de la Saskatchewan, la première église n'est pas située à l'endroit où le chemin de fer décidera éventuellement de construire une gare. Après la venue du train en 1913, l'église devra être déménagée, ce qui causera des divisions parmi les paroissiens.


Le père Lecoq demeure comme curé de Saint-Louis jusqu'en 1894 lorsque l'abbé Pierre Barbier le remplace. Durant son séjour à Saint-Louis, le père Lecoq voit à l'établissement du district scolaire de Saint-Louis de Langevin Est No. 14 en 1886. Le premier instituteur est un monsieur L.-O. Pinaud de la Croix; il enseigne pendant quatre ans dans l'école de Saint-Louis. En 1890-1891, c'est le père Lecoq lui-même qui doit s'occuper de l'enseignement. D'autres enseignants à cette époque sont Monsieur Dupire (1891-1893), Mlle Tucker (1893-1894), Monsieur Cogniaux et Richard Charron.

L'abbé Barbier demande à l'évêque de lui envoyer des religieuses pour sa mission. Les Filles de la Providence répondent à l'appel. Elles arrivent en 1897 et font construire un couvent sur le lot de rivière qu'elles obtiennent en concession; il s'agit du lot No. 10. Les trois premières religieuses sont Mère Saint-Jean-Berchmans, Mère Marie du Rosaire et soeur Marie Madeleine.

En 1906, l'église construite en 1887 est devenue trop petite. C'est au père P. Gabillon que revient la tâche de construire un nouvel édifice. «Chaque famille donne 10$. Les paroissiens transportent le bois de Prince Albert et une véritable basilique est construite. Elle est 60 pieds de long, 26 pieds de large et 18 pieds en hauteur. Le père Gabillon est l'architecte, l'entrepreneur et le contremaître.»(6) Bien sûr, cette nouvelle église est également construite sur le lot 13. En 1909, on a les moyens de se défaire du vieux couvent de bois rond et de le remplacer par un nouveau en planches. Il est construit près de l'église dans le vieux Saint-Louis. Enfin, en 1912, le père L.J. Danis, o.m.i., fait bâtir un nouveau presbytère.

Au début du siècle, on trouve donc l'église et le couvent de Saint-Louis sur le lot 13. Lorsque le Grand Tronc décide de bâtir le pont et la gare sur le lot 1, la chicane éclate dans la région.

Avec la construction du chemin de fer en 1913, environ trois kilomètres à l'est de l'église, un village surgit près du pont du Grand Tronc. Toutefois, église et couvent demeurent au vieux Saint-Louis jusqu'à l'arrivée de l'abbé L.J. Adam en 1917. «Monsieur le Curé Adam avait passé sa vie chez les Jésuites; prédicateur éloquent avec une verve peu commune. Caractère bouillant, préfet de discipline pendant des années, il n'endurait pas la contradiction. Quant à la diplomatie, elle était étrangère à sa nature.»(7)

Le nouveau curé rêve de se rapprocher du village. En 1919, lorsque le couvent des Filles de la Providence devient trop petit, le curé Adam réussit à convaincre les soeurs de bâtir près de la gare. Il entreprend ensuite des manigances pour déménager l'église près de ce nouveau couvent.

Les gens de Saint-Louis sont divisés sur la question, comme le sont ceux de Hoey, situé environ six kilomètres au sud du village de Saint-Louis. Si l'église ne déménage pas, les gens de Hoey auront peut-être leur propre paroisse. Le curé Adam se fait refuser sa requête à plusieurs reprises, jusqu'en 1921. «En 1921, M. Adam se procura une lettre de la chancellerie autorisant le transport de l'église et du presbytère près du nouveau couvent de Saint-Louis.»(8) Le projet de déménagement endette la paroisse pour vingt ans, mais le curé Adam réalise enfin son rêve.

Ce même abbé L.J. Adam devient l'ennemi de Raymond Denis lors du fameux congrès de l'ACFC de 1923 à Prince Albert. Il s'oppose farouchement à la candidature de Denis pour la présidence de l'ACFC prétextant qu'un Canadien français devrait être élu à ce poste et non pas un Français.

Éventuellement, la dette est repayée et la paroisse continue à grandir. En 1966, les gens de la région assistent à l'ouverture officielle du nouveau Collège Notre-Dame à Saint-Louis. Une nouvelle église est construite en 1980. Aujourd'hui, même si le Collège Notre-Dame a fermé ses portes en 1974 et le couvent des Filles de la Providence a été rasé en 1988, l'église est toujours là pour accueillir les fidèles. Quant au vieux Saint-Louis, il n'est plus qu'un faible souvenir dans la mémoire de certains pionniers.

Références

(1) Comité d'Histoire Locale, Je me souviens, Histoire de Saint-Louis et des environs, Saint-Louis: Comité d'Histoire Locale, 1980, p. 33.
(2) Ibid., p. 34.
(3) Lavigne, Solange, Kaleidoscope, Many Cultures - One Faith, The Roman Catholic Diocese of Prince Albert, 1891-1991, Prince Albert: Diocèse de Prince Albert, 1990, p. 170. (Traduction)
(4) Comité d'Histoire Locale, op. cit., p. 38.
(5) Lavigne, Solange, op. cit., p. 171.

(6) Lavigne, Solange, Kaleidoscope, Many Cultures - One Faith, The Roman Catholic Diocese of Prince Albert, 1891-1991, Prince Albert: Diocèse de Prince Albert, 1990, p. 171. (Traduction)
(7) Comité d'Histoire Locale, Je me souviens, Histoire de Saint-Louis et des environs, Saint-Louis: Comité d'Histoire Locale, 1980, p. 50.
(8) Ibid., p. 50.

Sources

Un bout d'histoire (122)

Comité d'Histoire Locale, Je me souviens, Histoire de Saint-Louis et des environs, Saint-Louis: Comité d'Histoire Locale, 1980.

Lavigne, Solange, Kaleidoscope, Many Cultures - One Faith, The Roman Catholic Diocese of Prince Albert, 1891-1991, Prince Albert: Diocèse de Prince Albert, 1990.





 
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