Des motsLobbyingIl y a quelques semaines, quelqu'un m'avait demandé de lui fournir des renseignements au sujet du Bon Parler Français, le petit manuel que nous utilisions pour les cours de français en Saskatchewan durant les années 1940, 1950 et 1960. Je lui avais recommandé d'approcher les Archives de la Saskatchewan pour en obtenir une copie. Depuis la parution de l'Eau vive, les employés des Archives à Regina m'ont demandé de faire une précision et de fournir le numéro d'accès afin de faciliter leur travail. Donc, si vous voulez obtenir une photocopie du Bon Parler Français, demandez-leur de le trouver dans le fond du Collège Mathieu, #R500.12/35. Le Bon Parler Français était une création de M. Antonio de Margerie, longtemps secrétaire-général de l'A.C.F.C. Pendant bien des années, M. de Margerie s'était occupé des examens de français de l'A.C.F.C. De sa maison à Vonda, il a appuyé toutes les démarches de l'A.C.F.C. et des autres associations francophones et catholiques de la province pendant une trentaine d'années. Comme le dit Richard Lapointe dans son livre 100 Noms au sujet de cet homme, «il a aussi été, peut-on dire, durant toutes ces années, le ministre de l'éducation française en Saskatchewan.» M. de Margerie tolérait mal les anglicismes, le mauvais français, etc. etc. C'est la raison pour laquelle il avait créé son petit manuel du Bon Parler Français: pour aider aux jeunes Franco-Canadiens de la Saskatchewan à améliorer leur français écrit et leur parler. Je suis persuadé que M. de Margerie serait très déçu des termes «bureaucratisés» qu'emploient constamment nos associations francophones dans leurs discours; des termes comme membership et lobbying. Il est intéressant à noter que ni l'un ni l'autre de ces deux termes figurait dans la dernière version du Bon Parler Français, préparé en 1967 par M. René Rottiers. Serait-ce que les deux mots n'existaient pas encore à cette époque. Puisque ces deux termes sont définitivement des anglicismes, ne serait-il pas le temps que nos associations francophones cessent de les garrocher à droite et à gauche. Quels messages transmettent-elles aux jeunes qui apprennent le français à l'école? Louis-Alexandre Bélisle, dans son Dictionnaire nord-américain de la langue française, nous dit que lobby et lobbyist sont des mots anglais, le premier voulant dire un groupe de pression et le deuxième «un coulissier ou un coulissard». Lobbying ne figure même pas dans ce dictionnaire, ni dans le Petit Robert. Au lieu d'aller faire du lobbying auprès des gouvernements, l'A.C.F.C. et les autres associations fransaskoises devraient aller «faire de la pression» auprès des ministères. Quant à membership, il est intéressant que les associations francophones aient adopté cet anglicisme, étant donné que l'équivalent français est plus court. Au lieu de parler de «notre membership», n'est-il pas aussi facile de dire «nos membres»? Nos associations francophones n'ont-elles pas une responsabilité d'honorer la mémoire d'un de leurs plus grands défenseurs, Antonio de Margerie, et de rayer de leur vocabulaire ces termes gouvernementaux «bureaucratisés»? On devrait peut-être faire comme Jésus et chasser tous les lobbyists du temple et insister qu'ils apportent tous leurs termes légalistes anglais avec eux. Ainsi Antonio de Margerie pourrait reposer en paix. |
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