Revue historique: volume 11 numéro 2Les Wallons de la région chestrolaise à Bellegarde (Saskatchewan)Ballade aux pays du Wallon et des Wallons par Guy Belleflamme Vol. 11 - no 2, décembre 2000
Il est admis qu'au regard du nombre des émigrants qui, originaires des différents pays d'Europe, ont choisi de partir, au cours des siècles, pour des cieux nouveaux, dans l'espoir d'y trouver un sort meilleur, les ressortissants du territoire de la Belgique romane actuelle ont été relativement peu nombreux, y compris même par rapport aux seuls emigrants d'expression française (Français, Suisses francophones...)'. Ce petit nombre' n'exclut pas que, çà et là, à la fin du XVIIIe siècle et au cours du XIXe siècle, lorsque l'on a connu des mouvements migratoires plus importants(3), de petites communautés homogènes aient pu se constituer et conserver, à travers plusieurs générations, certains traits de leur culture d'origine (langue, croyances...) et, éventuellement même, de léguer certains de ces traits aux populations qui les accueillaient. Par ailleurs, certaines fortes personnalités sont restées fidèles, là où elles étaient, et parfois dans des conditions de vie très difficiles, au patrimoine culturel reçu dans leur jeunesse et ont ainsi mis à profit ces connaissances au service des populations qu'elles rencontraient et avec lesquelles elles se fondaient au fil du temps. Le petit parcours de reconnaissance que je propose ci-dessous n'a rien de scientifique ni de systématique ; disons qu'il est d'humeur et comme la somme des rencontres que j'ai faites au cours des derniers mois.
au hasard de mon caprice et de ma curiosité, rencontres tout entières orientées par le souci de voir si ces Wallons-là qui s'expatriaient, sans espoir de retour, avaient eu à cour de conserver et de perpétuer, consciemment ou non, certains des traits de la langue qu'ils avaient reçue de leur père et mère. Mon champ d'investigation s'est donc naturellement réduit à la recherche de ceux qui ont émigré, au cours des siècles, en Amérique du Nord, plus particulièrement aux États-Unis et au Canada. Pour des raisons différentes, mais qui se rejoignent dans les faits, il ne sera donc pas question ici des Wallons, émigrés en Suede', pas plus que des Wallons, forcément d'expression française, qui, dans la première moitié du vingtième siècle, sont allés travailler dans les Pays d'Afrique centrale(5). En ce qui concerne l'Amérique du Nord, les sources d'information sont diverses et multiples. Je me contenterai de citer, d'une part, les publications du Centre d'Études canadiennes de l'Université libre de Bruxelles, dont la dernière Les immigrants préférés, les Belges, reproduit les textes d'un récent colloque international et, d'autre part, les ouvrages beaucoup plus confidentiels, mais loin d'être inintéressants, de Jean Ducat, consacrés à des recherches plus particulièrement généalogiques et qui s'efforcent donc de suivre à la trace les premiers émigrés à partir de leur lieu belge d'origine et d'étudier ensuite ce que sont devenus, au cours des ans, leurs descendants.
