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Des histoires

Les Soeurs de Notre-Dame de Chambriac

Un bout d'histoire (114)

Les Soeurs de Notre-Dame de Chambriac (1)

Le Pensionnat de Notre-Dame d'Auvergne. Ce pensionnat dirigé par les Soeurs de Notre-Dame est admirablement situé au point de vue climatique sur le penchant d'une colline, abrité des vents du Nord et exposé en plein Sud aux rayons vivifiants du soleil. Il se trouve à côté de l'église et à un demi-mille de la station du chemin de fer. Les soeurs qui le dirigent sont munies des diplômes les plus élevés et ont acquis une expérience consommée dans les grands pensionnats d'Europe dont elles ont adopté les meilleures méthodes d'enseignements. La rentrée est fixée au jeudi 9 octobre 1913.
Le Patriote de l'Ouest
le 11 septembre 1913

Cet article dans Le Patriote de l'Ouest avait pour but d'intéresser de futurs pensionnaires au couvent de Ponteix. D'autres articles de l'époque tentaient d'attirer des colons vers l'Ouest canadien. Pour cette raison, on embellisait la situation, la géographie, le climat, etc. Plusieurs colons ont été déçus lorsqu'ils sont arrivés dans l'Ouest. Le pensionnat que les Soeurs de Notre-Dame de Chambriac ont trouvé à leur arrivée dans l'Ouest en 1913 n'était même pas prêt à les accueillir.

En janvier 1913, l'abbé Albert-Marie Royer, curé fondateur de Notre-Dame d'Auvergne, était en France pour un repos de quelques mois et il s'était rendu à Chamalières en Auvergne visiter la supérieure des Soeurs de Notre-Dame de Chambriac. «Durant son séjour il visita les soeurs de la congrégation de Notre-Dame de Chambriac afin de leur faire connaître son désir de trouver, pour sa paroisse, des enseignantes et des infirmières.»(1) L'abbé Royer avait alors reçu l'assurance de la supérieur que des religieuses seraient en Saskatchewan avant septembre 1913.

Les religieuses s'étaient rendues jusqu'à Swift Current sur la ligne principale du Canadien Pacifique et ensuite jusqu'à Pambrun, petit village situé à quelques milles au nord de Ponteix, sur une ligne secondaire du Canadien Pacifique. L'abbé Royer avait envoyé une personne rencontrer les religieuses: «Vers 2h30, les soeurs sont montées en voiture - dans une démocrate sans doute - pour s'acheminer, enfin, vers leur destination! Il faisait un soleil brûlant et les chemins étaient si poudreux qu'on voyait à peine les chevaux dans la nuée de poussière.»(2)

À leur arrivée à Ponteix, les Soeurs de Notre-Dame de Chambriac ne trouvent pas un beau couvent prêt à les accueillir. La rentrée des classes est prévue pour le 5 novembre, et non pas le 9 octobre comme l'avait annoncé l'article du Patriote, mais rien n'est prêt pour accueillir les pensionnaires. La maison n'est pas achevée; les ouvriers sont lents. L'eau n'est pas buvable; il faut en transporter d'un puits à un coût de 25 cents le tonneau. «Un autre problème, le pain! Pas de boulanger, chaque famille cuisait son pain. Les soeurs n'étaient pas habituées à faire le pain et la maison était si froide que la pâte ne levait pas. Le pain était mal réussi; brûlé ou pas assez cuit!»(3)

Les religieuses veulent remettre le début des classes à plus tard, mais trois garçons de Ferland (Noé et Médelger Chabot et Antonio Fournier) arrivent pour le 5 novembre et ils viennent de trop loin pour être renvoyés chez eux. Les garçons sont mis au travail. Le couvent est enfin prêt à accueillir les enfants de la région vers la fin du mois de novembre.

En janvier 1914, on demande aux religieuses d'assumer l'enseignement à l'école publique du village. L'article du Patriote avait vanté la formation de ces religieuses: «Les soeurs qui le dirigent sont munies des diplômes les plus élevés et ont acquis une expérience consommée dans les grands pensionnats d'Europe dont elles ont adopté les meilleures méthodes d'enseignements.»4 Mais en réalité, les soeurs ne parlent pas encore un bon anglais, et elles n'ont pas encore reçu leurs certificats pour enseigner en Saskatchewan. Deux d'entre elles ont même été laissées à Regina pour obtenir le certificat de la Saskatchewan et pour apprendre un peu d'anglais.

Les religieuses proposent alors un compromis; deux d'entre elles iront enseigner le français à l'école publique le matin, tandis qu'une jeune institutrice, Mlle Thériault, enseignera l'anglais au couvent. Dans l'après-midi, on changera d'écoles. L'inspecteur du ministère de l'Éducation vient visiter l'école publique et le couvent à Ponteix en novembre 1914. Ses recommandations embarrassent les religieuses; elles ne doivent plus retourner à l'école publique puisqu'elles n'ont pas les diplômes de la Saskatchewan. Elles peuvent continuer à enseigner dans leur couvent en le désignant école privée.

Mais bientôt, les religieuses feront honneures à l'abbé Royer et à la petite paroisse de Notre-Dame d'Auvergne.

