Des histoiresHirondelle de PonteixLe Patriote de l'Ouest a été le seul journal français distribué et lu dans tous les coins de la province. D'autres journaux ont vu le jour mais la population, même à Gravelbourg, n'était pas assez nombreuse pour les faire vivre. Les habitants de Ponteix avaient, eux aussi, songé à créer leur journal français après la faillite d'un journal anglais, mais ils optèrent en fin de compte pour une solution plus réaliste. Le Patriote de l'Ouest publierait dans chaque numéro une chronique sur Ponteix. Cette chronique, paraissant sous l'en-tête l'Hirondelle, offrait à chaque semaine des notes religieuses, des nouvelles de la région et quelques potins en plus:
«16 janvier 1918 – La première séance du conseil de la Municipalité rurale d'Auvergne avait lieu le 7 à Anéroid. Nous profitons de l'occasion pour féliciter deux nouveaux conseillers canadiens français, Messrs Arthur Thibault et Ulric Provencher. «23 janvier 1918 – Accident – Deux chevaux, entrés dans un shack, en ont enfoncé le plancher et sont tombés dans une cave. C'est une perte considérable dont nous plaignons le propriétaire, M. Raoul Desautels. «20 février 1918 – Concours – Quel est le plus vieux des animaux? «6 mars 1918 – Réponse – Le mouton, car il est lainé (l'aîné). «13 mars 1918 – Le 19 mars, il y aura une représentation théâtrale par une troupe d'amateurs, dames et messieurs; au programme, l'Âme Serbe, un drame patriotique en deux tableaux. «20 mars 1918 – Le Dr H.L. Bissonnette, médecin vétérinaire, est venu s'installer à Ponteix où sa famille ne tardera pas à le rejoindre. Nous lui souhaitons la bienvenue ainsi qu'une parfaite réussite. «27 mars 1918 – Les recettes de la soirée dramatique ont donné la somme de cent trente-deux piastres au profit du maître-autel. Grand merci à nos dévoués acteurs. «24 avril 1918 – Comme nous l'avions annoncé, il (l'hôpital) est ouvert depuis le 15 avril sous la direction de la Rde Soeur Marguerite, ayant pour assistante la Rde Soeur Marie de la Croix. Nous rappelons que cet hôpital est absolument général. Les malades y seront reçus sans distinction de croyance ou de nationalité et pourront y appeler les docteurs et chirurgiens de leur choix. «15 mai 1918 – G.E. Cassidi vient de vendre son magasin général à J.A. Potvin. C'est une nouvelle famille canadienne française qui rentre dans le village de Ponteix et qui sera certainement encouragée. Le magasin d'ailleurs est bien achalandé car M. Cassidi, loin d'être un fanatique, était un Anglais intelligent qui occupait toujours des employés de langue française. «29 mai 1918 – Croix Rouge – Un concert a été donné dans le soubassement de l'église au profit de la Croix Rouge par la branche de Ponteix, dont Mme Robert Forêt est la présidente. Les chanteurs et musiciens ordinaires de nos soirées de bienfaisance y ont fort intéressé le public. Les recettes se sont élevées à une centaine de piastres. «12 juin 1918 – Commencement d'incendie dans une jolie maison neuve de la rue Lannes, appartenant à M. Anderson et où les locataires se disposaient à entrer. Le feu est parti d'un poêle à pétrole dont se servait le peintre pour chauffer l'huile. En quelques minutes, le tocsin, la foule, les pompes, les extincteurs, tout était terminé! Des plâtres noircis, une porte et quelques planches brûlées; en somme peu de dégâts. «19 juin 1918 – Nos soldats – Chaque jour, le train nous emmène un groupe de nos bons jeunes gens appelés par la conscription. Ils s'en vont courageux mais laissant dans la paroisse et dans leurs familles de profonds regrets, avec beaucoup d'inquiétudes pour l'agriculture. «26 juin 1918 – Sépulture – La mort vient encore de frapper dans la paroisse un de ses coups les plus douloureux. C'est une autre jeune femme, Mme Jacob, âgée de 21 ans, que les amis de la famille conduisaient au cimetière paroissial. Elle laisse trois petits enfants, dont le baptême précité est celui de la plus jeune, l'aîné ayant seulement lui-même deux ans et demi. «10 juillet 1918 – Nouveau magasin – M. Pantaléon Potvin, de Gravelbourg, est venu ouvrir à Ponteix un magasin de bijouterie et d'horlogerie. Il a déjà beaucoup de travail. «21 août 1918 – Armes à feu – On ne saurait prendre trop de précautions avec les armes à feu: on ne devrait surtout jamais les laisser