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Des histoires

Fil de fer barbelé et téléphones

Le gouvernement provincial adopta en 1908 plusieurs mesures législatives collectivement connues sous le nom de Telephone Acts. L'une d'elles permettait à des groupes d'agriculteurs de former de petites compagnies et de les raccorder au réseau provincial du gouvernement. Mais deux voisins se trouvaient quelquefois sur deux lignes téléphoniques différentes et ils ne pouvaient communiquer sans faire un appel interurbain. On découvrit alors qu'il était possible d'utiliser les clôtures à fil de fer barbelé pour raccorder les téléphones de voisins plus ou moins proches et obtenir une communication claire et à peu de frais.
Ce type de système téléphonique survécut dans certains coins de la province jusqu'à la fin des années 1960 et même au-delà. André Barbarin, du district de Lacadia situé à l'ouest de Radville, explique comment fonctionnait le téléphone à fil de fer barbelé:

«En 1945, j'avais installé ma famille sur la ferme que je venais d'acheter de Horace Bourassa. On était raccordé au réseau rural de Radville tandis que mon voisin Paul Rivière, lui, était raccordé au réseau de Ceylon. On se disait qu'il devrait bien y avoir moyen de se parler sans avoir à toujours passer par le pupitre central! En ce temps-là, on n'employait pas de créosote pour préserver les poteaux de téléphone, avec le résultat qu'ils pourrissaient et tombaient; le téléphone du gouvernement ne marchait pas la moitié du temps. Alors, on a installé un téléphone à fil de fer barbelé en se servant d'un fil de notre pâturage et des pâturages des voisins; on avait besoin d'un seul fil parce qu'on raccordait l'autre fil à une tige de métal qu'on plantait dans la terre. Au début, Paul et moi, on utilisait l'appareil de téléphone du gouvernement; on avait ajouté des interrupteurs et une autre clochette électrique. Plus tard, comme on pouvait acheter des téléphones usagés, on en installa pour faire un système complètement à part.

«Puis, Amans Viguie a voulu se joindre à nous autres, et ensuite Alex Anderson quand il enseignait à Lacadia. Quelques années plus tard, il y avait entre 15 et 20 téléphones sur la ligne qui allait vers le sud jusque chez Freddie Becker et une autre ligne qui atteignait Gladmar, à tout près de 20 milles au sud. Les abonnés étaient Paul Rivière, André Barbarin, Amans Viguie, Alex Anderson, Frank Portmann, Étienne Bourassa, René Rivière, Gérard Delanoy, Joe Mazenc, Henry Mazenc, John Mazenc, Louis Carles, Lea Mazenc, Léo Dufresne, Frank Porte, Freddie Becker, Paul et André Vigoureux, Albert Viguie, Casemir Viguie, Louis Viguie, Adélard Dufresne et Maurice DeBruyne. Raymond Dufresne avait installé un vieux magnéto de tracteur pour faire sonner la clochette.

«Quand on a eu plus de dix abonnés, on s'est aperçu qu'il était préférable d'avoir deux groupes et c'est chez Louis Carles qu'on a installé le pupitre de contrôle. Au début, on avait tout simplement cloué les fils sur les poteaux de clôture avec des cavaliers. Quand il pleuvait ou que le temps était humide, la communication n'était pas très claire; plus tard, on a mis des isolateurs et on entendait toujours très bien. S'il y avait du verglas, les fils du gouvernement se cassaient mais nos fils de fer barbelé ne se cassaient jamais. Si un taureau s'échappait d'un pâturage et ne brisait pas complètement le fil, on lançait un appel général; tout le monde écoutait et on pouvait savoir où le taureau était rendu. Le taureau n'était pas près de recommencer!

«Ce système de téléphone a duré une vingtaine d'années jusqu'à ce que SaskTel installe des fils téléphoniques souterrains il y a trois ou quatre ans.»

(adapté de Builders of a Great Land, History Committee of R.M. of the Gap #39, Ceylon, 1980, p. 547)





 
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