J.P. Beauchamp

C'est lors du deuxième congrès de l'Association Franco-Canadienne de la Saskatchewan (AFC) tenu à Regina en juillet 1913 que les francophones ont décidé d'ajouter « catholique » au nom de l'organisme pour bien marquer son caractère confessionnel. Plusieurs orateurs ont été invités à prendre la parole durant le congrès. « Les congressistes eurent l'occasion d'entendre plusieurs distingués orateurs, dont Adjutor Rivard, écrivain de renom et secrétaire général de la Société du Parler Français, le Père Auclair, rédacteur du Patriote de l'Ouest, et un représentant du Deutsche Katolische Volksverein, l'union des catholiques allemands. » (1) C'est lors de cette rencontre franco-canadienne que J.P. Beauchamp est invité à prononcer quelques mots en « sa qualité de premier colon franco-canadien de la Saskatchewan ».

Qui était J.P. Beauchamp et méritait-il vraiment le titre de premier colon franco-canadien de la Saskatchewan ? Lorsque le Canadien Pacifique commence à bâtir la section Winnipeg-Regina de son chemin de fer transcontinental en 1882, un village surgit quelques trente milles à l'est de la future capitale des Territoires du Nord-Ouest. Il s'agit du village de Troy qui deviendra par la suite Qu'Appelle. C'est à Troy, en 1885, que les soldats du général Middleton ont descendu du train pour commencer leur longue marche sur Batoche.

J.P. Beauchamp vient s'établir à Qu'Appelle un an après l'arrivée des premiers colons dans la région. « En 1883, J.P. Beauchamp acheta les intérêts de Max Goldstein dans le magasin général Kinken & Goldstein, et peu de temps après en devint le seul propriétaire. »(2) Il a été impossible de retracer l'origine de J.P. Beauchamp.

Il arrive donc en Saskatchewan en 1883, ce qui tend à remettre en question son titre de premier colon franco-canadien de la Saskatchewan. Jean-Louis Légaré est déjà dans la région de la Montagne de Bois depuis 13 ans lorsque Beauchamp arrive à Qu'Appelle. Zotique Desautels et Joseph Lapointe font aussi la traite des fourrures dans les environs de Willow Bunch avant 1883. Joseph-Benjamin Prince est dans la région de Battleford à partir de 1880 et Azarie Gareau arrive à Batoche en 1882 pour se prendre un homestead dans la région de Bellevue la même année. Au congrès de l'ACFC de 1913, chacun de ces hommes aurait pu venir contester à J.P. Beauchamp le titre de premier colon franco-canadien de la Saskatchewan, chacun étant encore vivant.

Malgré cela, reconnaissons que Beauchamp est un des premiers Canadiens français à venir s'établir dans le district d'Assiniboia au XIXe siècle. Comme il a été mentionné plus tôt, il devient commerçant à Qu'Appelle et s'établit une excellente réputation auprès des gens de la région. « Il continua son commerce jusqu'à nos jours, l'ayant établi comme étant un des meilleurs magasins dans un de nos villages de l'Ouest. L'honnêteté de Joe dans ses affaires est connue partout et il a la distinction unique de n'avoir jamais rendu un mauvais compte à un client. »(3)

J.P. Beauchamp est un des fondateurs de la paroisse de l'Immaculée-Conception à Qu'Appelle. « Avant 1884, la messe fut dite dans des maisons privées, probablement dans la maison de M. J.P. Beauchamp à Qu'Appelle. Après 1884, la messe fut dite dans la Maison d'Immigration. Entre les visites sporadiques des missionnaires, les fidèles se rendirent à la messe à Lebret. »(4) Le premier missionnaire à desservir la mission de Qu'Appelle est le père LeBrett et ensuite les pères Magnan et Campeau. La première église de l'Immaculée-Conception est construite en 1886.

J.P. Beauchamp et sa femme ne se gênent pas pour contribuer au bien-être de leur église. En 1890, par exemple, Mme Beauchamp se charge de monter une petite crèche de Noël dans l'église. En 1914, J.P. fait don d'une cloche pour l'église. « Cette nouvelle cloche en bronze fut fabriquée en France et fut donnée par M. J.P. Beauchamp. »(5)

Mais ils s'impliquent aussi dans la vie sociale de la communauté. J.P. est un fervent du curling, du cricket et du tir au fusil. Durant la Première Guerre mondiale, il est vice-président d'un organisme patriotique local dont le but est de voir aux besoins des familles des soldats. Enfin, J.P. Beauchamp s'implique aussi sur la scène provinciale. En 1913, au congrès de l'ACFC à Regina, il est élu au Comité général de l'Association catholique franco-canadienne de la Saskatchewan. « Comme il était par ailleurs peu pratique de convoquer fréquemment les membres du comité général dispersés aux quatre coins de la province, il fut résolu de former un comité exécutif composé du président de l'A.C.F.C., d'un directeur général et d'un trésorier. »(6)

(1) Lapointe, Richard et Tessier, Lucille, Histoire des Franco-Canadiens de la Saskatchewan, Regina : Société historique de la Saskatchewan, 1986, p. 212.
(2) Hawkes, John, The Story of Saskatchewan and Its People, Volume II, Chicago-Regina : The S.J. Clarke Publishing Company, 1924, p. 835. (Traduction)
(3) Ibid., p. 835. (Traduction)
(4) Archdiocese of Regina, A History, Regina : Archdiocese of Regina, 1988, p. 243. (Traduction)
(5) Qu'Appelle Historical Society, Qu'Appelle, Footprints to Progress, A History of Qu'Appelle and District, Qu'Appelle : Qu'Appelle Historical Society, 1980, p. 165. (Traduction)
(6) Lapointe, Richard et Tessier, Lucille, op. cit., p. 213.

Sources
Archdiocese of Regina, A History, Regina : Archdiocese of Regina, 1988.

Hawkes, John, The Story of Saskatchewan and Its People, Volume II, Chicago-Regina : The S.J. Clarke Publishing Company, 1924.

Lapointe, Richard et Tessier, Lucille, Histoire des Franco-Canadiens de la Saskatchewan, Regina : Société historique de la Saskatchewan, 1986.

Qu'Appelle Historical Society, Qu'Appelle, Footprints to Progress, A History of Qu'Appelle and District, Qu'Appelle : Qu'Appelle Historical Society, 1980