Des lieuxLebretLe cercle local de l'A.C.F.C. à Lebret vient d'élire ses nouveaux officiers pour l'année 1914-1915. Voici le résultat des élections: Président d'honneur, R.P. Carrier, O.M.I.: Président actuel, M. Martial Filiatrault: Vice-président, J.Z. Laroque: Sec-trésorier, M. Émile Thomas: 1er conseiller, M. Arthur Bouffard: 2e conseiller, M. J.B. Prévost, fils: 3e conseiller, M. Nap. Pilon: 4e conseiller, M. R.P. Boyer, O.M.I.: 5e conseiller, M. Hermas Charbonneau: 6e conseiller, M. J.Z. Lafleur. Ce nouveau bureau de direction décida aussitôt d'organiser une soirée de paniers et de cartes afin de se procurer des fonds en vue de défrayer les dépenses du prochain congrès de l'Association qui aura lieu à Lebret cet été. Le Patriote de l'Ouest le 14 janvier 1915 L'une des plus vieilles paroisses et communautés canadiennes-françaises de la Saskatchewan est située dans la vallée Qu'Appelle, à environ dix kilomètres seulement de l'ancien Fort Qu'Appelle. La paroisse du Sacré-Coeur à Lebret a été fondée en 1866 par l'abbé Noël-Joseph Ritchot, celui qui allait joué un si grand rôle dans la création du Manitoba en 1870. L'évêque de Saint-Boniface, Mgr Alexandre-Antonin Taché, avait visité la région l'année précédente lorsqu'il s'était perdu en revenant à la Rivière-Rouge après avoir visité la mission d'Île-à-la-Crosse. «J'arrêtai ma monture pour contempler quelques instants le délicieux panorama qui s'offrait à mes regards. C'était une magnifique journée dont notre Nord-Ouest canadien est si fier. Des flots de lumières inondaient la vallée de Qu'Appelle, enrichie des suaves fraîcheurs de la plus pure atmosphère. Au-dessus de nos têtes, un ciel sans nuage dont la douce limpidité porte défi au ciel, réputé incomparable, d'Italie. À nos pieds, quatre lacs dont la transparence et le calme semblaient rivaliser avec ceux de l'atmosphère, réunis entre eux par ce filet d'argent qui s'appelle rivière Qu'Appelle et bordés de tous côtés par ces collines qui encaissent la vallée dans leurs contours si variés.»(1) Mgr Taché, ayant décidé qu'il devrait y avoir une mission à cet endroit, a demandé à l'abbé Ritchot de s'y rendre pour jeter les bases de la paroisse du Sacré-Coeur. «Comme Monseigneur n'avait pas de sujet pour entreprendre cette mission, M. Ritchot offrit ses services qui furent acceptés avec reconnaissance. Il partit au printemps de 1866 et commença les premiers établissements. Revenu à l'automne à Saint-Norbert, il retourna de nouveau à Qu'Appelle pour y terminer les constructions projetées. Cette première chapelle temporaire était construite en bois équarri et recouverte en chaume. Le rez-de-chaussée servait à l'office divin et la partie supérieure était destinée à la résidence du missionnaire.»(2) Le père Jules Decorbey, récemment arrivée de France, est mandaté par Mgr Taché de se rendre à la mission de la vallée Qu'Appelle en 1868. Il érige une croix et dédie la mission à saint Florent. La mission de Lebret deviendrait dorénavant la résidence officielle pour nombreux missionnaires oblats qui voyageraient à travers le sud de l'actuelle province de la Saskatchewan. Parmi ces missionnaires oblats, mentionnons les pères Decorbey, Hugonard et Lestanc. En 1884, le père Hugonard a établi l'école industrielle pour les Indiens de la région. Il en a été le principal jusqu'à sa mort en 1917. L'année de la création de l'école, le père Hugonard a fait venir les Soeurs Grises de Montréal pour s'occuper de l'enseignement des petits Indiens à l'école. Une longue association a commencé entre les Soeurs Grises et l'école qui s'est poursuivi jusqu'en 1975. C'est la mission de Lebret qui a acheté la première lieuse à corde (binder) dans le Nord-Ouest. C'est le père Hugonard qui est responsable de son achat.«Le Révérend père nous a dit qu'ils avaient une lieuse à fil de fer à la mission quand il a entendu dire qu'il pouvait en acheter une à corde. Il en a acheté une à Winnipeg pour 320 $ et il s'est rendu lui-même à Flat Creek (Oak Lake, Manitoba) la chercher au train pour la rapporter à la mission.»(3) À partir de 1884, des Canadiens français ont commencé à s'établir dans la vallée, près de l'ancienne mission établie en 1866 par le père Ritchot. Un des premiers colons et commerçants qui s'établit dans la vallée Qu'Appelle, à Lebret, est Camille Coupal. Né vers 1850 dans la province de Québec, il se dirige vers le Manitoba avec sa famille vers 1881. Il arrive à Qu'Appelle en 1885 avec sa femme Delphine et ses huit enfants. La famille se rend ensuite au Fort Qu'Appelle. «Son épouse, Delphine, a déjà fait du commerce à Montréal et elle ouvre un petit magasin général pour concurrencer le magasin de la Baie d'Hudson, jusqu'alors le seul de la région.»