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Société de la Saskatchewan
Société historique de la Saskatchewan

Revue historique: volume 2 numéro 2

Henriette Baudais, née Ménard

autobiographie
par Henriette Baudais
Vol. 2 - no 2, janvier 1991
Henriette Baudais, née Ménard, parle des difficultés qu'ont connues ses parents et grands-parents à la suite de leur arrivée dans l'Ouest canadien, à St-Brieux, au début du siècle. Puis elle parle de sa vie à Domrémy avec son mari, Gustave Baudais.


Mon père, Jules Ménard, épouse Marguerite Pérault à St-Brieux en 1919. Je suis fille unique de leur union. Mon grand-père paternel, Alexis Ménard, est décédé en 1924.

Mes grands-parents paternels, Alexis et Marie Ménard de Martigué-Fer-Chaud, Ile et Vilaine, Bretagne, France, louaient une jolie ferme, mais en entendant parler des homesteads en Saskatchewan, ils
Étienne et Jeanne Pérault
Étienne et Jeanne Pérault devant la maison de leur homestead à St-Brieux. Vers 1926.
Photo: Henriette Baudais

ont décidé en 1906 de venir tenter leur chance au Canada avec leurs enfants, deux fils, Alexis et Jules et une fille, Marie.

En arrivant dans l'Ouest canadien, ils ont acheté une ferme à Spalding, Saskatchewan, au sud-est de St-Brieux. Mais six mois plus tard, ils sont venus s'installer au nord de St-Brieux où il y avait déjà une paroisse et un groupe de Français. Leur homestead se trouvait à six milles au nord de l'église et du lac Lenore.(1) Lorsque leurs garçons, Alexis et Jules, ont atteint l'âge requis (18 ans), ils se sont également approprié des homesteads près de leur père.(2)

La vie était difficile pour ces premiers colons français. Le médecin le plus près était à Melfort, une distance de 26 milles. Les maisons de logs n'étaient pas chaudes et les vêtements apportés de la France n'étaient pas suffisants pour les hivers d'ici. Tout de même, ils ont réussi à défricher et à déboiser une bonne partie des trois homesteads, à la hache. Malheureusement, Alexis a succombé à une pneumonie et il est mort en 1909. Grand-mère Ménard l'a suivi quelques années plus tard; elle s'est envolée vers le ciel en 1916. La fille d'Alexis et Marie Ménard, Rosalie, épouse Albert Gallays en 1916. Ils ont eu un garçon, Arsène.

Mes grands-parents maternels, Étienne et Jeanne Pérault, sont arrivés de Bussière-Poitevine, Haute-Vienne, France en 1910. Ils sont arrêtés travailler à Montréal pour un an avant de se rendre dans l'Ouest en 1911. Étienne et Jeanne Pérault avaient trois enfants : Eugène, Marguerite et Marie.

Ils se sont installés à six milles au sud de St-Brieux. À leur arrivée, ils se sont construit un shack (maison en logs couvert de tourbe). De peine et de misère, ils ont déboisé leur carreau. Lorsque Eugène a atteint l'âge requis, il s'est approprié un homestead lui aussi, ce qui encourage un peu la famille Pérault.(3)
Photo de mariage de Jules Ménard et de Marguerite Pérault
Photo de mariage de Jules Ménard et de Marguerite Pérault, le 1er mars 1919.
Photo: Henriette Baudais

À cette époque, il n'y avait pas encore d'école, ni de chemin de fer à St-Brieux. Le courrier de France était très lent à venir. Ma grand-mère s'est beaucoup ennuyée de ses soeurs demeurées en France.

Lorsque la guerre de 1914-18 éclate en Europe, Eugène est recruté par l'armée canadienne. Son père, Étienne, afin de ne pas s'aliéner son pays natal, s'est inscrit dans l'armée française. Pour deux ans, ma mère, âgée de 16 ans, s'est occupée de faire les semences et les moissons avec l'aide d'un bon voisin.

Après la guerre, il y a eu quelques bonnes années. La famille Pérault a acheté quelques machines agricoles ainsi que d'autres terrains. La vie devient un peu moins difficile. Grand-mère Pérault meurt en 1927, Marie en 1941 et grand-père Étienne en 1958. Eugène épouse Anne-Marie Leve en 1927 et ils ont cinq enfants, dont trois demeurent encore à St-Brieux.

Avec le temps et le travail ardu, mes parents, Jules Ménard et Marguerite Pérault, réussissent à faire leur vie sur les trois carreaux qu'Alexis père et fils et papa avaient pris comme homesteads en arrivant dans l'Ouest. À cette époque, l'ouvrage des champs se faisait avec des chevaux et des petits outils. Mon père, Jules Ménard, meurt en 1942.

