Revue historique: volume 1 numéro 1LUDGER GAREAULTVICTIME DE LA RÉBELLION DE 1885 Vol. 1 - no 1, octobre 1990 Gens du pays Spécial généalogique Ludger Gareault est né à St-Jacques de l'Achigan, P.Q. en 1855. Il arrive à Batoche vers 1878 où il est embauché pour construire une maison pour le plus riche commerçant du district, Xavier Letendre “dit Batoche”. Cette maison devient le point de mire de la région. Au cours des années suivantes, Gareault construit également un nouveau magasin pour Letendre à Batoche. En 1883, le Père Julien Moulin l'embauche pour construire un presbytère (83) et une église (84) à trois-quarts de mille du village de Batoche. Ces deux bâtiments existent encore au Parc historique national de Batoche. En septembre 1884, Ludger Gareault prend pour épouse une jeune Métisse de Batoche, Madeleine Delorme. Avant son mariage, il achete un lopin de terre de la Corporation des Oblats, à un quart de mille au sud de l'église, où il se bâtit une belle grande maison. Dans une déposition soumise à la Commission Royale mise sur pied en 1886 par Ottawa pour faire état des pertes encourues lors de la Rébellion de 1885, George Ness, un juge de paix à Batoche et le beau-frère de Ludger, a décrit la maison comme suit : “I know the premises of claimant, the house was a two storey building, on stone foundation, built of logs, shingled roof, not weather boarded, mudded up and whitewashed inside and out, not plastered - be about 20 x 23 feet - no partition inside, all in one room, there were 2 floors made of matched flooring. I estimate it worth about $2,000.00 to build it.” Durant l'hiver de 1884-85, Ludger et Madeleine Gareault quittent Batoche pour se rendre au Bas-Canada afin de visiter les parents de Ludger. Pour quelle raison Gareault quitte-t-il la région à un moment si crucial ? Il pourrait y avoir deux raisons. D'une part, Gareault était peut-être un partisan du chef métis, Louis Riel. Advenant ce scénario, le Père Julien Moulin aurait fait tout en son possible pour le neutraliser. Une raison plus probable c'est que Ludger Gareault faisait partie de la petite bourgeoisie de Batoche. Comme l'a révélé Diane Payment dans son livre Batoche 1870-1910, la plupart des membres de la bourgeoisie de Batoche (Letendre, Fisher, Venne et Boyer) ont trouvé une raison pour être loin de la région au printemps de 1885. Ludger Gareault avait possiblement suivi leur exemple. Malgré son absence de Batoche, il n'évite pas les malheurs qui frappent la communauté. Pendant la bataille du 9 au 12 mai 1885, le général Middleton ordonne à ses hommes d'incendier la maison de Gareault. À son retour après la Rébellion, Ludger apprend qu'il a perdu tous ses biens - sa maison, ses étables, ses chevaux et toutes les petites choses qu'il avait accumulées depuis son arrivée dans l'Ouest.
Il recrute alors l'aide du Père Julien Moulin et de George Ness et soumet une demande de dédommagement au gouvernement fédéral. Dès le 30 juillet 1885, il écrit une lettre au ministre de l'intérieur et premier ministre du Canada, John A. Macdonald. Il rassure le premier ministre de son absence du territoire pendant les troubles et ajoute : “J'étais menuisier et charpentier, constructeur de bâtisse, j'avais tous les outils pour cela et tout ce que j'avais est brûlé. C'est la troupe du général Middleton qui a fait cela. Le Père Moulin de cette mission ici a dit au général qu'il ne devait pas détruire cette maison, que le propriétaire n'y était pas, qu'il était à rendre visite à ses parents au Bas Canada. Après ces informations, il (Middleton) a dit que le gouvernement paierait pour cela parce que ces bâtisses, parait-il, leur nuisaient et mettaient les rebelles à l'abri. Je le crois bien et le vois bien. Mais étant loyal à Sa Majesté et au gouvernement et ayant des dommages causés par ses troupes, je réclame, à juste droit, la somme de six mille cinq cents cinquante-huit piastres...” Le 2 septembre 1885, Ludger Gareault adresse une nouvelle lettre à Ottawa, celle-ci au ministre de la guerre, l'Honorable Caron. Dans cette lettre il renouvelle sa demande, tout en y ajoutant une liste complète des articles perdus dans l'incendie. Entre- temps, Ludger Gareault se remet au travail pour “Batoche” Letendre. La maison de ce dernier, ainsi que son magasin, avaient été endommagés par les soldats canadiens. Enfin, le 2 avril 1886, la Commission Royale, mise sur pied par Ottawa pour régler les revendications des Métis de Batoche, arrive à Prince Albert. George Ness et “Batoche” Letendre témoignent pour Ludger Gareault. Dans son rapport, daté du 13 août 1886, la Commission recommande au ministre de l'intérieur d'allouer la somme de $2,598.80 pour régler l'affaire Gareault. Il s'agit de moins de la moitié de sa demande. Ayant reçu cette somme du gouvernement fédéral, Ludger Gareault quitte Batoche au printemps de 1887. Il se dirige vers la région de Pincher Creek en Alberta où il se lance dans l'élevage des chevaux.
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