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Des mots

Galipotte

Un lecteur de la Parlure fransaskoise de Chase en Colombie-Britannique, monsieur Wilfrid Fortier, vient de me faire parvenir une longue liste de mots et d'expressions canadiennes-françaises. Selon lui, ces expressions étaient couramment utilisées dans la région de Debden au temps de sa jeunesse.

Monsieur Fortier est anciennement de Debden mais ses ancêtres étaient originaire de Ham-Nord, petite communauté dans le comté de Wolfe à l'est de Montréal. Les termes et les expressions qu'ils nous suggèrent viendraient-ils de cette région au Québec?

Une des expressions que nous suggère monsieur Fortier est «courir la galipotte – avoir des rapports sexuels en dehors du mariage.» L'expression est certainement courante en Saskatchewan. Chez nous, toutefois, cette expression n'allait pas aussi loin que la définition de monsieur Fortier. Courir la galipotte c'était de chercher à s'amuser, de vagabonder, de ne rien faire de productif avec sa vie.

La définition que nous donne Léandre Bergeron dans son Dictionnaire de la langue québécoise se rapproche de celle qu'on utilisait dans la région de Bellevue. «Galipote: n.f. Courir la galipote – Courailler. Fréquenter souvent des lieux d'amusement.»

D'autre part, Pierre DesRuisseaux dans son Livre des expressions québécoises offre une définition qui se rapproche de celle de monsieur Fortier. «Galipote: Courir la galipote. Vagabonder, courir les jupons. Se dit notamment de celui qui recherche à droite et à gauche de joyeuses et charmantes compagnies. En bearnais et en gascon, on dit galibaût(s) pour gouin-fre, goulu. Variante: Courir les chemins; courailler; sortir après neuf heures; courir la prétentaine, la galipette.»

Notez que dans l'épellation de Bergeron et de DesRuisseaux, galipote est écrit avec un «t», tandis que l'épellation de monsieur Fortier était avec deux «t». Par contre, DesRuisseaux écrit galipette avec deux «t».

Afin de m'éduquer un peu, j'ai cherché le mot gouinfre dans mes autres dictionnaires. Dans le Dictionnaire général de la langue française (1924), Hatzfeld et Darmesteter nous disent que gouin est utilisé dans le dialecte marin pour dire «un matelot qui se conduit mal.» En autre mot, un gouin c'est un coureur de jupon.

Il est possible que le terme galipote vient de l'ancien français galoberie qui voulait dire «la débauche.»

Enfin, pour tous les anciens auditeurs de CBK-Watrous, ils ont peut-être entendu l'expression pour la première fois en écoutant un Homme et son péché de Claude-Henri Grignon. David Rogers a relevé la citation suivante dans le roman de Grignon: «Père de huit enfants, c'était un paysan par atavisme, travaillant comme une bête, courant souvent la galipote et dépensant comme un fou....» Cette citation rapproche vraiment l'expression de la définition de monsieur Fortier, soit d'un homme qui a des rapports sexuels en dehors du mariage.

Dans son Dictionnaire de la langue québécoise rurale, David Rogers nous recommande de voir un autre terme qui se rapproche de galipote, soit le mot garouage «être en course, en promenade, courir la prétentaine; flânerie; vie de débauche.» La citation suivante est tirée du roman Marie-Didace: «La veille, il avait disparu du Chenal. Personne ne savait d'où il revenait. – As-tu fini tes garouages lui demanda Pierre-Côme d'une voix sévère.»

Bergeron n'accorde pas tout à fait la même définition à garouage. Selon lui, il s'agit «d'une personne en course, en visite chez des amis.»

L'expression a peut-être été emportée dans l'Ouest par les ancêtres de monsieur Fortier, ou, comme je l'ai mentionné, il est possible qu'on l'a entendu à la radio pendant les années 1940 et 1950. Ce ne serait pas la première expression que nous a donné Séraphin Poudrier.





 
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