Revue historique: volume 3 numéro 4De la fanfare, au tennis, au MATLa petite histoire de la vie sociale au Collège Mathieu par Laurier Gareau Vol. 3 - no 4, mai 1993
Dès le début du Collège Mathieu, on avait établi un culte à Dollard des Ormeaux. Dans sa thèse de maîtrise, Lucille Tessier de Regina rappelle des souvenirs de ces fêtes. «On fête 'la Do/lard' avec éclat pendant plusieurs années. A l'occasion de ces fêtes, le Père Georges Boileau, o.m.i., visiteur des écoles françaises de la Saskatchewan et professeur au Collège Mathieu, compose des chants patriotiques qui racontent les gloires nationales et exhortent la jeunesse canadienne à suivre les pas de ce héros de la Nouvelle-France.» Toutefois, c'est avec sa fanfare que le Collège Mathieu établira premièrement sa réputation dans le domaine des arts. Dans le cahier souvenir du 25e anniversaire du Collège catholique de Gravelbourg on peut lire un article intitulé Notre fanfare. «Dès le début du Collège, on a compris l'influence formatrice de la musique, et c'est pourquoi on a toujours fait la place grande à son étude théorique et à ses réalisations pratiques... Et les fondateurs, soucieux de bien commencer, et sachant que la culture musicale est un élément essentiel de formation générale, encouragèrent l'étude de cet art. Toutefois, les pères réalisent que l'étude de la musique, dans une situation de salle de classe, ne saurait pas nécessairement inculquer chez les jeunes le goût de la musique. Ils optent alors de mettre sur pied une fanfare pour créer un intérêt chez les élèves. «Sous la vigoureuse impulsion de Monsieur l'abbé Louis Lussier, alors professeur au collège, le premier embryon débuta en 1921. » Le R. P. Aimé Lizée, o.m.i., recteur du Collège de 1941 à 1944, fait partie de la première fanfare en 1921. Lorsqu'il revient au Collège comme professeur quelques années plus tard, il devient chef de la fanfare. En 1930, le directeur de la fanfare, le R.P. Maurice Dussault, o.m.i., décide qu'ils devraient aller se mesurer avec les autres fanfares de la province. Le groupe brille cette année-là et dans les années nui suivent: «Sur dix participations aux concours, a fanfare remporta le trophée Classe 'B' dix fois; le trophée Classe 'Junior', huit fois, et le trophée 'Toddington', décerné à la fanfare qui obtient la plus haute note, indépendamment de la classe, trois fois. »(4) Yves de Margerie et Émile Belcourt (un des anciens qui poursuivra une carrière en musique), font partie du comité de la fanfare en 1943. Durant les années 1950, la fanfare du Collège Mathieu est sous la direction du R.P. Arthur Lacerte, o.m.i. Parmi les membres de la fanfare en 1954-1955, mentionnons André Nogue et Guy Tourigny (clarinettes), Dumont-Pierre Lepage et Jean Liboiron (cornets) Donald Sirois (saxophone) et Louis Marchand (alto'. Dix ans olus tard. en 1964-1965, la fanfare
est sous la direction du R.P. Alain Piché, o.m.i. et compte parmi ses membres Richard Marcotte (clarinette) et André Moquin (sousaphone). Toutefois, en 1964-1965, la fanfare a déjà été éclipsée par la chorale du Collège Mathieu sous la direction du R.P. Fernand Binette, o.m.i. et avec le R.P. Orner Desjardins, o.rn.i., au piano. Au début des années 1960, la chorale du Collège effectue plusieurs tournées en province, au Manitoba et en Ontario. Elle compte parmi .%e3 membres Henri Léost, André Moquin, Réai Forest, Paul Heppelle, Denis L'Heureux et Henri Lepage. C'est à cette époque qu'on fonde le groupe «Octopus» qui continuera, malgré plusieurs mutations, à donner des spectacles dans la région de Gravelbourg jusqu'à la fin des années 1980.
La chorale présente aussi des opérettes dans lesquelles les plus jeunes garçons sont appelés à jouer et à chanter les rôles féminins. L'art dramatique joue aussi un rôle important dans la vie sociale des collégiens d'antan. Avant l'aménagement du gymnase, une scène a été érigée dans la salle des jeux située au sous-sol du Collège. Là, on y présente des grandes comédies et tragédies françaises. La pièce, Les piastres rouges, est présentée en 1927 par un des premiers groupes d'élèves au Collège. Parmi la distribution de cette pièce à costumes, il y avait Arthur Moquin, Joseph Lafrance et Roland Pinsonneault de Gravelbourg.
