Revue historique: volume 3 numéro 4Le Phénix renaît de ses cendresL'incendie du Collège Mathieu par Laurier Gareau Vol. 3 - no 4, mai 1993
«C'était comme un enfer...», déclare le chef des pompiers de Gravelbourg. «À notre arrivée, les flammes sortaient de partout, parle toit, parle grenier. lly avait beaucoup de fumée, cela a compliqué la localisation du foyer (de l'incendie)», ajoute un des pompiers volontaires de Gravelbourg. (1) Trois semaines à peine après la présentation de la pièce Le Phénix renaîtra-t-il? de Laurier Gareau, par le Théâtre des Sans Minots de Gravelbourg, les autorités du Collège Mathieu doivent se poser la question: le Phénix (le Collège) renaîtrait-il de ses cendres? C'est le 14 mai 1988, par un samedi matin très venteux, que la tragédie frappe la seule institution d'éducation française secondaire privée en Saskatchewan. L'incendie s'est déclaré dans l'ancien hangar d'aviation transformé, en 1949, en gymnase et bientôt les flammes se sont étendues à l'édifice principal construit entre 1920 et 1924. Dans l'espace de quelques heures, il ne reste rien du vieux Collège Mathieu sauf la bibliothèque, la résidence des garçons et le MAT. La journée même, les élèves sont renvoyés chez eux. Mais la direction du Collège ne veut pas sacrifier l'année des jeunes. «L'année scolaire des étudiants n'est pas remise en cause et IIyaura une graduation le 21 mai comme prévue.»(2) Pendant l'absence des élèves, les gens de Gravelbourg unissent leurs efforts pour aménager des locaux temporaires dans la bibliothèque et dans le Centre culturel Maillard. Les classes reprennent seulement dix jours après l'incendie du 14 mai. Le Collège est plus qu'un édifice. On décide de rebâtir; comme le Phénix de la mythologie, le Collège Mathieu va renaître de ses cendres. Le directeur général, Florent Bilodeau, et la présidente de la Corporation du Collège, Irène Chabot, deviennent les principaux architectes de la reconstruction du collège. L'automne suivant, les jeunes acceptent de revenir au Collège Mathieu, même s'ils devront passer l'année à courir du Pavillon (administration) et de la bibliothèque (les études) au Centre culturel Maillard (les classes), à la Palestre (les sports), à un ancien édifice de débosseurs (la cafétéria), au MAT (les loisirs) jusqu'à l'hôtel Mayfair (la résidence des filles). Déjà, les travaux de construction ont commencé sur un nouvel édifice. Le premier bâtiment à être construit est la résidence des filles. Elles aménagent leurs nouvelles chambres en janvier 1989. L'automne suivant, c'est dans un tout nouvel édifice qu'on accueille les élèves. Le nouveau Collège Mathieu a coûté environ huit millions de dollars. Les gouvernements fédéral et provincial y ont contribué la part du lion, mais la communauté fransaskoise a ajouté sa contribution. La direction du Collège Mathieu travaille étroitement avec les employés de la Société Radio-Canada pour organiser un téléthon pour prélever des fonds. Le Mathieuthon a lieu la fin de semaine de l'ouverture officielle du nouveau Collège. «La grande majorité des vedettes invitées à donner de leur temps et énergie sont, pour la plupart, des anciens du Collège Mathieu. On verra le groupe Hart Rouge, Folle Avoine, Josée Lajoie, Nicole Lafrenière, Joanne Sylvestre, Les Danseurs de la Rivière la Vieille, Francis Marchildon, Andrée Noonan, Café Inn
(Gerry Pittet), Le MAT et plusieurs autres.»(3) Philippe Fournier, l'Octopus, Charles Dumont, Donald Sirois et Michel Marchildon sont également des participants de l'activité qui est diffusée sur les ondes de la radio et de la télévision française en Saskatchewan et dans les autres provinces de l'Ouest. Même le directeur du Collège, Florent Bilodeau, retravaille un de ses vieux monologues pour l'occasion. Le Mathieuthon a lieu le samedi 24 février 1990 et on réussit à recueillir plus de 200 000$ envers le projet de reconstruction du Collège. Environ 300 personnes, comme le Frère Raymond Deschênes, se rendent aux studios de Radio-Canada pour assister à l'événement. Le lendemain, tout le monde se rend à Gravelbourg pour assister à l'ouverture officielle du nouveau Collège Mathieu. A cette occasion, Jean-Pierre Picard écrit dans un éditorial de l'Eau vive: «Le Mathieuthon n'a duré que quelques heures... il nous a également permis de parcourir, au fil des mots échangés, des générations de complicité. Car c'est ce que représente le Collège Mathieu pour les francophones de l'Ouest. Un fil conducteur rattachant notre présent à une histoire trop facile à oublier. Que serait la francophonie de l'Ouest sans le leadership qu'a développé le Collège Mathieu au fil des générations?»(4) Le Phénix renaissait bel et bien de ses cendres. Aujourd'hui, environ 200 élèves fréquentent le Collège Mathieu de Gravelbourg. L'édifice construit entre 1920 et 1924 n'y est plus, mais la tradition continue. Schola discere vitam. (1) Reportage de l'Eau vive du 19 mai 1988, p.1. (2) Ibid., p. 3. (3) Eau vive du 1er février 1990, p. 3. (4) Ibid., p. 4. |
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