Revue historique: volume 17 numéro 1Le livre de langue française en Saskatchewan, de l'époque des pionniers aux années 1930par Frédéric Roussel Beaulieu vol. 17 - no 1, septembre 2006 Lorsque les gens quittaient leur province ou leur pays d'origine pour venir s'établir dans l'Ouest canadien, ils apportaient seulement les biens jugés nécessaires pour assurer leur survie sur un homestead au milieu de la prairie. Les livres ne faisaient pas partie de ces objets essentiels donc les pionniers les laissaient derrière eux. L'expérience de l'isolement amena certains colons à désirer lire à nouveau un livre afin de les aider à surmonter cette épreuve. Or, une fois établi sur leur carreau, la plupart des nouveaux arrivants ne pouvaient consacrer leurs maigres ressources pécuniaires à l'achat d'un livre. Cet objet de savoir et de divertissement, qui autrefois agrémentait leur soirée, devenait un bien luxueux. Cette réalité incita des individus et des associations à trouver des moyens de procurer aux pionniers des journaux et des livres afin qu'ils puissent se détendre après leur dur labeur. Chez les Franco-Canadiens de la Saskatchewan, le désir de se procurer des livres dépassait le simple besoin d'évasion; il prenait une dimension linguistique et culturelle. Les jeunes étaient en train de perdre leur langue parce qu'ils n'avaient rien à lire en français. À mesure que la province se développait et que le niveau de prospérité général augmentait, les Franco-Canadiens trouvèrent le moyen d'obtenir des livres pour assurer la continuité et la transmission de la langue et de la culture française ainsi que des valeurs catholiques. Des bibliothèques paroissiales furent constituées et les particuliers développèrent leur propre bibliothèque. Des réseaux de libraires permirent aux institutions et aux individus de se procurer des livres aisément. De son côté, l'élite cléricale et laïque veillait à ce que les colons nourrissent leur esprit avec une littérature conforme à la moralité catholique.
L'Aberdeen Association et la distribution de livres en français aux pionniers À la fin du XIXe siècle et tout début du XXe siècle, les colons franco-catholiques pouvaient obtenir des livres grâce à l'Aberdeen Association. Cette organisation avait été créée suite à une suggestion faite par la Comtesse d'Aberdeen alors qu'elle visitait l'Ouest canadien en 1890 en compagnie de son mari le comte d'Aberdeen, lequel fut gouverneur général du Canada de 1893 à 1899. Au cours de son voyage, la comtesse remarqua que les colons ne disposaient que du stricte nécessaire dans leurs modestes demeures. La plupart d'entre eux avait reçu une bonne éducation et pourtant ils étaient privées d'informa-tions venant de l'extérieur. De plus, ils avaient tant besoin de toutes leurs ressources pour faire fructifier leur terre, qu'ils n'auraient jamais dépensé ne serait-ce qu'un sou pour l'achat d'un journal ou d'un livre. La Comtesse d'Aberdeen estima qu'il fallait faire quelque chose pour remédier à cette situation. Lors d'un discours qu'elle prononça en octobre 1890 à l'église Knox de Winnipeg, elle suggéra à son auditoire féminin qu'il serait certainement possible d'obtenir des agents d'immigration les noms des nouveaux arrivants et de leur envoyer à l'occasion des journaux, des magazines et des livres ramassés ici et là (1). Quelques femmes qui assistaient à la conférence saisirent l'idée au vol et fondèrent en novembre 1890 The Lady