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Des lieux

Saint-Antoine des Prairies

Brillante réunion de l'A.C.F.C. à St. Antoine. Le 10 mai, dans notre belle paroisse de St. Antoine, s'est tenue une brillante assemblée. Les gens sur l'invitation de M. le curé Ferland se sont rendus en grand nombre et ont écouté attentivement les orateurs. Ceux-ci se sont efforcés de démontrer que l'A.C.F.C. est une société vraiment nationale et patriotique et ils ont tellement convaincu leur auditoire que tous ceux présents vinrent payer leur contribution. Les orateurs furent le Docteur Paré de St. Antoine, M. J.-B. Paradis, secrétaire du cercle local, et le principal et non le moindre, M. le curé Nap. Poirier, membre du comité général de l'A.C.F.C.

Le Patriote de l'Ouest
le 21 mai 1914
Grâce au travail de recrutement de l'abbé Jean-Isidore Gaire, plusieurs communautés francophones voient le jour, dans l'extrême sud-est de la Saskatchewan, à la fin du XIXe siècle. Des centaines de colons français, belges et canadiens-français viennent ainsi fonder les villages de Bellegarde, Cantal et Wauchope entre 1891 et 1905. Storthoaks est une de ces communautés francophones qui apparaît dans la région à cette époque. Elle est établie en 1900 par quatre familles francophones venues de Chicago en Illinois. Il s'agit des familles Garand, Bertrand, Raymond et Fournier. Le premier nom qu'ils donnent à Storthoaks est Saint-Antoine des Prairies.

Selon un pionnier du district, J. B. Paradis, dans un article publié dans l'Optimist de Redvers en 1965, les deux premiers colons canadiens-français arrivent en 1899. À Chicago, ils ont lu beaucoup de propagande au sujet de l'Ouest canadien et rêvent d'abandonner la grande ville américaine. «Edmond Garand et son ami, Michel Bertrand, décident de venir faire leur propre enquête. En août 1899, ils se dirigent vers la région qu'on connaît aujourd'hui comme Storthoaks où ils trouvent de bonnes terres propices à la culture du blé. Ils se réservent des homesteads et retournent chercher leurs familles. Lorsqu'ils reviennent, l'année suivante, ils ont persuadé deux autres familles à les accompagner. Il s'agit de Noël Fournier (le gendre de M. Garand) et Pierre Raymond.»1 Il y a 26 personnes dans le groupe.

Quelques anglophones s'établissent aussi au début du siècle au sud de Saint-Antoine des Prairies et vers 1902, un agent d'immigration de Winnipeg, monsieur Joly, arrivent avec d'autres familles canadiennes-françaises: Bourget, Paradis, Pelchat, Boulet, Dauvin, Plamond, Goffette et Toupin. Cette année-là, Mgr Langevin de Saint-Boniface visite la région et il nomme l'abbé Jules Vernaz comme responsable de la mission. Le printemps suivant, on commence les travaux de construction d'une chapelle et d'un presbytère pour le missionnaire, mais c'est l'abbé A.M. Ferland qui devient le premier curé résidant de Saint-Antoine des Prairies. Il y passe les cinquante prochaines années de sa vie.

Une fois l'église construite, la prochaine préoccupation des gens de la petite paroisse est d'établir des districts scolaires. La première école ouvre ses portes en 1904. Elle est située sur le terrain d'Edmond Garand et on lui donne le nom d'École Saint-Edmond. Le premier instituteur est David Gratton. Mentionnons que David Gratton a eu une longue carrière dans l'enseignement en Saskatchewan au début du siècle. En 1925, il est instituteur à Ponteix lorsqu'il est invité à présenter une conférence au congrès de l'ACFC à Regina sur l'enseignement du français dans la province. «M. Gratton qui possède une longue expérience dans l'enseignement, dans l'Ontario d'abord, dans la Saskatchewan ensuite, reconnaît franchement que le français n'est pas suffisamment enseigné dans nos écoles. Nos élèves lisent d'une façon passable, mais il en est très peu parmi eux qui sont en mesure d'appliquer les règles de grammaire et d'écrire une dictée convenable.»2 Cette conférence encourage les délégués de l'ACFC à demander la mise sur pied d'un programme d'enseignement du français et des concours de français dans la province.

Mais revenons à Saint-Antoine des Prairies où les colons ne tardent pas à fonder une deuxième école, l'école Saint-Thomas située à environ trois kilomètres de l'actuel village de Storthoaks.

Un bout d'histoire (152)

Peu à peu, les gens de Saint-Antoine des Prairies commencent à se bâtir une communauté. Il y a la chapelle et le presbytère et les écoles Saint-Edmond et Saint-Thomas. Puis, en 1906, Michel Bertrand écrit à Ottawa pour demander la permission d'établir un bureau de postes. Lorsque la permission lui est accordée, il devient le premier maître de postes.