A l'occasion des fêtes du 25e anniversaire du Collège en 1943, on avait préparé un concert dont la pièce de résistance était une comédie en trois actes de T. Botrei, Jean Kermor. Les rôles principaux étaient interprétés par Léo Gauvin (Jean Kermor), Fernand Ducharme (son père), Pierre Gravel (son grand-père), Arthur Nogue (Le Louz), Paul Crépeau (Carentin), Louis St-Arnaud (Gantran), Yves de Margerie (Cabassol), Robert Châtelain (Larfouiilat), Roland Piché (un étudiant), Joseph Kerbrat (Kerdu) et Ovila Millette (Coadic). Dix-huit autres collégiens interprétaient des rôles secondaires dans cette production. Comme dans le cas de l'opérette mentionnée plus tôt, il ne sera pas question d'avoir des filles dans des productions théâtrales du Collège Mathieu jusqu'au milieu des années 1960. Ce sont les gars qui assument eux-mêmes les rôles de femme. C'est le R.P. Laurent Gélinas, o.m.i., qui brise cette tradition en 1967 avec une production de la pièce Ten Little Indians d'Agatha Christie. Des filles du Collège Thévenet (le couvent Jésus-Marie) et de l'école secondaire de Gravelbourg sont invitées à incarner les rôles féminins dans cette production.
Le MAT En 1970, un ancien collégien, Donald Sirois, est embauché pour mettre sur pied un programme culturel au Collège Mathieu. L'institution ayant récemment abandonnée son cours technique, le bâtiment des Arts et Métiers, le pavillon StMaurice, est libre et c'est là que Donald Sirois établit le MAT. «Une de ses premières responsabilités était d'aménager la moitié de l'édifice des Arts et Métiers en un centre culture/pour le Collège. Ce centre comptait quatre petites salles et quatre 'enclos', comme ledit si bien M. Sirois. Ces enclos servaient parfois de bureaux, parfois d'entrepôts. »(5) Sous la direction de Donald Sirois, le MAT devient le centre artistique du Collège Mathieu et un des membres fondateurs de la Commission culturelle de la Saskatchewan en 1974. Mais d'où vient le nom du MAT? «Pourles curieux de l'étymologie qui cherche à savoir ce que veut dire le nom du 'MA T' en voici quelques définitions. Certains prétendent que les initiales M.A. T. sont pour Musique, Arts et Théâtre, ce qui rend justice à son occupation. Certains romantiques préfèrent croire que tout comme dans un navire, le Collège Mathieu a lui aussi son mât, un mât de la culture. Et en dernier lieu, plusieurs expliquent que le MA Testl'abréviation de Mathieu. »(6) Au cours des premières années du MAT, des chansonniers comme Julien Poulin, Solange Campagne, Philippe Fournier font leurs premiers essais sur scène. Dans le domaine du théâtre, Denis Blouin, Jennie Baudais et Benoit Morin sont parmi les vedettes. Lorsque Donald Sirois quitte en 1975 pour entreprendre une carrière de journaliste à Radio-Canada, il faut rebâtir l'orchestre du MAT car «le départ de la plupart de ses membres obligea l'orchestre à se raviver en s'adjoignant de nouveaux musiciens.»(7) Bien sûr, étant formé d'étudiants, il est tout à fait naturel que l'orchestre doive se raviver d'année en année. Doris Blouin remplace Donald Sirois et elle sera remplacée àsontour parChristianne Labossière. Cette période de transition est l'époque qui marque l'arrivée de la vague principale des enfants d'Émile et Marguerite Campagne. Vers 1979, Suzanne Campagne devient directrice du MAT et elle accueille au MAT, son frère Paul et ses soeurs Carmen et Annette. Mais, il y aura aussi d'autres jeunes artistes importants à cette époque au Collège Mathieu, comme Suzanne Pinel, Andrée Noonan et Nicole Lafrenière. Le théâtre connaît aussi beaucoup de succès. En 1978, Roland Stringer et Lise Rivard sont les vedettes d'une production de la pièce de Marcel Dubé, Zone. Bernard Chénier est le directeur de la troupe collégiale. C'est à la suite des succès de cette production et à la demande de ces mêmes jeunes comédiens du Collège Mathieu que l'Association jeunesse f ransaskoise organise un premier festival théâtral fransaskois en 1979. Le festival perdure jusqu'à nos jours. Et, bien sûr, durant les années 1970, chaque printemps est marqué par une tournée provinciale du MAT du Collège Mathieu. Ces tournées se poursuivent durant les années 1980, alors que plusieurs directeurs suivent Suzanne Campagne. De nouveaux jeunes artistes viennent se joindre au MAT, comme Michèle Campagne, Julie Beaubien, Joanne Sylvestre et Chantal Denis. Au début des années 1980, sous la direction de Charles. Tinman, le théâtre du Collège Mathieu fait parler de lui avec des pièces comme Le trône blanc, une création collective (1981) et Saisi de Barry Keefe (1982). En 1986, Gaetan Desrochers devient directeur du MAT et il change le genre et la composition du groupe.
