Contact
Société de la Saskatchewan
Société historique de la Saskatchewan

Des gens

Louis Cochin, o.m.i.

Cochin, Sask. Le 1er de mai, un bureau de poste sous le nom de Cochin fut ouvert ¨au détroit¨ entre le lac Murray et le lac Jackfish. L'établissement de ce bureau de poste fera passer à la postérité le souvenir du R.P. Louis Cochin, O.M.I., qui a fait une si grande part dans l'apaisement des tribus sauvages du district de Battleford lors de la guerre de 1885.
Le Patriote de l'Ouest
le 13 mai 1915
En 1904, lorsqu'on construit un chemin de fer à travers les réserves Thunderchild et Moosomin, à l'ouest de Battleford, les Indiens demandent au gouvernement de leur donner de nouvelles réserves. En 1909 et 1910, Ottawa accepte de transférer les Indiens des deux réserves, et leur ancien terrain est cédé comme homesteads. Les colons canadiens-français qui viennent s'établir à cet endroit nomment leur village Delmas, en honneur de leur curé, le R.P. Henri Delmas, o.m.i. Les Indiens de la réserve Moosomin reçoivent du nouveau terrain au nord et à l'est des lacs Murray et Jackfish, 35 kilomètres environ au nord de North Battleford.

Une première école ouvre ses portes dans la région en 1912, mais on lui donne le nom de École de la Mission. Ce n'est qu'en 1915, lorsqu'on établit un premier bureau de poste, au détroit entre le lac Murray et le lac Jackfish, qu'on lui donne le nom de Cochin. « Le nom de Cochin rappelle un autre missionnaire qui prit part à l'apaisement des tribus sauvages de la région de Battleford et fut prisonnier des rebelles lors des troubles de 1885. Le P. Louis Cochin, de la Marne, fonda le centre de Jack-Fish, dont le premier curé séculier devait être l'abbé Jean-Pierre Esquirol. »(1)

Louis Cochin est né le 8 décembre 1856 à Sommepy-Tahure (Marne) France. Il est le fils de François Cochin et Anne Baudart. Il fait ses études au petit séminaire de Châlons, au grand séminaire de Sommepy et au Noviciat de Nancy avant de se diriger vers le Canada et l'Université d'Ottawa où il fait ses voeux perpétuels le 17 février 1881. Deux mois et demi plus tard, il est à Saint-Albert dans les Territoires du Nord-Ouest et, le 1er mai, Mgr Vital Grandin préside à son ordination dans la congrégation des Oblats de Marie Immaculée.

Immédiatement après son ordination, en 1882, le père Cochin est envoyé dans la réserve Poundmaker à l'ouest de Battleford. Lorsqu'il est laissé en charge de la mission Sainte-Angèle, il ne possède pas les mêmes atouts que son prédécesseur, le père Jean Lestanc, o.m.i. : la connaissance de la langue crie. « La plupart des Cris n'avaient pas encore adopté le christianisme et ils évitaient le nouveau missionnaire. Il était donc seul et ne pouvait avoir d'interprète. »(2) Le père Cochin sort son dictionnaire, préparé par le père Albert Lacombe, o.m.i., et apprend par lui-même la langue.

En 1884, un groupe important de Métis vient établir Bresaylor, au nord de la rivière Bataille et à l'ouest de Battleford. La nouvelle colonie est située près de la rivière Saskatchewan Nord, à l'ouest de la réserve Thunderchild. En 1885, le père Cochin abandonne la mission de Sainte-Angèle à Poundmaker et se réfugie chez les Métis de Bresaylor. Il fait bâtir une nouvelle chapelle sur le carreau SE4-46-19-W3 pour desservir les Indiens de la réserve Thunderchild. Cette mission deviendra plus tard le village de Delmas.