(1) Lacoursière-Stringer, Rachel, Histoire de Ponteix , Steinbach (Man.): Derkson Printers, 1981, p.18.
(2) Robert, Soeur Léa, «Soeurs de Notre-Dame d'Auvergne dans l'Ouest canadien 1913 à 1979», Histoire de Ponteix, de Rachel Lacoursière-Stringer,
p. 51. Une démocrate est une voiture généralement tirée par deux chevaux. La démocrate se distingue du «buggy» par ses deux sièges.
(3) Ibid., p.51.
(4) Le Patriote de l'Ouest, le 11 septembre 1913.

Lacoursière-Stringer, Rachel, Histoire de Ponteix , Steinbach (Man.): Derkson Printers, 1981.

Le Patriote de l'Ouest, le 11 septembre 1913.

Lorsqu'elles avaient accepté de venir à Ponteix en 1913, on Avait promis un beau couvent aux Soeurs de Notre-Dame de Chambriac. À leur arrivée, elles avaient plutôt trouvé une pauvre chaumière. En 1916, elles font donc construire un nouveau couvent à Ponteix. Les religieuses s'installent dans la nouvelle bâtisse en novembre de la même année. Dès la première année, elles accueillent une soixantaine de pensionnaires et une vingtaine d'externes. D'autres religieuses vont suivre des cours à Regina afin d'être reconnues par le ministère de l'Éducation.

En 1920, la commission scolaire revient demander aux religieuses d'assumer l'enseignement à l'école publique. Cette école avait été construite sur un terrain donné par le Canadien Pacifique. «On déménagea l'école de Notre-Dame...y ajouta deux classes en forme de T et puis on bâtit une quatrième classe. En 1923, un incendie détruisait les deux classes.»(1) Une nouvelle école en brique est construite, avec sept salles de classe et on la nomme École Poirier en honneur du nouveau curé de Ponteix.

Au couvent, le nombre de pensionnaires se maintient durant toutes les années 1920, mais la crise économique des années 1930 apporte des changements. En 1931-32, par exemple, le nombre de pensionnaires baisse à une quinzaine, alors que le nombre d'externes augmente à plus de soixante jeunes. C'est que les parents n'ont pas les moyens de payer la pension de leurs enfants.

Au début, le couvent de Ponteix accepte seulement les garçons jusqu'à l'âge de douze ans. Ensuite, les garçons poursuivent leurs études au Collège Mathieu de Gravelbourg, ou délaissent l'école. En 1934, Mgr Melanson, évêque du diocèse de Gravelbourg, demande aux religieuses de changer leur politique d'accessibilité afin d'accepter les garçons et les filles sans distinction d'âge. Puisque les sous sont rares durant la crise économique, les parents n'ont pas les moyens d'envoyer leurs fils au Collège de Gravelbourg. Les garçons pourront ainsi terminer leurs études secondaires à Ponteix.

Les religieuses acceptent et en 1934, le nombre d'élèves au couvent de Ponteix atteint 117; trente-trois élèves sont au secondaire. L'année suivante, 133 élèves se présentent au couvent et pour la première fois, les religieuses doivent refuser des élèves; il n'y a pas de place pour accueillir tous ces jeunes. Le nombre d'élèves demeure élevé pendant la Deuxième Guerre mondiale. «Les soeurs sont courageuses et les élèves ont bonne volonté et sont studieux, aussi arrive-t-on à de bons résultats. Mais la guerre continue et devient plus dure; même au Canada il y a des restrictions: sucre, matières grasses, etc.»(2)

La guerre voit aussi le nombre de pensionnaires augmenter et les religieuses doivent acheter d'autres lits, car l'évêque leur demande de ne pas refuser d'élèves. «En dépit du nombre des élèves, les revenus étaient maigres: les prix de pension et de scolarité étaient au rabais, l'hiver long et rigoureux, que d'argent envolé en fumée par la cheminée!»(3)

Au début des années 1950, le rôle du couvent de Ponteix change. Le ministère de l'Éducation commence à créer les grandes unités scolaires. À Ponteix, l'école publique va être agrandie et on va organiser un système de transport des élèves. «Le couvent, école privée depuis quarante ans, n'avait plus sa raison d'être. L'heure n'était-elle pas propice pour fermer cette école privée et le pensionnat?»(4) Le couvent ferme ses portes à la fin juin 1953. Les commissaires d'école se trouvent dans une position embarrassante; ils ne pourront jamais construire une école assez grande pour accueillir tous les élèves avant le début septembre. Ils demandent aux soeurs de leur louer des classes dans le couvent. De plus, ils demandent aussi aux religieuses d'enseigner à l'école publique.

Les Soeurs de Notre-Dame de Chambriac ont beaucoup contribué au développement de Ponteix. En plus de s'occuper de l'enseignement, elles ont été responsables de l'établissement de l'hôpital de la ville. Et, plusieurs religieuses ont enseigné dans d'autres communautés environnantes, dont Ferland, Dollard et Frenchville.

(1) Le Clin d'oeil Jeune-Saskois, «Profil de Ponteix», Supplément jeunesse, Eau vive, le 26 avril 1990, p. 8.
(2) Robert, Soeur Léa, «Soeurs de Notre-Dame d'Auvergne dans l'Ouest canadien 1913 à 1979», Histoire de Ponteix, de Rachel Lacoursière-Stringer. p.56.
(3) Ibid., p. 57.
(4) Ibid., p. 58.

Clin d'oeil Jeune-Saskois, «Profil de Ponteix», Supplément jeunesse, Eau vive, le 26 avril 1990.

Lacoursière-Stringer, Rachel, Histoire de Ponteix, Steinbach (Man.): Derkson Printers, 1981.





 
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