entre les mains des enfants. L'accident arrivé le 6 à M. Hormidas Béland en est une preuve. Heureusement pour lui, le Dr Lupien, appelé en toute hâte, a pu extraire aussitôt la balle de carabine 22 qu'il s'était par accident logé dans une jambe. Nous ne pouvons passer la nouvelle sous silence, comme exemple à la jeunesse. «18 septembre 1918 – Municipalité rurale d'Auvergne n° 76; avis aux fermiers concernant les semences pour 1919 – Les fermiers et tous ceux qui ont besoin de semences pour la récolte de 1919 sont prévenus par les présentes de ne pas vendre le grain qui leur est nécessaire à cette fin, mais de garder sans faute la quantité requise. Il n'est pas du tout certain que l'on puisse se procurer d'autre grain convenable pour la semence. «25 septembre 1918 – Différence énorme de récolte sur les terres. M. J. Loiselle nous certifie que chez lui cela vient du semoir. D'autres prétendent que cela vient de l'époque et de la sorte de labour. W. Langario nous donne une autre raison. Il a travaillé de la même façon et semé en même temps sa demi-section. Or sur un quart il n'a que 8 minots à l'acre, tandis que sur l'autre il en a 30; mais voici: le quart de 8 est de la terre très forte et celui de 30 du terrain plus léger. En tous cas, on constate qu'il vaut mieux semer moins grand et bien préparer son terrain au bon moment. 2 octobre 1918 – Avis – Vu les offres pressantes qui lui ont été faites, Pierre Cornet prévient ces demoiselles qu'il ne prendra en considération aucune demande en mariage si elle n'est pas appuyée d'une dot de 15 000 dollars, cash et sans belle-mère. «16 octobre 1918 – Vicaire – Nous apprenons avec plaisir que notre nouveau vicaire sera M. l'abbé J. Boisvin de l'Archevêché de Régina. L'Hirondelle veut profiter de l'occasion pour remercier Sa Grandeur de la nouvelle marque d'estime qu'Elle donne à la paroisse en s'arrachant ainsi un bras pour elle. Quant à M. l'abbé Boisvin elle lui souhaite une respectueuse et cordiale bienvenue. «23 octobre 1918 – Mlle Béliveau, du couvent de Gravelbourg, est arrivée ici avec la grippe espagnole: elle a été immédiatement conduite à l'hôpital. Plusieurs cas de cette influenza sont signalés dans le pays, mais sans gravité. Plus de peur que de mal jusqu'ici. Nous souhaitons à tous de s'en tirer au plus tôt. «30 octobre 1918 – Triste – Depuis sa fondation, la paroisse n'avait certainement pas vu de semaine plus triste que celle de cette chronique. La terrible grippe s'est répandue chez nous avec une rapidité foudroyante, frappant à gauche, à droite, à la ville comme à la campagne, jetant, implacablement, des familles entières dans le lit: père, mère, 7 ou 8 enfants sans personne pour les soigner... À la ferme voisine? On est dans le même cas. Et au village...? Tout est fermé, l'hôpital plus que plein, toutes les maisons en sont devenues des annexes. Il y a 150 cas déclarés dans la paroisse, dont plusieurs très graves. «4 décembre 1918 – Grippe – On nous signale, malheureusement trop tard, un excellent et prompt remède, paraît-il, contre cette maladie. Dès qu'on se sent la poitrine prise, y appliquer le soir un morceau de flanelle imbibé de pétrole et recouvert de laine. Au matin, les poumons sont dégagés. «11 décembre 1918 – Mlle Bernadette Bédard, ayant providentiellement échappé à un grave accident d'auto, a bien voulu se charger d'une souscription pour l'achat d'un St Christophe. «18 décembre 1918 – Gergovia – La route en est toujours bonne, même dans les buttes où toute la neige a disparu. M. le Curé s'y est rendu pour célébrer la messe du 7 décembre. «25 décembre 1918 – W. Beaudry est allé passer l'hiver en Californie et A. de Repentigny chez ses beaux-parents dans l'Est. «1er janvier 1919 – Bien des étrangers dans Ponteix pour la messe de minuit: des Anglais des villages voisins et de la campagne, et un bon nombre de nos amis de Frenchville.» L'Hirondelle cessa de paraître quelques semaines après le décès du fondateur de Notre-Dame d'Auvergne, M. l'abbé Albert Royer, en septembre 1922, car c'était bel et bien lui qui trempait chaque semaine sa plume dans l'encrier pour parler des événements, grands et petits, survenus dans sa paroisse. (tiré du Patriote de l'Ouest, 9 janvier 1918 au 1er janvier 1919) |
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