Des motsCabocheIl n'avait pas écrit depuis un certain temps, et puisque ses lettres sont toujours des plus agréables, j'étais content de recevoir une missive de notre ami, le docteur Rosario Morin. Même s'il habite depuis plusieurs années le Québec, il garde toujours un bon souvenir de l'Ouest. Dans cette plus récente lettre, il nous rappelle la visite chez le barbier: «Dans l'Ouest, on se faisait faire les cheveux – couper les cheveux. Si on se faisait enelever les couettes les plus longues, c'était un trim – on se faisait trimmer les cheveux. On employait caboche pour une tête, surtout une grosse tête. Un cabochon, c'était un têtu, un obstiné. Quand on insistait pour que quelqu'un chante, on appelait cela le tourmenter. Mon père disait que ce n'était pas poli de tourmenter quelqu'un qui ne voulait pas chanter. On semble employer de moins en moins déclamation ou déclamer comme autrefois. On dit plutôt l'élève a récité un poème ou a prit part à un concours oratoire.» Revenons sur certains des termes soulevés par le docteur Morin. Tout d'abord, il dit qu'autrefois dans l'Ouest on disait aller pour un trim ou pour se faire trimmer les cheveux. Admettons au docteur Morin que les deux sont encore utilisés en Saskatchewan par les Fransaskois. D'autre part, on peut aussi dire que ce n'est pas juste dans l'Ouest que trim et trimmer ont été utilisés couramment par la population de langue française. Les deux termes étaient communs au Québec du 19e siècle. L'abbé Étienne Blanchard, dans son Dictionnaire du bon langage, exhortait ses compatriotes du Québec à rayer ces mots de leur vocabulaire et de les remplacer par orner, décorer ou encore rafraîchir une chevelure ou une barbe. Même si les trois suggestions de l'abbé Blanchard ajoute une certaine couleur au langage, les expressions trim et trimmer ont persisté dans le langage. Le docteur Morin nous propose ensuite les mots caboche et cabochon. Toujours dans l'oeuvre de l'abbé Blanchard, on trouve caboche que le curé recommende qu'on remplace par tête. Les chercheurs Hatzfeld, Darmesteter et Thomas, dans leur Dictionnaire général de la langue française, nous rappelle l'origine du mot: «Caboche: s.f. (Etymologique – dérivé du latin caput – tête. La forme caboche est d'origine picarde.) Familiale – Tête. Vous avez la caboche un peu dure (pour comprendre).» Bélisle, dans son Dictionnaire nord-américain de la langue française, ajoute un autre sens au mot caboche: «Une bonne caboche – un homme de sens.» Si le terme caboche peut être utilisé pour décrire une personne de sens, le mot cabochon a un sens contraire. Hatzfeld, Darmesteter et Thomas suggèrent la définition suivante pour un cabochon: «petite tête». Bélisle n'y va pas par quatre chemin. Selon lui, un cabochon est «un individu maladroit, un mauvais ouvrier – n'employez pas cet apprenti, c'est un cabochon. Personne qui comprend dificilement – il faut être pas mal cabochon pour ne pas comprendre ce qu'a dit le maire.» Et l'on pourrait y ajouter: «la TPS est l'oeuvre de tous les cabochons que l'on a élu au Parlement canadien lors des dernières élections fédérales. Il n'en est pas question, ils ont des têtes de caboche.» En terminant, je tiens seulement à rappeler au docteur Morin que les termes tourmenter et déclamer étaient jadis bien utilisés. Selon le Petit Robert, tourmenter veut dire «affliger de souffrances physiques ou morales; faire vivre dans l'angoisse.» Si la personne ne voulait pas chanter, il vivait dans la plus grande angoisse si on le poussait à le faire. En ce qui a trait à déclamer, le Petit Robert nous dit qu'il s'agit de «réciter à haute voix en marquant, par les intonations qu'exige le sens, l'accent grammatical et l'accent oratoire.» Dans le cas du Concours oratoire fransaskois, les jeunes n'ont pas cesser de déclamer des textes (des poèmes), mais les parents déclament encore plus fort contre l'organisation du Concours. Dommage! |
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