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Des gens

Emma Morrier

Prince Albert: Mlle B.F. Gravel est partie, hier, pour Ottawa. Ses amies très nombreuses lui ont témoignée avant son départ les plus affectueuses marques de sympathie. Mme E. Morrier, sa soeur, est allée l'accompagner jusqu'à Winnipeg.
Le Patriote de l'Ouest
le 24 avril 1913
Emma Morrier n'est pas aussi connue en Saskatchewan que son mari, Joseph-Eldège, qui fut longtemps associé à l'Association catholique franco-canadienne de la Saskatchewan et à la Bonne Presse qui publiait le Patriote de l'Ouest. En effet, Mme Morrier va tailler sa propre réputation en Alberta une fois que le couple déménage à Edmonton.

J.-E. Morrier est né à Montréal le 19 août 1874. Il devient arpenteur et passera de longues années dans l'Ouest à faire du travail d'arpentage pour le ministère de l'Intérieur. Établi à Prince Albert, J.-E. Morrier est élu président de l'ACFC en 1914 pour un terme de deux ans. L'année suivante, il devient président de la compagnie la Bonne Presse. «Lorsque les dissensions menacent de faire éclater l'A.C.F.C. lors du congrès tumultueux de Prince Albert en 1923, il est encore une fois choisi comme président, car sa candidature est la seule qui soit acceptable par les différentes factions.»(1) Enfin, J.-E. Morrier devient le premier chef du secrétariat permanent de l'A.C.F.C. entre 1925 et 1928.

Entre 1928 et 1932, la famille Morrier s'installe à Montréal, puis ils reviennent dans l'Ouest, à Edmonton, en 1932, lorsque Joseph-Eldège accepte le poste d'administrateur du journal La Survivance. J.-E. Morrier est décédé à Edmonton le 12 avril 1940.

Si Mme Morrier n'est pas aussi active que son mari, elle s'implique tout de même dans la vie culturelle des francophones de Prince Albert. Son mari est président du cercle local de l'A.C.F.C., et elle s'implique dans des activités musicales et théâtrales. «Durant les premières années de la paroisse du Sacré-Coeur, qui était alors la seule paroisse catholique de Prince Albert, un groupe culturel très actif s'était formé sous la personnalité de Madame Morrier (née Gravel), une musicienne de renom et une femme exceptionnelle, à ce qu'on raconte. Elle était aussi une artiste. Un petit groupe élite s'était donc formé sous son patronage. Ce groupe comprenait plusieurs artistes tels le Docteur Montreuil, les DeLagorgendière, les Gravel, les Jutras, les Turgeon, Madame Carrier, les Casgrain, etc. On organisait à la salle de la cathédrale, des concerts, des tableaux, des pièces de théâtre, des séances de musique et le tout en français.»(2)

Emma Gravel est née à Ottawa en 1873. Durant sa jeunesse, elle étudie en Europe; la musique avec Mme Forbes-Brégnac et la peinture avec Louis Maréchal. De retour au Canada, elle poursuit ses études en peinture avec Arthur Arcand qu'elle épouse. Il meurt lorsqu'elle est encore jeune et elle épouse Joseph-Eldège Morrier. Le couple Morrier aura un fils, Rolland, qui travaillera brièvement comme animateur-sténo à CBK, Watrous au début des années 1940.

La carrière d'artiste d'Emma Morrier comprend la musique, la peinture, le théâtre et l'écriture. À Edmonton, elle enseigne la musique et prépare ses élèves pour le Conservatoire de musique de Toronto. Comme peintre, elle voit ses toiles exposées à l'École d'Arts et Métiers sur la rue Saint-Denis à Montréal en 1948.

Le théâtre et l'écriture allait devenir une seule vocation pour Emma Morrier durant la crise économique des années 1930. La famille Morrier est maintenant installée à Edmonton et Emma s'implique avec le Cercle dramatique Jeanne d'Arc. Fondée en 1913, cette troupe théâtrale allait présenter une cinquantaine de pièces entre 1913 et 1939. «Parmi les titres les plus connus on reconnaît La marraine de Charley, Le voyage de Monsieur Perrichon et Le Malade Imaginaire. Un des animateurs très dévoué du Cercle Jeanne d'Arc était monsieur Alphonse Hervieux. Celui-ci fut associé avec cette troupe dès le début en 1913 et c'est lui qui signe la mise en scène du premier texte original franco-albertain en 1935. Il s'agit de Bon sang ne ment pas de Mme Emma Morrier.»(3)

Emma Morrier commence à écrire du théâtre en 1935, comme elle le dit elle-même, «in order to put some French into the Alberta Regional Drama Festival.»(4) Non seulement la pièce Bon sang ne ment pas est bien reçue par les juges au Festival régional albertain, mais elle est choisie pour représenter l'Alberta au Dominion Drama Festival à Ottawa.

Le Herald de Calgary écrivait au sujet de la victoire de Mme Morrier au Festival regional de 1935: «The play, 'Bon Sang Ne Ment Pas' written in French by Mme Morrier of Edmonton was awarded the decision because of its well balanced cast.»(5) Le Journal d'Edmonton ajoutait: «This year's decision marks another development in the history of Alberta drama festivals, as the winning play is the first to be presented in French.»(6)

Bon sang ne ment pas ne remporte pas la palme au Dominion Drama Festival à Ottawa en 1935, mais la pièce d'Emma Morrier et sa production par le Cercle dramatique Jeanne d'Arc est une belle réalisation, surtout que les Franco-Albertains n'ont pas beaucoup de droits à cette époque. En tout, Mme Morrier écrit quatre pièces nationalistes pour défendre la cause des Canadiens français de l'Ouest. Elle écrivait: «La cause, c'est celle du français. En demeurant de vrais Canadiens français, on devient meilleurs Canadiens tout court et l'on peut aider davantage sa province.»(7)

(1) Lapointe, Richard, 100 NOMS, Regina: Société historique de la Saskatchewan, 1988, p. 288.
(2) Lavigne, Solange, Kaleidoscope, Many Cultures - One Faith, The Roman Catholic Diocese of Prince Albert, 1891-1991, Prince Albert: Diocèse de Prince Albert, 1990, p. 63.
(3) Gareau, Laurier, L'histoire du Théâtre français d'Edmonton, 1970-1984, Inédit, chez l'auteur.
(4) Gareau, Laurier, Emma Morrier, Quatre essais de théâtre national, Inédit, chez l'auteur.
(5) Ibid.
(6) Ibid.
(7) Ibid.

Sources

Gareau, Laurier, Emma Morrier, Quatre essais de théâtre national, Inédit, chez l'auteur.

Gareau, Laurier, L'histoire du Théâtre français d'Edmonton, 1970-1984, Inédit, chez l'auteur.

Lapointe, Richard, 100 NOMS, Regina: Société historique de la Saskatchewan, 1988.

Lavigne, Solange, Kaleidoscope, Many Cultures - One Faith, The Roman Catholic Diocese of Prince Albert, 1891-1991, Prince Albert: Diocèse de Prince Albert, 1990.





 
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