Des motsCallerÉtant passionné par l'histoire, j'achève présentement un document pour la Société historique de la Saskatchewan. Ce manuscrit raconte l'histoire de la radio française en Saskatchewan. Les pionniers de la radio française dans l'Ouest ont accepté le défi d'établir des postes privés parce que les stations existantes appartenaient à des personnes d'une langue étrangère: l'anglais. Puisque cette radio anglaise menaçait d'assimiler les Canadiens français, il devenait important d'établir des postes qui transmettraient les valeurs françaises et catholiques. Le docteur Rosario Morin fut un des pionniers de la radio française en Saskatchewan et aujourd'hui il est un des plus fidèles collaborateurs de la Parlure fransaskoise. Dans sa plus récente lettre, le docteur Morin suggère qu'on explore un peu certains termes qui nous viennent de nos voisins américains, c'est-à-dire des anglicismes américains communément employés dans nos foyers fransaskois. La plupart de ces termes sont entrés dans le vocabulaire de nos ancêtres par le truchement de cette radio anglaise. En Saskatchewan, nos troupes de danses folkloriques se préparent pour une nouvelle saison de répétitions et de spectacles. Le docteur Morin propose le terme caller et calleur. Les amateurs de la danse carrée sont familiers avec ces deux mots. Le calleur est celui qui dirigeait les mouvements des danseurs. Il callait un quadrille. Le verbe caller nous vient de l'anglais «to call» et en Saskatchewan on a tendance à l'écrire à la façon anglaise. Dans son Dictionnaire de la langue québécoise, Léandre Bergeron a francisé l'épellation de ces termes. On peut lire: «câler verbe transitif – annoncer les figures d'une danse carrée. Exemple: Câler un set.» Bergeron nous suggère aussi le câleur et le câleux, c'est-à-dire celui qui câle une danse. Un set est une série de danses. Toutefois, comme nous le rappelle Léandre Bergeron, dans l'Ouest canadien on a aussi l'habitude d'utiliser le terme câler dans le sens de faire un appel, comme «je vais câler un taxi». Maintenant, il ne faut pas confondre le mot câler avec caler, c'est-à-dire enfoncer, comme «caler dans la boue». L'utilisation de ce terme est intéressante puisque nous l'employons généralement dans le sens de s'enfoncer alors que dans l'ancien français le mot caler voulait dire «tenir en l'air». L'abbé Étienne Blanchard nous rappelle aussi dans son Dictionnaire du bon langage, un autre sens au mot caler: «se caler: filer un mauvais coton, se mettre dans de beaux draps, se perdre de réputation, perdre sa fortune, se ruiner, s'en aller à la bésace.» Dans le Dictionnaire de la langue québécoise rurale, David Rogers relève un exemple dans la littérature québécoise du mot câler: «Caller (câler) annoncer, crier les figures d'une danse. Janvier Nadon, toujours boîtant, a donné sa place à un jeune pour caller et arrête Maxime Groleau dans la porte mitoyenne en disant: – Hé, le vieux, j'ai une histoire pour vous.» «La Terre du huitième», pages 153-154. Enfin, toujours pour rester dans le domaine des arts, le docteur Morin ajoute: «J'ai appris le terme backup que l'on emploi d'un groupe de deux ou plus qui harmonisent pendant que l'artiste principal chante. Le terme backup a certainement une traduction française. Bien que Radio-Canada emploi souvent des termes anglais comme weekend quand fin de semaine conviendrait aussi bien, il pourrait te donner la traduction. Nous apprenons que le groupe Hart Rouge, originaire de Willow Bunch va être le backup de Claude Léveillée sur son nouveau disque.» Puisque le docteur Morin a sans doute entendu le terme backup sur les ondes de Radio-Canada, nous invitons des employés de cette boîte à nous soumettre le bon terme français. Vous voyez, le docteur Morin, ayant été longtemps président de Radio-Gravelbourg, se souvient que la mission première des postes privés de la Saskatchewan était «de faire vibrer le verbe français» et non pas des anglicismes. |
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