Il crée un premier groupe rock et les tournées du MAT des I années 1970 (quinze à vingt membres) sont remplacées par des tournées avec un orchestre composé de sept à huit jeunes artistes. A la fin des années 1980, le Théâtre Sans Soudu début des années 1970 a fait place au Franskataires. Charles Dumont, Heather Simonot et Chantai Marcoux figurent dans plusieurs des pièces produites à cette époque, comme Le Chemin des droits (1987), «J'vais te blaster» avec amour, Ti-Frère (1988) et Un nerd comme moi (1989), trois pièces d'un ancien collégien, Laurier Gareau. Les succès du MAT et des Franskatai res se poursuivent durant les années 1990. Deux membres du MAT, Jane Pike et Michèle Cousin ont représenté la Saskatchewan au Gala Interprovincial de la chanson en 1991 et 1992 (catégorie interprète). Quant aux Franskataires, des productions comme Un Moose Jaw Vaudevillede Laurier Gareau (1990), Le secret de la rose de Robert Dumont et Jocelyn Forgues (1991) et Lady Macbeth et Sans titre une création collective (1992) se sont méritées des louanges à des festivals théâtraux en Saskatchewan, au Manitoba et en ColombieBritannique. Les sports Si la musique «est la parole la plus profonde de l'âme», le sport est «l'art par lequel l'homme se libère de soi-même. » (Giraudoux) Le Petit Robert. Au temps des pères oblats, toutes organisations pouvant rendre la vie collégiale plus agréable pour les étudiants avaient alors une raison d'être au Collège Mathieu. Les sports sont donc une partie aussi importante de la vie collégiale que les études, les services religieux et les beaux arts. Tout au long de son histoire, le Collège Mathieu a présenté d'excellentes formations sportives que ce soit au niveau du hockey, du football, du basketball, du volleyball et même du tennis.
Cependant, si les étudiants actuels bénéficient d'une belle piscine intérieure, pour les anciens, «aller se baigner» voulait dire un pique-nique à la rivière La Vieille, ou au lac Thompson ou encore sauter dans le dug-outderrière le Pavillon. Jusqu'en 1949, il n'y a même pas de gymnase au Collège Mathieu. Le docteur Rosario Morin, un collégien durant les années 1930, nous offre la description suivante du terrain de jeu d'antan: «Dans la cour, se trouvent une patinoire à ciel ouvert, un court de tennis, un terrain de balle au mur, des anneaux suspendus pour la gymnastique. Il y a aussi le terrain de «basebail» et de «soccer».(8)
Tous les collégiens doivent participer à des équipes intramuraux: hockey, football, balle-au-mur, tennis, etc. Même les pères oblats se joignent souvent aux «grands» sur ces équipes intra-muraux. Le docteur Morin raconte le fait suivant: «Le Père Lizée me surprend, toutefois. Au hockey, dans le feu de l'action, il devient agressif comme le plus immature de ses élèves et accepte mal les décisions de l'arbitre. Les Pères Oblats aspirent à la perfection, mais ils ont une nature humaine comme la nôtre. » Durant les années 1920, les R.P. Octave Paradis et Denys Jubinviile, o.m.i. sont directeurs de l'Association des Jeux. Parmi les membres de l'Association en 1926, 1927 et 1928, on reconnaît les noms de Paul Piché, Pierre Laf rance et Irenée Tourigny. Dans l'annuaire de 1928-1929, on peut lire: «L'hiver est fini depuis quelque temps et avec lui les fameuses joutes de gouret, au cours desquelles le Collège battait régulièrement ceux qui avaient l'imprudence de venir lui faire un défi. Avec le printemps commencent les parties de balle au camp. Le 2 mai, nos joueurs vont à Mossbank, ce qui se renouvellera quelquefois encore pendant l'été et prouvera que dans ce jeu-là également nos élèves jouent brillamment. »(10) Le tennis, le football et le ballon panier (basketball) sont aussi des sports pratiqués au Collège Mathieu durant les années 1920, 1930 et 1940. En 1948, le Collège Mathieu fait l'acquisition de trois huttes militaires de Mossbank. Deux sont transformées en dortoirs, mais la troisième hutte devient une salle de billard et de musique. L'année suivante. un autre bâtiment est ajouté au campus du Collège Mathieu. «Enfin en 1949 un hangar de l'aviation fut transporté au collège et converti en un gymnase des plus modernes, de 112 pieds par 132.»(11)
