Des motsButinMarie-Louise Perron, archiviste francophone aux Archives de la Saskatchewan, m'a écrit il y a plusieurs semaines pour me rappeler que le mot séparateur était aussi utilisé autrefois en Saskatchewan pour décrire la grosse machine à moissonner qui séparait le grain de la paille, avant l'arrivée dans les Prairies des moissonneuses-batteuses. C'est ce qu'on appelait chez nous la batteuse. Ayant plume en main, madame Perron écrit: «M. Rosaire Marion, à Naicam, m'a raconté un beau vieux conte métis où il utilisait la phrase, il n'avait pas de butin, ce qui voulait dire, il n'avait pas de nourriture. C'était la première fois que j'entendais ce mot utilisé de cette façon. Chez nous, ça voulait dire des affaires personnelles, surtout des vêtements.» Généralement, lorsqu'on parle de butin on veut dire ce qu'on prend aux ennemis pendant une guerre ou encore le produit d'un vol ou d'un pillage. Dans son Dictionnaire du bon langage, l'abbé Étienne Blanchard nous rappelle qu'il ne faut pas dire vendre son butin, mais plutôt qu'on doit dire vendre son matériel de ferme, son mobilier ou son linge. Lorsque madame Perron nous parle des effets personnels, c'est sans doute de cette source dont vient l'expression. Dans le Dictionnaire de la langue québécoise rurale, David Rogers récupère trois exemples dans la littérature québécoise où le mot butin est utilisé. Dans Trente Arpents de Philippe Panneton Ringuet on peut lire: «– Maudits enfants de verrat, ça fait combien de fois que j'vous dis d'réparer c'te chaise-là. C'est pas seulement capable d'entretenir le butin d'la maison, pis ça veut...» p. 207. Cette référence à butin veut dire l'ensemble des effets mobiliers appartenant à un individu. Dans Marie-Didace de Germaine Guèvremont, il y a deux références au mot butin. La première veut dire le linge, les vêtements ou l'étoffe: «Quand les hommes m'entendaient rire, l'un après l'autre ils venaient me trouver, chacun avec une bonne raison. Un, c'était pour se faire recoudre son butin, un autre, pour se plaindre, un autre avait besoin de se faire consoler.» p. 107. La deuxième référence à butin dans Marie-Didace se trouve à la page 88: «Comme on continuait à la louanger, elle se leva et fit semblant de s'emporter: – Phonsine, donne-moi mon butin que je m'en retourne aussi raide.» Le butin dans cette citation au manteau et autres vêtements. Par contre, dans son Dictionnaire de la langue québécoise, Léandre Bergeron fait une référence directe à nourriture. Selon Bergeron: «Butin – n.m., Effets, marchandises quelconques. Ex. C'est du bon butin, que je vous vends là. – Ensemble des effets d'un individu. Ex. Il a perdu tout son butin dans le feu. – Linge personnel, vêtements. Ex. As-tu serré ton butin du dimanche? Je vas laver mon butin de corps. – Récolte en général. Ex. On aura pas grand butin cette année. – Provisions. Ex. Il en faut du butin pour nourrir tout ce monde-là.» Rappelons que Bergeron est originaire du Manitoba et son utilisation du mot butin pour vouloir dire nourriture est possiblement une influence métisse franco-manitobaine plutôt qu'une influence québécoise. Enfin, dans le Petit Robert on donne aussi comme définition au mot butin, la récolte ou le produit qui résulte d'une recherche. Ex. Le butin que rapporte les fourmis, les abeilles. Nous savons que généralement le produit que rapportent les abeilles et les fourmis c'est de la nourriture. C'est peut-être de cette définition que le mot butin est entré dans le langage métis. En terminant, j'espère que tous nos lecteurs se proposent d'assister à la 10e édition de la Fête fransaskoise qui aura lieu les 4, 5, 6 et 7 août prochains à Saint-Denis. J'peux vous dire qu'il y aura une trâlée de monde à cette fête. Dans le Dictionnaire du français québécois on peut lire: «Trâlée: Longue suite ou grand nombre (de personnes, d'animaux ou de choses). Syntagmatique. Trâlée d'enfant, – de monde. Synonymie. Québec – batch, crâle (vieilli) crâlée (id.), crowd, filée, gang. France – bande, file, foule, masse, ribambelle, suite et tas.» Et oui, la Ribambelle de Saskatoon sera de la Fête fransaskoise. |
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