Aberdeen Association for Distribution of Literature to Settlers in the West (2). L'association entreprit de dresser des listes de colons désirant recevoir des journaux, des magazines et des livres. Entre 1890 et 1901, l'Aberdeen Association fonda des cercles locaux dans 18 villes à travers le Canada et quatre sections furent également mises sur pied en Grande-Bretagne où Lady Aberdeen vanta les mérites de l'organisation(3). En 1898, elle avait même organisé un comité central à Ottawa afin de mieux coordonner le travail des cercles locaux qui avaient réussi à constituer un réseau de donateurs qui les alimentaient constamment en journaux, magazines et livres(4). L'association était dirigée par des femmes appartenant à des familles bourgeoises qui entretenaient des liens étroits avec des membres du pouvoir financier et politique. Ces contacts furent fort utiles pour obtenir la livraison gratuite des paquets par la Canadian Pacific Railway et par la Poste canadienne. À son apogée, en 1905, l'Aberdeen Association expédiait plus de 2000 colis à des pionniers de l'Ouest canadien(5). Par la suite, l'association a connu un déclin parce que les villages et les villes parvenaient à assurer eux-mêmes un service de bibliothèque et procurer des livres à leurs citoyens. Le gouvernement de la Saskatchewan mettra d'ailleurs sur pied un service de livres mobiles. La Première Guerre mondiale mit un terme aux activités de l'Aberdeen Association. Tout au long de son existence, l'association distribua à des colons de différentes origines ethniques des livres rédigés dans leur langue maternelle même si elle voyait dans ses activités un moyen d'assurer la prédominance de la culture britannique et canadienne-anglaise dans les prairies(6). C'est grâce à un cercle canadien-français fondé à Montréal en 1898 que les colons franco-catholiques purent obtenir des livres français. Dès sa première année, ce cercle compta 32 membres qui assurèrent l'expédition de 150 paquets à différents endroits dans les Territoires du Nord-Ouest, dont Duck Lake, Domrémy, Melfort, Wolseley, Montmartre et Battleford (7). En 1899, le cercle canadien-français de Montréal avait 237 familles sur sa liste d'expédition. La même année, en mai, le cercle organisa une grande assemblée publique à laquelle furent invités des citoyens influents de la ville. Le père Albert Lacombe, missionnaire oblat qui œuvra dans l'Ouest canadien pendant plusieurs années, adressa alors quelques mots à l'auditoire et il louangea le travail de l'Aberdeen Association (8). Les bibliothèques paroissiales Au moment où l'association atteignit son apogée, dans la première décennie du XXe siècle, les chefs franco-catholiques, surtout les prêtres, commencèrent à réfléchir aux moyens qu'ils pourraient prendre pour regrouper les différents groupes de langue française venus s'établir en Saskatchewan et maintenir une vie sociale et culturelle dans leur langue. Ils encouragèrent la formation de cercles locaux de la Société Saint-Jean-Baptiste qui organisèrent des activités patriotiques et culturelles de toutes sortes dont des bibliothèques. Les chefs de file voyaient, dans ces dernières et la lecture de livres en français, un moyen d'assurer la continuité de la langue et de la culture française auprès de la jeunesse. C'est donc à la Société Saint-Jean Baptiste (SSJB) que revient l'honneur d'avoir institué les premières bibliothèques de langue française en Saskatchewan.