Par ailleurs, il va de soi que les Wallons qui émigrent, presque toujours de condition sociale fort modeste et le plus souvent analphabètes - en dehors des missionnaires, connaissent à peine les rudiments de la langue française, ce sont surtout les langues régionales orales (les patois) qu'ils utilisent dans leurs relations avec leurs semblables'. On l'aura compris : il ne s'agit pas ici de faire une synthèse de l'émigration des Wallons dans le Nouveau Monde, mais de relever quelques-uns des endroits où, les Wallons s'expatriant avec le patois wallon comme langue naturelle, celui-ci aurait éventuellement laissé à la langue d'accueil - le français - quelques-uns de ses particularismes. La balade que je vous propose de faire aujourd'hui - Internet aidant - est une balade dans une des provinces centrales du Canada, la Saskatchewan, qui est encadrée à l'Ouest par la province d'Alberta et à l'Est par la province du Manitoba. Les Wallons de la Saskatchewan Territoire des prairies, la province canadienne de la Saskatchewan, d'une superficie équivalant à vingt fois la Belgique, compte environ 1 000 000 d'habitants(9), soit 2 habitants par km2, dont la plupart sont anglophones, mais parmi lesquels 20 000 d'entre eux'° se disent francophones, ou plutôt disent parler le fransaskois'. Selon un correspondant fransaskois de Regina, la capitale, Laurier Gareau, «la communauté francophone de la Saskatchewan (...) est un heureux mélange de Français, Belges, Suisses français, Canadiens français du Québec, de l'Acadie, de l'Ontario, de Franco-Américains qui, dans la plupart des cas, étaient des Canadiens français émigrés aux États-Unis au 19e siècle et repatrtés en Saskatchewan au début du 20e siècle. Sauf pour la région de Bellegarde, où on remarque encore une forte influence belge dans le parler des gens et à Saint-Brieux où c'est l'accent de Bretagne qu'on va remarquer, il n'y a pas d'autres régions francophones dans la province où un dialecte ou un accent prédomine. La raison c'est que dans presque toutes les communautés fransaskoises il y a eu des Français, des Belges, des Canadiens français et des Franco-Américains tous mélangés ensemble. (...) Il y aurait eu des influences belges et wallonnes sur la parlure fransaskoise comme il y a eu des influences bretonnes, montréalaises, américaines et métisses. Nous parlons français sans jamais vraiment avoir pris le temps de considérer d'où venait un mot ou une expression, sans [nous] rendre compte que l'accent a une saveur wallonne ou métisse. (12)»
Les emigrants belges qui se sont dirigés vers Bellegarde (3) étaient, pour la plupart, originaires de la région chestrolaise ou de la Gaume proche', auxquels se sont joints des Liégeois, un Tournaisien, une dizaine de Belges de la région flamande... Voici comment Jean Ducat (15) décrit le peuplement de cette région de la Grande Clairière: «En 1888, le deuxième grand arrivage des Belges se dirigea aux limites du Manitoba et du Saskatchewan. Ils eurent pour curé le Révérend Père Jean Gaire, né à Lafaye en Alsace. Avec deux ou trois familles françaises, les Belges originaires des provinces du Hainaut, de Namur et du Luxembourg (vingthuit familles) appelèrent leur nouvelle paroisse Grande Clairière, dans la suite d'autres colons belges créèrent Deleau du nom d'un colon belge et d'autres renforcèrent une colonie voisine fixée sur la rivière Souris. Toutes les familles étaient nombreuses et leurs essaimages se dirigèrent vers la province voisine, elles créèrent ainsi Belle-Garde et elles renforcèrent la colonie de Regina. Un des petit-fils de Nicolas Garbotte, parti de VerlaineNeufchâteau devint Révérend Père Abbé et fondateur du monastère des Trappistes établis aujourd'hui sur la paroisse de Bruxelles -Manitoba. » Parmi ceux-ci, et selon le témoignage de Cornélius J. Jaenen, confirmé par Laurier Gareau'6, il convient de noter que la communauté de «Bellegarde est la seule parmi les communautés francophones qui a maintenu son cachet wallon, y compris l'accent de la province de Luxembourg» (17). Ce témoignage m'est également confirmé par une correspondante de Bellegarde, Marie-Êve Bussières,