(4) Puisque Camille Coupal veut que ses enfants reçoivent une éducation catholique et française, il déménage bientôt sa famille à Lebret où il ouvre un autre magasin. «C'est Madame Coupal qui s'occupe du commerce. Son mari, lui, se réserve un homestead à cinq kilomètres au nord de Lebret.»(5) Au début du XXe siècle, Camille Coupal obtient douze scrips de Métis de la région de Lebret. Ces scrips donnent droit à 2 880 acres qu'il échange pour quatre sections et demie de terre près de Lajord. Camille Coupal ferme son magasin à Lebret en 1906 et il quitte la région pour son ranch à Lajord. En 1899, les Soeurs de Notre-Dame des Missions arrivent pour ouvrir un couvent à Lebret. Elles s'occupent aussi de l'enseignement à l'école publique du village, comme le témoigne cet article du Patriote de l'Ouest du 14 décembre 1921. «Les Rév. Soeurs de Notre-Dame des Missions ont fait donner un magnifique concert par leurs enfants du couvent et de l'école du village. La salle paroissiale était comble des parents qui sont venus applaudir les gestes de leurs chers petits enfants qui se sont exécutés d'une manière surprenante.»(6) En 1915, l'Association catholique franco-canadienne de la Saskatchewan tient son congrès à Lebret. En effet, puisque les coffres de l'association sont vides cette année, il n'y a pas de congrès général mais une simple réunion. Malgré la faible assistance, la réunion réussit quand même à être animée. C'est à cette réunion qu'on décide de choisir le Patriote de l'Ouest comme l'organe officiel de l'ACFC. Les années 20 marquent l'arrivée de nouveaux colons canadiens-français. Plusieurs s'établissent sur des fermes mais d'autres fondent des commerces au village. On commence même à y établir des maisons de villégiatures dans le but d'attirer les touristes. «Petit à petit l'oiseau fait son nid. De temps en temps on voit surgir quelque chose de nouveau à Lebret. Un grand hôtel et maison de pension bâti et tenu par M. N. Ménard, une magnifique salle de ville et de paroisse en même temps qui nous rend la vie bien plus agréable à présent qu'on peut vaguer à nos organisations librement.»(7) D'autres commerces voient le jour en 1921 à Lebret. Charles-Auguste Meloche de Ponteix devient gérant d'une nouvelle cours à bois, Jean-Charles Carrière ouvre une salle de barbier «où tout le monde peut aller se faire barbifier à n'importe quel temps»(8) et c'est aussi la date de l'arrivée d'un médecin canadien-français. «Nous sommes heureux de signaler l'arrivée parmi nous du Dr. W.A. Plourde, médecin et chirurgien de Willow City, North Dakota.»(9) Les Oblats de Marie Immaculée continuent de jouer un rôle important dans le développement de Lebret. En 1927, ils établissent le Scolasticat du Sacré-Coeur à Lebret pour voir à la préparation des vocations oblates dans l'Ouest canadien. Pendant longtemps, la croix érigée par le père Jules Decorbey, o.m.i., en 1868, était un point de repère pour les visiteurs à Lebret. On dit que le bon père aurait peut-être érigé cette croix à l'endroit où Mgr Taché avait premièrement vu la vallée Qu'Appelle en 1865. Références (1) Carrière, Gaston, o.m.i., L'Apôtre des Prairies, Joseph Hugonnard, o.m.i., 1848-1917, Montréal: Rayonnement, 1967, p. 17 (2) Prud'homme, L.-A., Monseigneur Noël-Joseph Ritchot, 1825-1905, Winnipeg: Canadian Publishers Limited, 1928, p. 23. (3) Hawkes, John, The Story of Saskatchewan and its People, Volume I, Chicago-Regina: The S. J. Clarke Publishing Company, 1924, p. 360. (Traduction) (4) Lapointe, Richard, 100 NOMS, Regina: Société historique de la Saskatchewan, 1988, p. 88. (5) Ibid., p. 88. (6) «Lebret», Le Patriote de l'Ouest, le 14 décembre 1921, p. 6. (7) «Lebret», Le Patriote de l'Ouest, le 23 novembre 1921, p. 6. (8) Ibid., p. 6. (9) «Lebret», Le Patriote de l'Ouest, le 14 décembre 1921, p. 6. Sources Un bout d'histoire... 169 et 170 Carrière, Gaston, o.m.i., L'Apôtre des Prairies, Joseph Hugonnard, o.m.i., 1848-1917, Montréal: Rayonnement, 1967. Hawkes, John, The Story of Saskatchewan and its People, Volume I, Chicago-Regina: The S. J. Clarke Publishing Company, 1924. Prud'homme, L.-A., Monseigneur Noël-Joseph Ritchot, 1825-1905, Winnipeg: Canadian Publishers Limited, 1928. Lapointe, Richard, 100 NOMS, Regina: Société historique de la Saskatchewan, 1988. Le Patriote de l'Ouest, le 14 décembre 1921 et le 23 novembre 1921. |
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