À Wauchope, à la suggestion de l'abbé Jean-Isidore Gaire, un groupe de paroissiens fonda un cercle local de la SSJB le 2 août 1908. Lors d'une réunion qui eut lieu peu de temps après la fondation, les membres discutèrent des difficultés d'obtenir des livres en français dans la paroisse(9) . Plusieurs pionniers de la région étaient abonnés à des journaux de l'Est, comme La Patrie, L'Action catholique et La Presse, mais cela ne répondait pas entièrement à leurs besoins. Lors de cette réunion, le trésorier, Arsène Sylvestre, annonça aux membres que la Société disposait de 120 dollars et que cet argent pourrait être utilisé pour commander des livres à des maisons d'édition(10). Une résolution en faveur de la création d'une bibliothèque locale fut alors adoptée par les membres du bureau de direction de la Société. Le vice-président, Maurice Quennelle, et l'abbé Gaire dressèrent une liste des livres qui seraient commandés en France. Les livres arrivèrent en 1910 et la bibliothèque ouvrit enfin ses portes. Afin de pouvoir acheter d'autres livres, les usagers devaient débourser quelques sous pour la location des livres de la bibliothèque. Les livres pouvaient être empruntés pour une période de 15 jours. Les membres de la SSJB payaient un tarif de cinq cents alors que les non-membres devaient débourser la somme de 10 cents (11). Un peu plus à l'Ouest, les paroissiens de Gravelbourg et de Willow Bunch fondèrent eux aussi des cercles locaux de la Société Saint-Jean-Baptiste qui organisèrent des bibliothèques. Le cercle local de Willow Bunch, fondé en 1911, voulait donner un appui tangible à la cause de l'éducation. Le comité chargé de ce dossier décida «de procurer à la population une nourriture intellectuelle saine et honnête (12) » en fondant une bibliothèque peu de temps après l'incorporation du cercle local en janvier 1912. La bibliothèque fut logée dans la salle paroissiale et elle renfermait près de 300 volumes au début des années 1920 (13). Selon l'abbé Clovis Rondeau, il s'agissait pour la plupart des livres d'auteurs canadiens-français(14). L'abonnement annuel s'élevait à un dollar et l'emprunt des livres se faisait le dimanche après la grande messe(15). La Société Saint-Jean-Baptiste poursuivit ces activités à Willow Bunch jusqu'en 1945, alors qu'elle avait cessé ses activités en 1932 à Gravelbourg. Les bibliothèques de Wauchope, Willow Bunch et Gravelbourg s'inscrivaient dans un mouvement de création de bibliothè-ques paroissiales qui se manifesta dans tous les centres français de l'Ouest canadien au début des années 1910. La Patriote de l'Ouest encourageait la création de ces bibliothèques en Saskatchewan, car, selon les rédacteurs du journal, «fournir au peuple, surtout pour les longues veillées de l'hiver, de bonnes lectures catholiques et françaises, c'est faire œuvre d'apostolat catholique et national(16) ». Les rédacteurs du Patriote sou-lignaient qu'une contribution de 10 sous par abonné suffissait à couvrir les frais de fonctionnement. Ce mouvement de création de bibliothèques paroissiales ne semble pas avoir été ralenti par le premier conflit mondiale qui sévit de 1914 à 1918. En 1917, des Canadiens français d'Edmonton fondèrent l'œuvre des bons livres français dans l'Ouest pour encourager leurs compatriotes à ouvrir des bibliothèques(17).
Dans certaines paroisses, des notables, qu'ils soient médecins, avocats ou membres du clergé, possédaient des bibliothèques personnelles assez bien garnies en raison de leur occupation. Il leur arrivait parfois de prêter des livres à leurs concitoyens en attendant que soit constituée une bibliothèque parois-siale. C'est ce que fit l'abbé Jean Denis alors qu'il assuma la direction de la paroisse de Ferland de 1934 à 1938. Cet homme très érudit possédait une volumineuse bibliothèque et il prêtait sans hésitation des volumes à ses paroissiens. Pendant son ministère, il organisa une bibliothèque paroissiale. Selon l'abbé Adrien Chabot, un incendie a détruit le presbytère le 23 février 1937. Il n'est pas impossible que la bibliothèque de l'abbé Denis fut alors consumée par les flammes(19). Les bibliothèques scolaires Les bibliothèques paroissiales n'étaient pas les seuls endroits où les jeunes franco-catholiques pouvaient se procurer des livres. Les écoles publiques et séparées qu'ils fréquentaient possédaient parfois des bibliothèques scolaires dont la taille et le contenu variaient d'un endroit à l'autre. L'école Routhier était une de ses écoles qui possédaient une bibliothèque. Celle-ci était constituée de collections de livres canadiens-français et français. Parmi ses titres se trouvait des récits de voyages dont Aux vieux pays de l'abbé Henri Cimon publié à Montréal, par la Librairie Beauchemin dans la collection «Bibliothèque Canadienne»(20).