employée régionale, qui, lors d'un tout premier contact, m'écrivait naguère': «Je ne suis pas Belge de descendance, mais, à ma grande surprise, les Belges sont attirés par ma présence. Depuis mon arrivée à Bellegarde, je fréquente des personnes très intéressantes qui ont un dialecte wallon. Des familles telles les Cop, George, Tinant, Perraux et Martin sont reconnues pourjaser wallon dans une atmosphère discrète, intime, familiale. L'âge des gens parlant wallon est estimé entre 80-93 ans et ceux qui écoutent et comprennent le wallon sont âgés dans la quarantaine. (19) » Et la même correspondante, dans un autre courriel, de m'interroger: «Plusieurs personnes m'ont dit qu'il y avait une légende belge rattachée à la crique que nous avons derrière l'église pour empêcher les enfants de se baigner sans surveillance, la légende de pipi crochet 'crotchet' (20). » Voilà un double témoignage bien intéressant: les premiers immigrants fransaskois ont conservé et partiellement transmis à leur descendants à la fois des traits de leur parler et des croyances populaires qui appartiennent assurément au fonds culturel wallon. Marie-Eve Bussières m'a envoyé le relevé que voici des patronymes des descendants des Wallons qui ont émigré en Saskatchewan: André (Habay-la-Neuve), Antoine (Rossart), Arnould (Daverdisse), Bauche (Redu), Belva (Tournai), Bertholet (Maissin), Blanchard (HautFays), Blérot (Orgeo), Carbotte (Verlaine - Neufchâteau), Claude (Orgeo), Coliaux (Haut-Fays), Cop (Petitvoir), Copet (Redu), Dauvin (Haut-Fays), Davreux (Haut-Fays), Delaite (Redu), Deleau (Chassepierre), Deivenne (Haut-Fays), Dognez (Liège), Dumonceau (Naomé), Frankard (Benonchamps), Fréçon (Respelt), Gatin (Haut-Fays), George (Opont), Gofflot (Semel), Grégoire (Liège), Hardy (Marbay), Henrion (Orgeo), Kenler (Massul), Lamotte (Daverdisse), Lamouline (Orgeo) Laurent (Lahage), Lavai (Jamoigne), Legros (Remouchamps), Louis (Grandvoir), Magnien (Grandvoir), Magotiaux (Dochamps), Mahin (Redu), Mahy (Redu), Marcq (Rossignol), Martin (Acosse), Meunier (Petitvoir), Montjoie (Gembes), Moreau (Orgeo), Nannan (Haut-Fays), Naviaux (Suxy), Perraux (Orgeo), Petit (Grandvoir), Questiaux (Opont), Renard (Gembes), Renaud (Haut-Fays), Salmon (Bastogne), Tinant (Bertrix), Vassaux (Orchimont), Vinck (Vonêche), Vodon (Vonêche), Wilvers (Gembes). On l'aura remarqué, la plupart des villages d'origine se trouvent dans la région chestrolaise (sud du Luxembourg et nord de la Gaume). Ma correspondante me cite encore d'autres anthroponymes, mais sans pouvoir citer le lieux d'origine des premiers émigrés : Depape, Desutter, Godenir, Isabey, Gerinroze, Helman, Libert, Logeot, Madant, Picou, Pierrard, Pierret(21). Y aurait-il des traces du parler wallon dans la panure fransaskoise? Apparemment, aucun linguiste ne s'est, jusqu'à présent, penché sur les particularités du français parlé en Saskatchewan, en dehors d'un certain Robert Papen qui, selon L. Gareau, aurait un peu écrit sur les caractéristiques du parler mét-chif (métisse) de la région de Batoche-St-Laurent-Duck Lake (à quelques
centaines de kilomètres au nord de Saskatoon). Par ailleurs, comme pour le reste du Canada, on peut poser le principe suivant: s'il semble qu'il y ait quelque part, des termes ou expressions aux allures wallonnes, c'est parce que celles-ci sont communes aux différents patois romans qui relèvent de la langue d'oïl. Même si, sous réserve d'inventaire, on peut souscrire à l'opinion de Laurier Gareau: «Sans entrer dans une leçon d'histoire de la colonisation de la Saskatchewan, il est bon à noter que des régions entières furent colonisées par des immigrants venus du même coin de la France, du Québec ou des États-Unis. C'est pour cette raison que certaines expressions et mots sont communs dans une région de la province et complètement inconnus dans d'autres.» (09.11. 89) Il serait, pour nous, très intéressant, d'une part, de faire le relevé des régionalismes propres aux villages à fort concentration d'immigrés d'origine wallonne et, d'autre part, de faire l'analyse de quelques échantillons (ethnotextes) de ce qu'il reste de vivant, au sein des familles d'origine belge, du wallon parlé par leurs aïeux.