Le R.P. Gaston Carrière, o.m.i., dans son Dictionnaire Biographique des Oblats de Marie Immaculée au Canada, affirme que le père Cochin a été emprisonné à Batoche durant les troubles de 1885. Ce renseignement semble être faux si on se fie aux propos du R.P. Jules Le Chevallier, o.m.i. dans son livre Batoche, les missionnaires du Nord-Ouest pendant les troubles de 1885. « Le P. Cochin lui-même n'était pas à l'abri de leurs tracasseries. Un jour qu'il écrivait quelques notes sur son calepin, une vingtaine de guerriers furieux l'entourèrent. ' Traître, lui dirent-ils, tu veux nous vendre en affichant tes billets dénonciateurs aux poteaux du chemin. Voilà déjà longtemps que nous te supportons.' Mais Poundmaker arriva bientôt pour s'interposer entre lui et la foule pour la disperser. »(3) Cet incident se produit dans la région de Battleford et le père Cochin est présent à la bataille de Cut Knife Hill, le 2 mai 1885.

Le père Carrière soutient aussi que le missionnaire a été blessé , mais il ne semble pas que ce fut le cas. Le père Le Chevallier écrit : « Dans l'espoir de mettre fin à la captivité de ses compagnons d'infortune, le P. Cochin se faufila par un chemin détourné jusqu'à une petite éminence d'où, grâce à sa soutane, il pouvait se faire reconnaître, mais avant d'avoir eu le temps de parler, une grêle de balles l'obligea à glisser au fond du ravin et à regagner le camp des Métis à trois milles du ruisseau. »(4) Il semble donc que le père Louis Cochin soit sorti des troubles sain et sauf.

Une fois les événements de 1885 terminés, le R.P. Louis Cochin retourne à son travail de missionnaire dans la réserve Poundmaker pour enseigner le catéchisme aux jeunes Cris. Dès 1886, il commence aussi à enseigner le catéchisme aux enfants des réserves environnantes : Thunderchild, Moosomin, Sweet Grass et Little Pine.

En octobre 1889, le père Cochin jette les fondations du futur village de Delmas. Il commence la construction de sa nouvelle résidence immédiatement à l'ouest de la réserve Thunderchild sur le carreau SE6-46-18-W3. À cet endroit, le missionnaire fait également construire deux étables, une grainerie, un poulailler, une laiterie et un puits. Il aimerait également ouvrir une école indienne à cet endroit, mais c'est son successeur, le père Henri Delmas, qui aura la distinction d'être le fondateur de l'école résidentielle Saint-Henri de Thunderchild à Delmas.

Vers 1896 Mgr Albert Pascal, évêque de Prince Albert, demande au père Cochin d'aller établir des missions dans la région du Lac des Brochets (Jackfish Lake), aussi appelé Lac Tortue par certains Métis. En 1898, il fonde la paroisse de Saint-Hippolyte. « Il signe les registres de Battleford (1891-1894), de Thunderchild (1892-1903), de Waseka (1893), de Prince Albert (1900-1901), de Jackfish (1898-1900), d'Aldina (1902-1903) et de Jackfish (1903-1906). »(5) La vie de missionnaire l'amène à l'Île-à-la-Crosse (1906-1908) et il fonde ensuite la mission de Meadow Lake où il est curé de 1908 à 1916.

En 1916, le R.P. Louis Cochin, o.m.i., devient enfin curé du village qui porte son nom. Il y était déjà venu comme missionnaire lorsqu'il était à Jackfish et à Aldina, mais pas à titre de curé de paroisse.

En 1912, le R.P. Ernest Lacombe, o.m.i., un cousin d'Albert Lacombe, avait établi une nouvelle mission dans la réserve Moosomin. Il lui avait donné le nom de Sainte-Flore et avait fait construire une chapelle. Elle mesurait 28 pieds par 50. Le père Cochin apporte des changements à la mission quand il arrive en 1916. « Sous sa direction, la chapelle de la mission est déménagée de la réserve jusqu'à la rive nord du ruisseau à Cochon. Le terrain était un don de J.P. Geo Day. L'année suivante, il fait bâtir un presbytère. »(6) Pendant plusieurs années, une des chambres du presbytère est officiellement l'école Delorme. Il s'agit bien sûr de l'ancienne École de la mission qui, comme la chapelle, a été déménagée de la réserve à la rive nord du ruisseau. Elle est devenue le District scolaire Delorme 1212. Plus tard, elle deviendra l'école Cochin.