Les bibliothèques de particuliers À mesure que les centres franco-catholiques se développaient, les pionniers devenaient un peu plus à l'aise financièrement et certains se constituaient de petites collections de livres. Comme nous le verrons plus loin, ils pouvaient faire l'acquisition de livres en passant des commandes auprès de librairies situées à Prince Albert, à Winnipeg, à Montréal et même à Paris. Marie-Anne Duper-reault, dite la Perrette, lève le voile sur la présence des livres dans les chaumières des Franco-Canadiens de la Saskatchewan en parlant de sa bibliothèque dans une des chroniques qu'elle publia dans le Patriote de l'Ouest (21). Les livres de madame Duperreault occupaient trois rangées dans une étagère de sa maison à Willow Bunch.
Évidemment, on ne peut tirer de conclusions générales sur le contenu (madame Duperreault semblait apprécier particulièrement la poésie) et la taille des bibliothèques des Franco-Canadiens à partir du cas de madame Duperreault, mais il nous fournit tout de même quelques indications sur le type de livres pouvant se retrouver dans leur demeure. Le commerce du livre français qui existait en Saskatchewan dans le premier quart du XXe siècle, nous procure d'autres indices sur le contenu des bibliothèques paroissiales, scolaires et personnelles. Le commerce du livre de langue française Les bibliothèques paroissiales et les individus qui désiraient se procurer des livres en français pouvaient le faire en passant des commandes auprès de libraires de Winnipeg, de Prince Albert ou de Montréal ou encore de maisons d'édition situées à Montréal ou à Paris. C'est précisément ce que firent les fondateurs de la bibliothèque de la Société Saint-Jean-Baptiste à Wauchope en 1908(22). En 1913, le Patriote de l'Ouest souligna d'ailleurs que les bibliothèques paroissiales pouvaient garnir leurs rayons à moindre coût en s'adressant à la compagnie Winnipeg Church Good. Celle-ci fournissait pour une trentaine de dollars «une excellente collection d'une centaine de volumes des maisons Manne de Tours et la Bonne Presse de Paris(23) ». Les bibliothèques et les particuliers pouvaient tout aussi bien s'adresser à des fournisseurs canadiens. Le Patriote de l'Ouest publiait, entre autres, les annonces de la Librairie Keroack de Winnipeg et Saint-Boniface et de la Librairie DEOM de Montréal qui offraient un vaste choix de livres religieux, classiques, d'ouvrages de référence, de dictionnaires et de romans d'auteurs français ou canadiens-français(24). Les prix variaient de 60 cents à 18 dollars. Pour ce dernier montant, un lecteur pouvait obtenir le Larousse Universel en deux volumes. À compter de septembre 1914, les Franco-Canadiens pouvaient comman-der leurs livres auprès d'un libraire de la Saskatchewan. Charles-Edouard Parrot installa une librairie dans l'édifice du Patriote de l'Ouest à Prince Albert. Le catalogue de Parrot contenait surtout des livres d'auteurs canadiens-français dont Laure Conan, Camille Roy, Philippe-Aubert de Gaspé, Octave Crémazie, Pamphile Lemay, Alfred Duclos DeCelles et Hubert Larue(25). Les ouvrages offerts par Parrot couvraient tout les styles littéraires, des romans aux récits de voyage en passant par les livres religieux, l'histoire, la poésie et les biographies. Les prix variaient de 20 cents à un dollar et 15 cents. Dans sa publicité, Parrot précisait que ces ouvrages convenaient parfaitement pour des bibliothèques paroissiales, municipales, scolaires, de cercles ou privées. Pour une raison inconnue, le 21 octobre 1915, le Patriote de l'Ouest annonça qu'il serait dorénavant possible de se procurer des livres par son intermédiaire. Visiblement, la librairie de Charles-Edouard Parrot a cessé ses activités.
