Revue historique: volume 9 numéro 4Le docteur François-Pierre Moreaupar Joseph-P. Moreau et Francis Lefebvre Vol. 9 - no 4, avril 1999 Le docteur François-Pierre Moreau est né à Saint-Bernard, Comté de Dorchester, le lerjanvier 1884. Ii était le fils de Magloire Moreau, un descendant de Jean Moreau émigré de Bretagne en 1642. Magloire Moreau, fermier et bûcheron, fit de bonnes affaires au Kiondike avec son fils aîné Joseph. À son retour au Québec, il suggéra à François-Pierre de se faire instruire au Petit Séminaire de Québec. À 14 ans, François-Pierre savait à peine lire et écrire. Dix ans plus tard, il recevait son diplôme de médecin à l'Université Lavai de Québec. Ayant été exposé à la tuberculose qui emporta son frère aîné, il crut bon d'émigrer dans la nouvelle province de la Saskatchewan où l'air sec et salubre lui donnait de meilleures chances de survie. Il s'installa à Howell, plus tard appelé Prud'homme, où une petite communauté francophone était installée. Élu président de la commission scolaire, l'un de ses premiers devoirs fut d'embaucher une institutrice bilingue. Se fiant sur son curriculum vitae, il fit venir Ellen Mackinnon de l'Île du Prince Édouard. Malgré un français qu'il trouva grammaticalement correct mais exécrable au point de vue prononciation, il embaucha Ellen sur
le champ. En 1912, le Président de la commission scolaire et Ellen se mariaient et installaient leur ménage dans la ville de Prince Albert. Une communauté de Métis francophones avait ouvert des fermes sur la rive sud de la rivière Saskatchewan à Batoche, St-Laurent et St-Louis. Des colons du Québec et du Minnesota avaient établi une communauté francophone importante à Saint-Isidore de Bellevue. D'autres colons s'étaient établis à Domrémy et à Hoey, village à peu près au centre de ces communautés et le siège d'une des premières municipalités rurales; la municipalité de Saint-Louis. En 1918, le maire de la municipalité de Saint-Louis, William-Albert (Boss) Boucher. plus tard le Sénateur Boucher, réussit à convaincre le docteur de s'installer à Hoey au milieu de cette importante population francophone. Les défis à la compétence professionnelle et à la réputation du nouveau médecin ne tardèrent pas. La grippe espagnole faisait des ravages dans l'Ouest et elle était particulièrement virulente. Heureusement, la jeunesse relative et la robustesse des patients ainsi que leur dispersion. allégèrent la mortalité d'une façon extraordinaire. au profit de sa réputation. La pratique d'un médecin de campagne sans accès à un hôpital, dans une jeune communauté. tournait autour des soins de grossesses et des accouchements. Le docteur Moreau mit au monde des centaines d'enfants. Tous à domicile. Un réseau de tantes et de sages-femmes improvisées, aidait à le faire venir ni trop tôt, ni trop tard. Ces accouchements étaient sujets à la liste de complication et à de sérieuses difficultés de communication et de transport. Les chemins étaient souvent impassables pour l'automobile et la motoneige où le déblaiement des routes en hiver n'existait pas. Une paire de chevaux de courses de l'étable de Roland Frigon, attelés sur un «cutter» léger desservait les patients dans un rayon de six à huit milles de Hoey. Un relais de chevaux frais à cette distance, permettait des courses plus longues.
Si ces premières années avaient présenté des difficultés, elles ne se comparaient pas aux tribulations qui suivirent les années 1930. À la crise économique où le blé se vendait 25 cents le boisseau, vinrent s'ajouter des années de sécheresse qui décimèrent et mirent en banqueroute des dizaines de fermiers. Face à leur pauvreté et par un accord mutuel, les patients n'appelaient le médecin qu'en cas d'urgence sérieuse et lui, rémunéré ou non, ne refusait pas ses services Conscient de ses responsabilités et de son isolement, il tenait beaucoup à la lecture des textes et des journaux médicaux. Il garda un intérêt particulier au dépistage de la tuberculose, aux maladies de rein, au diabète et au goitre qui étaient endémiques dans la région. Il garda la confiance de ses malades en les dirigeant dès qu'il le fallait, aux médecins spécialistes et aux chirurgiens de Prince Albert, Saskatoon et Rochester. En 1947, la remontée de l'économie et la popularité du parti C.C.F. présageait l'arrivée d'un médecin d'État. Ayant dépassé la soixantaine, le docteur Moreau prit sa retraite auprès de ses frères au Québec et chez ses enfants en Alberta. Encore latiniste, il relisait dans leurs textes, les poètes et les historiens romains. Il mourut le 5 février 1956 d'une thrombose coronarienne. |
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