En 1950-1951, l'Association athlétique est sous la direction du R.P. Louis Aubin, o.m.i. Florido Turgeon, Fernand Binette, Albert Fournier et Arthur Carrière sont membres de l'Association. L'addition d'un gymnase permet de développer d'excellentes équipes de basketball et de volleyball. Au début des années 1960, l'équipe Alouettes du Collège Mathieu remporte plusieurs championnats provinciaux en basketball avec des joueurs comme André Moquin, Réai Forest, Wayne Savard, Claude Léost, etc. Le hockey continue de connaître beaucoup de succès. Il y a maintenant trois patinoires extérieur derrière le gymnase et les trois sont très occupées. L'intérêt est tellement élevé durant les années 1960 que le R.F. Raymond Deschênes, TiFrère, o.m.i. se constitue 'coach' pour une deuxième équipe Bantam. Les équipes Bantam, Midget, Juvénile et Sénior disputent des matchs à Hodgeville, Kincaid, Ponteix, Assiniboia, Laflèche, etc. A cette époque, chaque petit village dans la région a son ou ses équipes de hockey. Les matchs du Collège avec les villages environnants sont joués à la vieille Palestre, là où est maintenant situé le Centre culturel Maillard. Les R.P. Omer Desjardins et Denis Bédard, o.m.i., seront directeurs des sports et Léonard Chicoine, Roland Smith et Rolland Blanchette font partie de l'Association athlétique. A cette époque, alors qu'il y a environ 200 élèves au Collège, les gars se font souvent appeler 'Buffalos' par les gars de la ville. En 1969, les collégiens décident de tourner la carte sur leurs rivaux; ce printemps-là, le tournoi annuel de basketball au Collège Mathieu prend le nom de 'Buff Days '69' et l'équipe abandonne le nom 'Alouettes' en faveur de celui de 'Buffs'. Ce n'est qu'au début des années 1980 que le Collège Mathieu reprendra le nom 'Alouettes' pour ses formations sportives. L'arrivée des filles au début des années 1970 ne diminue nullement l'intérêt pour les sports. Au cours des dernières années, il y a eu d'excellentes équipes de volleyball féminines. Toutefois, la dépopulation rurale veut dire qu'il y a de moins en moins d'équipes dans la région et les équipes collégiales doivent parcourir de plus grandes distances pour trouver une opposition. Dans bien des cas, le Collège Mathieu et la ville de Gravelbourg doivent s'unir pour former une seule équipe de hockey bantam ou midget. Ronald Blouin, Jules Michaud, Louis Morin, François Dubé et Richard Chabot sont parmi les nombreux laïcs qui se sont occupés de l'Association athlétique depuis la fin des années 1960. Petit à petit, d'autres sports sont devenus populaires au Collège Mathieu, comme le badminton, l'haltérophilie et bien sûr, la natation. Tout au long de son histoire, le Collège Mathieu a permis à des milliers de garçons et de filles de s'épanouir par la pratique des arts et des sports. Qu'il s'agisse de la fanfare, du théâtre et de la chorale ou du hockey, du basketball et du tennis, les collégiens ont pu se faire valoir en dehors de la salle de classe durant leur séjour au Collège Mathieu.
(1) Tessier, Lucille, «La vie culturelle dans deux localités - d'expression française du diocèse de Gravelbourg (WillowBunch et Gravelbourg) 1905-1930», Perspectives sur la Saskatchewan française, Regina: Société historique de la Saskatchewan, 1983. p. 237. (2) Programme souvenir, 25e 1918-1943, «Notre fanfare», Gravelbourg: Le Collège Catholique de Gravelbourg, Sask., 1943. (3) Ibid. (4) Ibid. (5) Forgues, Jocelyn, «Le Centre culturel Le MAT du Collège Mathieu», La Culture, Avril 1990. p. 3. (6) Ibid. p. 3. (7) Eau Vive, «Gravelbourg», le 28 avril 1976. p. 6. (8) Morin, Rosario, Les mémoires d'un assimilé, Manuscrit. (9) Ibid. (10) Annuaire du Collège Mathieu, Onzième année, 1928-1929, p. 38. (11) Annuaire du Collège Mathieu, Trente-troisième année, 1950-1951,p. 10. |
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