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Charles Maillard

La cathédrale de Gravelbourg est aujourd?hui un lieu historique principalement à cause des nombreuses toiles qui recouvrent ses murs. Ces peintures sont les oeuvres de l'abbé Charles Maillard.
Charles Maillard est né le 11 mars 1873 à Montreuil-sur-Mer (Pas de Calais) en France. Son père était propriétaire et éditeur d'un petit journal. Son fils est journaliste au journal avant d'entreprendre ses études pour la prêtrise. Tout en poursuivant ses études pour le sacerdoce, le jeune Maillard a l'occasion d'étudier la peinture avec un des plus grands peintres de la France à cette époque, De Retz de Lille.

Après sa première année de théologie, il décide de venir au Canada. Il travaille pendant deux ans comme assistant secrétaire de Mgr Langevin, archevêque de Saint-Boniface et ensuite se dirige vers le Grand Séminaire d'Ottawa pour terminer ses études en théologie. Charles Maillard est ordonné prêtre le 19 mai 1901 à Saint-Norbert, Manitoba. Il est d'abord vicaire de la paroisse de Saint-Norbert pendant un an avant d'être nommé curé de la paroisse Saint-Lazare. Quatre ans après son ordination, il arrive enfin en Saskatchewan comme curé de la paroisse de Wolseley. Il y passe 12 ans.

C'est probablement pendant son séjour auprès de Mgr Langevin que Charles Maillard avait commencé à s'intéresser à la question de la langue et de la foi. Rendu en Saskatchewan, cette question continue à le préoccuper et, en 1912, il devient un des fondateurs d'une association du Bon Parler Français, le précurseur de l'Association catholique franco-canadienne de la Saskatchewan. Il fait même partie du premier comité permanent de l'ACFC en 1912 avec Maurice Quennelle (président) et le R.P. Henri Delmas et il est un des quatorze délégués de la province qui participe au Congrès du Parler Français à Québec en juin de la même année.

C'est durant son séjour à Wolseley que le jeune prêtre commence à peindre des toiles sur les murs des églises. Le Patriote de l'Ouest du 7 septembre 1916 nous révèle que Charles Maillard a fait une série de toiles murales pour l'église de Willow Bunch.

«Dans l'église de Willow Bunch, où se sont tenues plusieurs séances du dernier congrès franco-canadien, tous ont admiré l'harmonieux coup d'oeil que présentent le sanctuaire et les murs de transept. C'est que Willow Bunch s'est acquis le privilège très rare encore en Saskatchewan d'avoir une église décorée de toiles murales. Cette transformation magnifique est l'oeuvre de M. l'abbé Maillard, curé de Wolseley, dont le pinceau habile sait reproduire avec succès les chefs-d'oeuvre les plus difficiles des grands maîtres.»(1)

Une des toiles préparées par l'abbé Maillard pour le sanctuaire de l'église de Willow Bunch mesurait 18 pieds par 14 et représentait Jésus Christ sur la croix. Le Christ était accompagné de deux anges adorateurs de grandeur nature.

L'église de Willow Bunch a été remplacée par une nouvelle en 1959 et les toiles peintes par l'abbé Maillard sont disparues. Personne ne semble savoir où elles sont. L'artiste peintre a probablement aussi fait des toiles pour son église à Wolseley.

En 1917, Mgr Mathieu, archevêque de Regina demande à l'abbé Maillard d'accepter la direction de la paroisse Sainte-Philomène de Gravelbourg. Une bataille au sujet de l'emplacement d'une nouvelle église semble être à la veille d'éclater dans le village fondé une dizaine d'années auparavant par l'abbé Louis-Pierre Gravel. Le curé résident, l'abbé Arthur Magnan, n'est pas l'homme pour régler le conflit. Charles Maillard arrive à Gravelbourg en octobre 1917.

Pendant quelques années, il devra ranger ses pinceaux pour voir à la construction non seulement d'une église de campagne, mais bel et bien d'une future cathédrale.

En 1917, l'abbé Charles Maillard est nommé curé de la paroisse Sainte-Philomène de Gravelbourg. Quand il arrive dans sa nouvelle paroisse, il découvre un peuple en pleine chicane au sujet de l'emplacement de la nouvelle église. On avait construit un soubassement à l'est de la rue principale, là où se trouve aujourd'hui le Collège Mathieu. Certains paroissiens voulaient que l'église soit construite au dessus de ce soubassement. D'autres, par contre, voulaient que l'église soit rapprochée du futur couvent des Soeurs de Jésus-Marie.