En réalité, les outils qui permettraient de faire une telle analyse, n'existent pas. Néanmoins, dans l'hebdomadaire d'expression française, L'Eau Vive', sous le titre «La parlure fransaskoise», Laurier Gareau, qui tient à préciser qu'il est historien et non linguiste (23), a tenu, d'octobre 1988 àjuin 1991, une chronique où il explorait l'usage de termes et d'expressions peu communs utilisés par les francophones de la Saskatchewan'. J'invite les internautes curieux à visiter les quelque 63 articles que Laurier Gareau a consacrés aux particularités linguistiques du fransaskois: il y a beaucoup de raisons pour qu'ils ne soient pas déçus(25). Qu'est-ce qu'on trouve dans ces chroniques du langage fransaskois? Envisagée sur le seul plan du lexique, la sélection que je pro-pose cidessous, d'une demidouzaine d'expressions seulement, et orientée il va de soi, devrait, en principe, en étonner plus d'un ....
Je tiens néanmoins à faire une remarque préliminaire, qui est essentielle: l'excursion que je propose ci-dessous n'est pas strictement scientifique, elle se contente de faire le relevé de quelques coïncidences, probablement fortuites, qui sonnent de façon étrangement familière dans l'oreille d'un Wallon. Dans la chronique à propos du «tracteur à jardin» ou motoculteur (01.06.89), L. Gareau écrit: «Chez nous, on appelait ça une barouette. Il s'agit d'une brouette qu'on utilise pour transporterfeuilles mortes, outils, etc. J'ai cherché dans plusieurs dictionnaires sans pouvoir trouver de lien entre la barouette de ma jeunesse et la brouette.» S'il connaissait la forme wallonne bèrwète, pour dire brouette, Gareau ne douterait pas un seul instant que l'on a affaire à deux formes distinctes qui dérivent toutes deux du même étymon, même si celui-ci est controversé. Lui-même cite d'ailleurs Claude Poirier: «Dans son Dictionnaire du français québécois [1985], on rattache le mot barouette à bazou
(bazoo). Selon ce dictionnaire bazou serait d'origine américaine, circa 1900-1925: Ce bazoo de sens nouveau n'aurait eu qu'une existence éphémère chez nos voisins du Sud mais se serait imposé chez nous de façon naturelle parce qu'il venait s'intégrer à toute une série de mots à syllabe initiale ba-, servant à désigner la même réalité : bachat, barouche, barouette, bateau, etc.» Toutefois, dans son Dictionnaire historique du français québécois [1998], Claude Poirier renonce à rattacher bazou à barouette. Il est préférable de le faire dériver du latin birota (qui a deux roues) ou *bjrotjum (FEW I, 375a), devenu *béroue, qui a lui-même donné béroette en ancien français du Mlle siècle. Le rattachement au latin rugîre (FEW1O, 548a) semble moins convaincant. Je lis avec surprise son interrogation au sujet de l'expression «bêtes à cornes, qu'on utilisait autrefois pour désigner le bétail. Il est probable qu'on utilise encore ce terme de nos jours sur les ranchs du sud de la Saskatchewan. Chez nous, mon père utilisait le terme bêtes à cornes même pour les vaches, les bouvillons et les génisses qui avaient été écornés. Durant les dernières années de sa vie, il élevait surtout des Aberdeen Angus, un bovin sans corne, mais ceux-ci étaient quand même ses bêtes à cornes.» Je me suis d'abord étonné de l'étonnement de Gareau. Une telle expression me semblait tellement aller de soi. Poussant un peu plus avant mes investigations, je me suis aperçu qu'aucun dictionnaire français ne cite cette expression, alors que tous les dictionnaires wallons traduisent bièsse à cwènes, tantôt littéralement, tantôt par le terme bétail. L'usage fransaskois est donc plus spécifiquement wallon, disons dialectal au sens large, que français. Sous la rubrique charrue (20.10.88), L. Gareau écrit: «Dans le sud de la province, le terrain dénué d'arbres était plutôt facile à défricher. La terre était cassée à l'aide d'une charrue. La charrue la plus communément utilisée était la charrue à pied ou charrue à mancherons ou manchons. Cet instrument aratoire était communément appelé charrue à pied parce que le laboureur marchait dans le sillon derrière l'outil. Dans d'autres coins de la province on l'appelait charrue à mancherons ou manchons parce que lefermier devait tenir les deux mancherons de la charrue. Si la couche superficielle n'était pas trop dure, et s'il avait les moyens d'en avoir un, le laboureur pouvait utiliser un brabant double, également connu dans d(férents coins de la province sous les noms de tilbury et sulky. Le brabant double était un modèle de charrue à roues avec lequel le laboureur pouvait tracer un sillon, ou même plusieurs à la fois, tout en étant confortablement assis sur le siège de la charrue.» Pas un seul instant l'auteur n'imagine - mais peut-on lui en faire grief? - que ce mot puisse être français (et même wallon) ni qu'il trouve son origine dans le nom d'une province belge et moins encore qu'il figure au Petit Larousse Illustré. Par contre, chez nous, en wallon comme en français, sulky et tilbury n'ont jamais été synonymes de brabant (double). À la rubrique péquat (08.12. 