En 1924, l'église de Cochin est détruite par un incendie. Le père Cochin ne perd pas de temps à la faire rebâtir. Un musicien accompli, ce missionnaire compose plusieurs morceaux de musique pour prélever des fonds pour l'église. On dit du père Cochin qu'il aimait tellement sa musique qu'il ne pouvait pas tolérer de fausse note, si bien que si un membre de sa chorale chantait d'une voix fausse, il se faisait sermonner publiquement par le curé.

Le père Jules Le Chevallier raconte un autre moment, durant les événements de 1885, où le père Cochin a fait preuve de ses talents musicaux. « Chaque soir le P. Cochin réunissait ses bons chrétiens pour le chapelet et le catéchisme. Il leur faisait chanter quelques cantiques anglais, français ou cris qu'il accompagnait sur un harmonium portatif que la complaisance d'un ami avait arraché aux vandales. Tout d'abord les chanteurs et les chanteuses étaient clairsemés et timides; mais peu à peu, quand ils se connurent mieux, ils s'enhardirent et devinrent plus nombreux. »(7)

Le père Louis Cochin continue son travail de missionnaire jusqu'en 1927 lorsqu'il commence à avoir des attaques d'angine. Il est décédé à Cochin le 15 mai 1927. Premièrement enterré dans le cimetière du village, il est ensuite transporté dans le cimetière oblat de Saint-Albert, Alberta.

Notes

(1) Frémont, Donatien, Les Français dans l'Ouest canadien, Saint-Boniface : Les Éditions du blé, 1980, p. 126.
(2) Lavigne, Solange, Kaleidoscope - Many Cultures - One Faith, The Roman Catholic Diocese of Prince Albert, 1891-1991, Prince Albert (Sask) : Le Diocèse de Prince Albert, 1990, p. 523. (Traduction)
(3) Le Chevallier, Jules, o.m.i., Batoche, les missionnaires du Nord-Ouest pendant les troubles de 1885, Montréal : L'Oeuvre de Presse Dominicaine, 1941, p. 164.
(4) Ibid., p. 169.
(5) Carrière, Gaston, o.m.i., Dictionnaire Biographique des Oblats de Marie Immaculée au Canada, Tome I, Ottawa : Éditions de l'Université d'Ottawa, Ottawa, 1977, p. 213.
(6) Lavigne, Solange, Kaleidoscope - Many Cultures - One Faith, The Roman Catholic Diocese of Prince Albert, 1891-1991, Prince Albert (Sask) : Le Diocèse de Prince Albert, 1990, p. 142. (Traduction)
(7) Le Chevallier, Jules, o.m.i., Batoche, les missionnaires du Nord-Ouest pendant les troubles de 1885, Montréal : L'Oeuvre de Presse Dominicaine, 1941, p. 165.

Sources
Carrière, Gaston, o.m.i., Dictionnaire Biographique des Oblats de Marie Immaculée au Canada, Tome I, Ottawa : Éditions de l'Université d'Ottawa, Ottawa, 1977.

Frémont, Donatien, Les Français dans l'Ouest canadien, Saint-Boniface : Les Éditions du blé, 1980.

Lavigne, Solange, Kaleidoscope - Many Cultures - One Faith, The Roman Catholic Diocese of Prince Albert, 1891-1991, Prince Albert (Sask) : Le Diocèse de Prince Albert, 1990.

Le Chevallier, Jules, o.m.i., Batoche, les missionnaires du Nord-Ouest pendant les troubles de 1885, Montréal: L'Oeuvre de Presse Dominicaine, 1941.






 
(e0)