Le nouveau curé tente de régler le conflit. «Juste avant Noël, le curé Maillard convoqua une grande assemblée où il parla à ses gens avec tout son coeur et toute son âme. Il proposa lui-même de donner tout simplement le soubassement à l'Évêque, qui s'en servirait pour les fondations du Collège et de bâtir une grande et belle église à l'extrémité de la rue principale de la ville. Sa proposition a été accepté à l'unanimité.»(2)

L'église dominerait ainsi la rue principale, tandis qu'à sa gauche, il y aurait le couvent des Soeurs de Jésus-Marie et à la droite, il y aurait un collège catholique. L'abbé Maillard réussit probablement à amadouer les esprits en leur disant: «Et puis, sait-on jamais' Avec le temps et l'augmentation de la population, Rome pourrait bien décider de former un nouveau diocèse et alors, Gravelbourg, avec une magnifique église, un beau collège, un couvent imposant...»(3)

Les gens de Gravelbourg se laissent emporter par le rêve de l'abbé Charles Maillard. L'architecte J.-E. Fortin vient de l'Est pour dresser les plans de la nouvelle église. Les travaux commencent en juin 1918 et il faut seize mois pour compléter la construction. L'église mesure 55 mètres de longueur sur 18 de largeur. À l'endroit qui donne à l'église la forme symbolique d'une croix, le transept, la largeur est de 28 mètres. Le toit de l'église est de 17 mètres de hauteur et le sommet des deux tours s'élève à 32 mètres.

Dans la communauté de Gravelbourg, l'année 1918 est une année prospère pour l'industrie de la construction, car en même temps que des charpentiers et des maçons travaillent à la nouvelle église, d'autres sont occupés à bâtir le Collège Mathieu et le Couvent Jésus-Marie.

La nouvelle église est ouverte et bénie par Mgr Mathieu le 5 novembre 1919. L'intérieur de l'église n'offre alors rien d'extraordinaire. Rien ne laisse présager qu'un jour ce bâtiment deviendrait un monument historique. Depuis l'ouverture de son église, l'abbé Maillard s'est occupé à préparer des dessins résumant l'histoire de l'enseignement catholique.

En 1921, il ressort ses pinceaux et se met à l'oeuvre. Il installe son atelier dans la sacristie et il travaille sur ses peintures à temps perdu. Il consacre presque dix ans à cette oeuvre et les résultats sont fort impressionnants:

«L'effet d'ensemble ne manque pas d'impressionner. Tout autour du sanctuaire, sept grands tableaux traitent de questions de dogme: la présentation de Jésus par le précurseur Jean-Baptiste, la promesse d'un Rédempteur faite à Adam et Eve au Paradis terrestre, la transfiguration du Christ, le Christ en croix, sa résurrection, le couronnement de la Sainte Vierge et la révélation à Pierre de sa mission de vicaire du Christ. Surplombant les tableaux, les choeurs des anges, en couleurs douces, s'animent sur les panneaux de la voûte.»(4)

L'abbé Maillard quitte Gravelbourg en 1935 pour un repos prolongé. Il revient en 1937, mais il doit quitter à nouveau l'été suivant. Il est décédé à Montréal le 14 février 1939.

En 1930, un rêve qu'il avait semé lors de son arrivée en 1917, celui de voir cette ville devenir le siège d'un nouveau diocèse, se réalise. Mgr Rodrigue Villeneuve devient le premier évêque à Gravelbourg et l'humble église construite en 1918 devient la cathédrale du nouveau diocèse.

(1) «Un prêtre-artiste en Saskatchewan - M. l'abbé Maillard», Le Patriote de l'Ouest, le 7 septembre 1916.
(2) Gravelbourg Historical Society, Héritage: Gravelbourg - District, 1906-1985, Gravelbourg: Gravelbourg Historical Society, 1987, p. 53.
(3) Lapointe, Richard, «Cathédrale des blés», La Saskatchewan de A à Z , Regina: Société historique de la Saskatchewan, 1987, p. 43.
(4) Ibid., p. 44.


Sources

«Un prêtre-artiste en Saskatchewan - M. l'abbé Maillard», Le Patriote de l'Ouest, le 7 septembre 1916.

Chabot, abbé Adrien, Histoire du Diocèse de Gravelbourg, 1930-1980, Gravelbourg: Diocèse de Gravelbourg, 1981.

Gravelbourg Historical Society, Heritage, Gravelbourg ' District, 1906-1985, Gravelbourg, Gravelbourg Historical Society, 1987.

Lapointe, Richard, «Cathédrale des blés», La Saskatchewan de A à Z , Regina: Société historique de la Saskatchewan, 1987.





 
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