98), citant une de ses lectrices, L. Gareau écrit: «Un client des Archives m'a écrit il y a quelque temps au sujet de la généalogie de plusieurs familles dans son coin de pays. La description des activités qui eurent lieu à cette époque-là comprenait la fabrication du péquat, une boisson fermentée. J'aimerais savoir si d'autres personnes dans la province connaissent ce mot.» Et l'auteur ne dit pas qu'il a reçu une réponse. Je n'ai aucune idée de ce à quoi ressemblait ce péquat, dont on sait seulement qu'il était une «boisson fermentée», mais il me plaît de penser qu'il devait ressembler, d'une manière ou d'une autre, à notre pèkèt ou péquet, terme qu'on trouve également dans le Petit Larousse Illustré. Ceci me conduit à dire que je suis aussi curieux que L. Gareau et que j'aimerais savoir à quoi ressemblait ce péquat aujourd'hui disparu. Que signifie, demande Laurier Gareau (22.02.90), faire une gibelotte (un hash) avec des restants? Par rapport au français qui donne à gibelotte le sens de fricassée de lapin au vin blanc, le français québécois et le fransaskois lui donnent le sens de mets, plat peu réussi ou raté, hachis de composition variable, fait notamment de viande (souvent de gibier) et de légumes (selon Dulong, Dictionnaire des canadianismes et selon Claude Poirier, Dictionnaire historique du français québécois). Par ailleurs, il me semble, à moi, que le Wallon dirait, plus naturellement que le Français de l'Hexagone, faire du hachis avec des restants et non pas faire du hachis avec des restes. Mais cette impression est tout subjective et demande à être vérifiée.
D'après Laurier Gareau (20.02.90) «sciau [dans le sens de «seau» ou «chaudron»] est un terme qui semble être exclusivement canadien-français de l'Ouest canadien. Je n'ai pas pu le trouver dans aucun dictionnaire des difficultés du français au Canada.» Toutefois, Dulong (o.cit.) cite siau comme canadianisme largement répandu et rappelle que ce mot est dialectal en français. Le wallon sèyê et le franco-liégeois séyau en sont une illustration. Ce relevé, si mince soit-il, estil de nature à mettre en appétit? Je conseille en tout cas à l'internaute curieux de continuer seul cette exploration: je crois qu'il ne sera pas déçu. Notes et références (1) «Même rapporté à la taille réduite de leur pays de départ le nombre de migrants belges fut peu élevé, il n'est en rien comparable à celui d'autres États de même taille, comme par exemple les Pays-Bas ou le GrandDuché de Luxembourg.» (Serge JAUMAIN et Matteo SANFILIpP0, L'immigration belge au Canada une histoire en devenir, in «Les Immigrants préférés, les Belges», p. 4 voir ci-après note 6). (2) Entre 1620 et 1765, on note la présence d'à peine 66 individus originaires des territoires qui formeront la Belgique. (Serge JAUMAIN, Survol historique de l'immigration belge au Canada, in «Les Immigrants préférés, les Belges », p. 35). (3) Vers 1860, une petite centaine de familles belges émi-grera au Canada, selon Cornelius JAENEN, Les Belges au Canada (Ottawa, Société historique du Canada, 1961, p. 6), cité par Serge JAUMAIN, Survol historique de l'immigration belge au Canada, in «Les Immigrants préférés, les Belges», p. 36, note 4. Par ailleurs, les «statistiques témoignent de l'existence d'un premier véritable mouvement d'immigration belge [au Canada] qui s'étend de la fin des années 1890 à la Première Guerre mondiale.» (Ibid., p. 39) Ceux-ci se répartissent sur tout le Canada, avec une nette prédilection pour le Québec, l'Ontario et le Manitoba et s'y livrent à des activités agricoles. (Ibid. 40) L'émigration a ensuite connu des fortunes diverses dans l'entre-deux-guerres, les Flamands constituant 70 % des migrants belges. Il y eut une dernière vague dans l'Après-guerre. Mais les migrants wallons du vingtième siècle intéressent moins, on le comprendra aisément, ceux qui s'intéressent au sort réservé par ces émigrants-là à la langue wallonne...
