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Des histoires

Imprudence d'un Breton

Plusieurs dangers guettaient les nouveaux arrivants durant la colonisation de la Saskatchewan. Bon nombre souffrirent du froid au cours de leur premier hiver; une maladie ou une blessure pouvait aussi se compliquer, car on ne pouvait pas toujours avoir le médecin, par suite des difficultés de communication. D'autres, peu au courant des méthodes de culture et des machines qu'il convenait d'utiliser, se donnèrent mille peines inutiles.
La nature avait aussi ses surprises. Attirés par ses jolies fleurs verdâtres ou ses petits fruits blanchâtres, bien des enfants dans la région du parkland admirèrent de près une plante des sous-bois, sans se douter que de terribles démangeaisons les attendaient; heureusement, les effets de «l'herbe à puce» ne sont pas bien graves. Plusieurs fermières de la même région, occupées à cueillir des saskatoons à l'orée du bois, s'affolèrent à la vue de «l'ours menaçant» qui s'avançait vers eux et retraitèrent en toute hâte vers la maison, suivies par un porc-épic à l'allure nonchalante.

Mais la prudence avait toujours sa place, comme l'apprit un jour Gérome Cloarec, de la région de Henribourg. Les Cloarec étaient d'origine bretonne et ils étaient venus au Canada en 1912, s'installant sur un homestead l'année suivante. Gérome avait construit une étable et, un jour, un petit animal à la fourrure noire décida d'y établir domicile, bien au chaud dans le foin accumulé sous la mangeoire. Comme les animaux refusaient, pour une raison inexplicable, de s'approcher de la mangeoire, Gérome Cloarec décida d'expulser le visiteur indésirable. Il prit un grand bâton et se mit à fourrager sous la mangeoire, jusqu'à ce qu'il aperçoive un bout de queue; il l'empoigna d'une main ferme et tira brusquement pour faire sortir l'animal de sa cachette. La réaction de la bête fut immédiate: elle arrosa l'infortuné pionnier d'un jet nauséabond qui lui piqua les yeux et lui donna la nausée. Cloarec fut forcé de lâcher prise et de prendre les jambes à son cou. Plus tard, il fallut enterrer ses vêtements tellement ils sentaient mauvais; même après plusieurs heures à tremper dans un baril d'eau tiède, l'odeur le suivait encore. Le Breton apprit une leçon salutaire: il faut se méfier des bêtes noires avec une bande blanche sur le dos. Mais comment aurait-il pu le savoir? Il n'y a pas de mouffettes ou «bêtes puantes» en Bretagne!

(adapté d'un fait mentionné dans Buckland's Heritage, Buckland History Book Committee, s.l., 1980, p. 81)





 
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