Les bonnes et les mauvaises lectures La plupart des comités mis sur pied pour créer des bibliothèques paroissiales dans les centres franco-catholiques comptaient parmi leurs membres le curé de la paroisse. Comme ce fut le cas à Wauchope en 1908 ou à Arborfield en 1923, celui-ci veillait à ce que le choix des livres qui orneraient les rayons de la nouvelle institution seraient des ouvrages reflétant les valeurs catholiques et françaises. Le Patriote de l'Ouest, tout en encourageant ses lecteurs à fonder des bibliothèques paroissiales, à se procurer des livres et à s'adonner à la lecture – pour soi-même ou à haute voix pour le reste de la famille—s'assurait lui aussi que ses lecteurs aient entre les mains des livres biens catholiques et français. Les rédacteurs du Patriote estimaient que «malheu-reusement beaucoup de catholiques sembl[aient] méconnaître la puissance des livres(27) », qu'elle soit positive ou négative. Pour aider la population à faire des choix judicieux, le journal publiait des chroniques où les auteurs faisaient des recensions de bons livres ou mettaient en garde les lecteurs contre la moralité douteuse de quelques titres. Les lecteurs du Patriote pouvaient lire des chroniques où les auteurs recommandaient la lecture de livres religieux. Par exemple, le 1er juin 1911, le rédacteur du journal à cette époque, l'abbé A. E. Auclair, omi, fit une recension élogieuse du livre À Rome et sur les chemins de Rome où il est question de pèlerinage dans la célèbre ville italienne. Les livres profanes faisaient également l'objet de chroniques dans les pages du Patriote. Dans «Au royaume des livres», Ernest Bilodeau, d'Ottawa, traitait de différents types d'ouvrages que ce soit des romans, des biographies, des études économiques, sociologiques ou historiques. À travers ses recensions, qui étaient aussi des critiques, il tenait les lecteurs au fait des dernières parutions. Toutefois, on peut s'inter-roger sur la portée et l'efficacité de ces chroniques auprès des lecteurs du Patriote. Les ouvrages recommandés étaient susceptibles de n'intéresser qu'une frange de son lectorat, les membres de l'élite cléricale et laïque franco-canadienne. Le Patriote de l'Ouest dénonçait également les mauvaises lectures et il rappelait à ses lecteurs de ne pas fréquenter les livres mis à l'Index par l'Église catholique. Le journal publiait surtout des articles qui mettaient en garde le lecteur contre l'influence que pouvait avoir la littérature malsaine sur l'âme des jeunes. Ainsi le Patriote rapporta dans son édition du 28 novembre 1912 que trois jeunes de Toronto avaient commis un meurtre en voulant imiter ce qu'ils avaient lu dans des romans policiers. Le journal exhortait ses lecteurs à se rappeler que «le crime engendre le crime : il pénètre dans l'enfance par les mauvais romans et par les vues animés(28) ». Les livres au contenu peu orthodoxe pouvant intéresser les membres de l'élite, et plus particulièrement les enseignants, retenaient aussi l'attention des rédacteurs du Patriote. Dans son édition du 23 mai 1912, le rédacteur du journal, l'abbé Auclair, omi, informait les lecteurs que Monseigneur Archambault, évêque de Joliette, avait condamné le livre La vie du docteur Albert Laurendeau, car il contenait des erreurs philosophiques et théologiques. Madame Duperreault, dite Perrette, dénonça elle aussi les livres à la morale douteuse. En conclusion de sa chronique consacrée à sa bibliothèque, elle a écrit qu'elle a «fait un feu de joie de tous ces ouvrages inutiles qu'on lit, quand on a rien à dire, pour passer le temps! (29) » Elle souligne que les «mauvaises lectures sont un premier pas, qui peut vous mener