(4) Voir, par exemple, Théo BEAUDUIN, Les Wallons en Suède, Paris, La Presse Associée, 1930, 167 pages. Ou, selon une perspective beaucoup plus large, Les Wallons à l'étranger, hier et aujourd'hui, Institut Jules Destrée, 1999, 296 pages. (5) Voir, par exemple, Max PIERRE, Le français au Zaire, au Rwanda et au Burundi, in «Le français en Belgique», Duculot/ Communauté française de Belgique, 1997, pp. 319-334. (6) Sous la direction de Serge JAUMAIN, Presses de l'université d'Ottawa, 1999 (courrlel: press@uottawa.ca). (7) On doit à Jean DUCAT, les publications suivantes: From Grez-Doi-ceau to Wisconsin (en collaboration), Wallons aux USA, Un pays de Charleroi en Amérique, Lorraine belge en Amérique, Arlonais fondateurs de Belgium Win De Semois en Indiana, Namurois au Nouveau Monde, Passagers belges partis vers l'Amérique en 1856, Passagers belges partis vers l'Amérique de 1833 à 1855. L'auteur est le président-fondateur de l'association Belgian American Heritage WallonieBruxelles, dont le siège est à B-5640 Biesme-Mettet (rue Belle-Vue, 4). Mérite aussi d'être visité le site internet GeniWal. (8) Voir «Les Immigrants préférés, les Belges», o. cit., p. 32, p.36 ; et p. 23: <<... le degré de connaissance de la langue peut être très variable (au xixe siècle pour beaucoup d'immigrants wallons, le français est une langue étrangère qu'ils maîtrisent mal.» (Serge JAUMAIN et Matteo SANFILIPPO, L'immigration belge au Canada une histoire en devenir.) (9) Alan B. ANDERSON, French Settlements in Saskatchewan, Saskatoon, 1985 ; Roger PAINCHAUD, Un rêve canadien dans le peuplement de la prairie, SaintBoniface, 1987. (10) Pour ces 20 000 francophones, la province organise 11 écoles françaises (primaires et secondaires), 74 écoles offrant des programmes d'immersion, deux centres scolaires et communautaires, un établissement postsecondaire et une radio communautaire. [On n'oubliera pas que 2850 kilomètres séparent Regina, capitale de la Saskatchewan, de Montréal.] (11) Le fransaskois (ou la parlure fransaskoise) est un terme créé au début des années 1970 pour remplacer le terme francosaskatchewannais (selon le Dictionnaire des canadianismes de Gaston DULONG, Éditions du Septentrion, 1999, p. 235). On peut dire que doit être considéré comme typiquement fransaskoise tout façon de s'exprimer qui n'appartient ni au français académique, ni au parler du Québec ou d'Acadie. Il va de soi que beaucoup d'expressions ou de termes fransaskois sont des anglicismes. (12) Courriel du 10 février 2000. (13) Coordonnées géographiques : 490 32' nord, 1010 33' ouest. À 10 kilomètres de la frontière manitobaine, à 60 kilomètres de la frontière américaine (État du Dakota du Nord), situé sur la rivière Gainsbo rough Creek. Voir carte. En 1999, «le 19e grand rassemblement annuel des francophones et francophiles de la Saskatchewan a eu lieu à Bellegarde. La fête a été célébrée conjointement avec le centenaire de la paroisse SaintMaurice de Bellegarde, hameau fondé par des colons d'origine belge. Au cours d'une fin de semaine [i.e. week-end] on a accueilli 1 350 personnes qui venaient des quatre coins de la province et même du Manitoba. La programmation artistique ne manquait pas de variété et de créativité. L'hospitalité et 1'enthousiasme de la communauté hort étaient tels que le long voyage valait la peine.» (Informations diffusées par le gouvernement provincial sur Internet) (14) Sur la base d'une