J'ai eu une jeunesse heureuse et la vie assez facile. À l'âge de sept ans, on m'envoie au couvent de St-Brieux avec les Filles de la Providence, car nous demeurons trop loin de la petite école de campagne. Je demeure en pension pendant huit ans; j'ai de très bons souvenirs de ces années-là. On retourne chez nous le vendredi soir après la classe et on revient au couvent le lundi matin. Nous ne prenons pas nos cours au couvent puisque les religieuses enseignent les classes à l'école du village. Le couvent est tout neuf, construit en 1931-32, très joli et tout près de l'église qui a été bâtie en 1919.

Après ma 8e année, je demeure à la maison, car mon père est souvent souffrant. Après son décès en 1942, ma mère et moi déménageons au village de St-Brieux et je retourne à l'école pour un autre trois ans.

En 1944, je quitte St-Brieux. Je viens d'épouser Gustave Baudais de Domrémy et nous nous installons sur sa ferme à un mille à l'ouest du village. Nous avons eu deux garçons, Denis et Raymond. Denis et son épouse, Joan, demeurent à Calgary. Ils ont également deux garçons. Denis est ingénieur mécanique. Raymond a travaillé pendant dix ans pour la Banque de Montréal. Puis, avec son épouse, Colleen, il est revenu prendre la ferme paternel à Domrémy. Ils ont trois fils.

Après 33 ans sur la ferme, nous nous sommes retirés au village de Domrémy en 1976. Nous habitons dans la maison de la mère de Gustave, tout près de l'église. Comme j'adore travailler à l'extérieur, je m'amuse à jardiner légumes et fleurs. Nous avons une grande cour.

En plus du travail de la ferme, Gustave s'est toujours tenu occupé. Il a été commissaire d'école et conseiller municipal. Il a travaillé avec les scouts et les clubs 4-H. Il a aussi été impliqué dans le développement de la butte de ski Minitinas, les centres des aînés de Wakaw et de Domrémy et le parc régional de Wakaw.

Les années passent trop vite. Nous sommes impliqués dans le Club d'âge d'or de Domrémy. Notre club se rassemble une fois par semaine pour jouer aux cartes et on prend le temps de se visiter. On joue aux quilles en hiver, et durant la saison estivale Gustave joue au golf avec des amis. Nous avons un chalet au lac Wakaw où on passe quelques jours l'été. L'automne, Gustave fait un peu de chasse.

Nous aimons aussi voyager. En 1982, nous avons longé la côte du Pacifique jusqu'au Mexique (de Seattle à Tijuana). Nous avons visité Phoenix, la Californie, etc. En 1984, nous nous sommes
Mariage de Gustave Baudais et d'Henriette Ménard
Mariage de Gustave Baudais et d'Henriette Ménard, le 17 octobre 1944.
Photo: Henriette Baudais

promenés dans l'est du pays: le Québec et les Maritimes. Et en 1985, nous avons fait une tournée de six semaines en Europe dont trois semaines en France. J'ai visité la maison où mes grand-parents sont demeurés, où mon père est né. C'est une maison qui date de 1793. Elle est bâtie en pierre. J'ai été très impressionnée. En 1988, nous avons fait une croisière sur le paquebot “Emerald Seas” jusqu'aux îles des Bahamas. Quel merveilleux voyage! Depuis, nous avons passé des fins d'hiver sur l'île de Vancouver. Ceci est très agréable et rallonge un peu notre saison estivale.

Notes :

(1) L'abbé Paul Le Floc'h vient établir St-Brieux en 1904. C'est cette année-là qu'un groupe de Bretons traverse l'Atlantique sur le paquebot «Malou». La première église était à environ un demi-mille à l'ouest du village actuel de St-Brieux, sur les rives du lac Lenore. (Source: Historique de St-Brieux 1904-1979.)

(2) Alexis Ménard, père, s'inscrit sur le homestead SW-18-43-20-W2 le 8 octobre 1906 et il obtient les lettres patentes du bureau des Terres du Dominion le 7 décembre 1910. Alexis Ménard, fils, s'inscrit premièrement sur le homestead SE-18-43-20-W2 le 26 septembre 1906. Il abandonne ce terrain et s'inscrit sur le NW-7-43-20-W2 le 15 juin 1909. Quelques mois plus tard, il meurt d'une pneumonie et son père obtient les lettres patentes de son homestead le 31 mars 1915. Jules Ménard s'inscrit sur le homestead SW-7-43-2-W2 le 9 octobre 1908 et il obtient le titre de sa propriété le 10 octobre 1912.

(Source: Historique de St-Brieux 1904-1979.)

(3) Étienne Pérault s'inscrit sur le homestead NO-30-41-20-W2 le 11 septembre 1911. Il a été un des premiers pionniers de la région de St-Brieux à acheter une moissonneuse-batteuse en 1927.

(Source: Historique de Saint-Brieux 1904-1979.)









 
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