loin; prenez-y garde! (30) ». Elle recommande donc de ne lire que des ouvrages recommandables et de faire œuvre d'apostolat en les faisant connaître et aimer. La diffusion des bons livres auprès de la jeunesse empruntait les voies les plus variées. Ainsi, dans les écoles, on distribuait des livres de prix aux élèves les plus méritant à la fin de l'année scolaire ou à l'occasion de concours. Par exemple, les jeunes franco-canadiens qui écrivaient avec succès les examens de français de l'Association catholique franco-canadienne, et qui se classaient parmi les trois premiers au sein de leur classe ou de leur école, recevaient un livre en prix. À Ferland, l'abbé Joseph Perreault, curé de la paroisse de 1931 à 1934, distribuait lui aussi des livres comme prix aux élèves de la région. Il s'intéressa activement au bon parler français dans les écoles où il organisait des concours et des débats publics. Il «savait récompenser les vainqueurs par un bon volume (31) ». Les livres remis aux élèves comme prix étaient, soit des romans ou de courtes nouvelles, soit des ouvrages à caractère historique qui mettaient en vedette des héros qui devaient servir de modèle aux élèves. Dans le Patriote de l'Ouest du 8 juin 1932, on peut lire une recension de livres offerts en prix publiés par les Édition Albert Lévesque dans la collection «Les Récompenses». Les efforts déployés par les membres des élites cléricale et laïque, les rédacteurs et les collaborateurs du Patriote pour enrayer la propagation des ouvrages jugés immoraux et pour assurer la diffusion des bons livres indiquent que, comme partout ailleurs au Canada français, les Franco-Canadiens lisaient, mais pas nécessairement ce qu'on leur recommandait.
Conclusion
Notes et références (1) Stewart G. Mein, «The Aberdeen Association : an early attempt to provide library services to settlers in Saskatchewan», Saskatchewan History, 1985, 38, 1, p. 3-4. (2) Ibid. (3) Ibid., p. 14. (4) Ibid., p. 9. (5) Ibid., p. 15. (6) Ibid., p. 12. (7) Ibid. (8) Ibid. (9) Laurier Gareau, «Maurice Quennelle, L'homme politique», Sciences humaines. Matériel d'appui. La Saskatchewan française. Volume 3. Les personnalités métisses et fransaskoises, Regina, ministère de l'Éducation, 199?, p. 235. (10) Ibid. (11) Jeannine Gaudet, «Wauchope Parish Men's Club», dans Precious Memories of Time, Wauchope, s.e., 1989, p. 146. (12) Clovis Rondeau et Adrien Chabot, Histoire de Willow Bunch, Québec, Imprimerie de l'Action sociale, 1923 / Gravelbourg, s.e., c. 1970, p. 183. (13) Ibid. (14) Ibid. (15) Gilles A. Bonneau, Saskatchewan's 100th Anniversary 1905-2005. Willow Bunch's 135th Anniversary 1870-2005, 3e édition, Willow Bunch, Saskatchewan Centennial Committee, 2004, p. 116. (16) Le Patriote de l'Ouest, 27 novembre 1913. (17) Ibid., 1er février 1917. (18) Ibid., 4 avril 1923 et Zenon Park, 1910-1983 : Yesterday, today/hier, aujourd'hui, Zenon Park, Zenon Park History Book Committee, 1983, p. 292 à 296. (19) Adrien Chabot, Aperçu historique de Ferland, s.l., s.e., c1961, p. 45. (20) Musée de Willow Bunch, collection de livres anciens. (21) Voir, Esquisses Canadiennes par Perrette, Vancouver, s.e. 1969, p. 214 à 216. (22) Gareau, op. cit. (23) Le Patriote de l'Ouest, 27 novembre 1913. (24) Ibid., 12 juin 1913, 19 mars 1914, 5 mars 1924, 12 mars 1924. (25) Publicités de Charles-Edouard Parrot dans Le Patriote de l'Ouest, 17 septembre 1914 au 16 septembre 1915. (26) Le Patriote de l'Ouest, 19 mars 1919 au 7 mars 1923. (27) Ibid., 18 janvier 1912. (28) Ibid., 28 novembre 1912. (29) Esquisses canadiennes, p. 216. (30) Ibid. (31) Chabot, op. cit., p. 43. |
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