liste que m'a fournie Marie-Eve Bussières, ils étaient originaires de Neufchâteau (Grandvoir, Marbay, Massul, Petitvoir, Respeit, Semel, Verlaine), mais aussi de Bastogne (Benonchamps), Beauraing (Vonêche), Bertrix (Orgeo, Rossart), Bièvre (Naomé) Daverdisse (Gembes, HautFays), Habay-la-Neuve, Libin (Redu), Manhay (Dochamps), Paliseul (Maissin, Opont), Vresse-surSemois (Orchimont), ; Chassepierre, Chiny (Jamoigne, Suxy), Tintigny (Lahage, Rossignol)... (15) Namurois au Nouveau Monde, Édit. Namur-Amérique, BiesmeMettet, 1995, 68/54 pages, p.50. (16) Voir supra. (17) Cornelius J. JAENEN, Quelques aspects des activités professionnelles des immigrants belges (xixe xxe siècles), in «Les Immigrants préférés, les Belges », op. cit., p. 155. (18) Courriel du 16 mars 2000. (19) Ainsi donc L. Gareau parle de forte influence belge dans le parler des gens», C.-J. Saenen parle du «cachet wallon, y compris l'accent de la province de Luxembourg », tandis que M.-Ê. Bussières parle de «personnes très intéressantes qui ont un dialecte wallon» et qui «sont reconnues pour jaser wallon, dans une atmosphère discrète, intime, familiale». On ne manquera pas de noter les nuances. (20) Référence manifeste à Henri Crochet ou Pépé Crochet, personnage légendaire bien connu des folkloristes. Voir, entre autres, Esprits et génies du terroir d'Albert DOPPAGNE (Duculot, 1977) et Les noms du Croque-mitaine en Wallonie de Jean-Paul. TIJSKENS (EMVW, x, 1965, pp. 117-120, pp. 287-292, pp. 296-299, et xi, p. 57 et pp. 121-124). (21) Pour être complet, il convient d'ajouter le nom des Belges d'origine flamande: Warnez (Aarsele), Clemens, Dekkers, Jaenen et Vreys (Lommel), Cruyvels (Moresnet), Dcvliegere (Tielt), Deacock et Druwe (Torhout). (22) Voir aussi. (23) Les ouvrages de référence que Laurier Gareau cite dans ses articles sont les suivants (je reproduis les indications bibliographiques lorsqu' elles sont données): Léandre Bergeron, Dictionnaire de la langue québécoise; Louis-Ale- xandre Bélisle, Dictionnaire nord-américain de la langue française; Abbé Étienne Blanchard, Dictionnaire du bon langage (Montréal, 1915); Éphrem Boudreau, Glossaire du vieux parler acadien; Gilles Colporon, Dictionnaire des anglicismes ; Jean-Claude Corbeil, Dictionnaire thématique visuel; Gérard Dagenais, Dictionnaire des difficultés de la langue française au Canada; Pierre Desruisseaux, Livre des expressions québécoises (Éditions Hurtebise, 1979) ; Gaston Dulong, Dictionnaire correctif du français au Canada; R. Duluc et J.-C. Boulanger, Régionalismes québécois usuels; Claude Poirier, Dictionnaire du français québécois [19851; David Rogers, Dictionnaire de la langue québécoise rurale; Marie Eva de Villiers, Multidictionnaire des difficultés de la languefrançaise (Éditions Québec/ Amérique, 1988); Hatzfeld et Darmesteter, Dictionnaire général de la langue française (1924); le Petit Robert; le Dictionnaire Larousse de l'ancien français. Autant dire que, pour nous, il est difficile d'avoir accès à la plupart de ces dictionnaires. (24) Toutes ces chroniques sont diffusées sur le site Internet suivant: http: / /www.d1cwest.com/4gareau/ lgarcau / intro.html.
(25) Malheureusement, Laurier Gareau ne situe géographiquement les expressions ou termes qu'il analyse que fort rarement. Et parmi les lieux où il situe certains emplois, jamais je n'ai retrouvé le nom de Bellegarde.
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