Il faut toutefois attendre l'arrivée du chemin de fer en 1912 avant qu'un petit village surgisse à cet endroit. Cette année-là, la compagnie du Canadien Pacifique traverse la frontière du Manitoba avec une ligne ferroviaire secondaire et se rend jusqu'à Saint-Antoine des Prairies. Il n'est toutefois pas question de garder ce nom français pour le nouveau hameau. Le président du Canadien Pacifique demande alors à l'auteur britannique, Sir Harry Brittain, de nommer les nouvelles gares sur cette ligne secondaire. L'auteur donne donc les noms de sa femme, Alida, et, de son terrain en Angleterre, Storthoaks à deux des nouveaux villages.

L'arrivée du chemin de fer attire des colons à venir s'établir en ville. Joseph Chicoine ouvre le premier magasin près de la gare en 1912. Il devient un des grands entrepreneurs de Storthoaks. En 1914, il fait construire une écurie à louage près de son magasin. Il est aussi propriétaire d'une pension vers 1913-1914. Ses fils, Arthur et Aimé construisent un hôtel en 1915. Un autre Chicoine, Pierre, bâtit une maison en 1917 qui abrite le Storthoaks Rural Telephone Company jusqu'en 1928. En 1918, la Banque Royale du Canada ouvre une succursale à Storthoaks. La banque est située dans le magasin de Joseph Chicoine. Elle ferme ses portes au milieu des années 1920.

D'autres francophones deviennent aussi commerçants à Storthoaks. Willie Toupin devient agent d'équipement agricole pour la compagnie International Machinery en 1913 tandis que Arthur Séguin et J.B. Paradis établissent une cours à bois en 1914. En 1916, Joe Bourget ouvre une salle de billards et une allée de quilles et l'année suivante il établit un deuxième magasin. Le premier médecin à Storthoaks est le docteur Roméo Paré. Il arrive en 1913 et quitte en 1916. Durant son séjour à Storthoaks, il est impliqué dans le mouvement de l'ACFC comme vice-président du cercle local. Après son départ, les francophones de la région doivent se contenter d'un médecin anglophone jusqu'en 1928 lorsqu'un docteur Geoffrion vient s'établir en ville. Il ne demeure à Storthoaks que deux ans.

Comme dans bien d'autres communautés francophones de la Saskatchewan, l'arrivée du chemin de fer en 1912 cause de nombreux conflits pour la paroisse de Saint-Antoine des Prairies. Le Canadien Pacifique construit sa gare environ cinq kilomètres au sud de la petite chapelle construite en 1903. Alors que de plus en plus de personnes s'établissent dans le village, ils demandent que l'église soit déménagée, mais d'autres veulent qu'elle demeure où elle est. Des chicanes éclatent souvent entre les deux camps jusqu'en 1926 lorsque Mgr Mathieu, archevêque de Regina, ordonne que l'église soit transportée au village.

En 1925, David Gratton, ancien instituteur de l'école Saint-Edmond, avait été un des précurseurs de programme d'examens de français qui serait administré par l'ACFC. Il est tout à fait intéressant de noter que c'est le cercle paroissial Saint-Antoine de Storthoaks qui propose, dès 1915, des examens de français. «En décembre 1915, la proposition suivante fut faite: “Qu'il soit demandé au gouvernement de cette province qu'il y ait enseignement dans les écoles, de manière qu'il y ait un examen de français fait par l'inspecteur, et que cet examen soit écrit.”»(3) Le cercle local de l'ACFC de Storthoaks continue à mener la lutte pour une amélioration de la qualité de l'enseignement du français pendant de longues années.

Références

(1) Storthoaks/Fertile Historical Society, Dusty Trails, Abandonned Rails, Storthoaks: Storthoaks/Fertile Historical Society, 1988, p. 11. (Traduction)
(2) Denis, Raymond, Mes mémoires, Manuscrit aux Archives de la Saskatchewan. Volume 1, p. 118.
(5) Ducharme, abbé Roger, Album souvenir, Cinquantenaire de l'A.C.F.C., 1912-1962, Saskatoon: L'Association Catholique Franco-Canadienne de la Saskatchewan, 1962, p. 111.

Sources

Un bout d'histoire... 151

Ducharme, abbé Roger, Album souvenir, Cinquantenaire de l'A.C.F.C. 1912-1962, Saskatoon: L'Association Catholique Franco-Canadienne de la Saskatchewan, 1962.

Denis, Raymond, Mes mémoires, Manuscrit aux Archives de la Saskatchewan. Volume 1.
Storthoaks/Fertile Historical Society, Dusty Trails, Abandonned Rails, Storthoaks: Storthoaks/Fertile Historical Society, 1988.





 
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