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Des mots

Bécosse

Depuis que j'ai commencé cette chronique, il y a déjà un an et demi, il y a un mot qui me trotte par la tête mais que je n'ai jamais eu l'occasion d'utiliser. Plusieurs personnes me l'ont suggéré mais c'est une lettre de mon bon ami Rosario Morin qui me pousse finalement à l'inclure dans la Parlure fransaskoise.

Le docteur Morin écrit: «Je me suis demandé d'où venait le nom bécosse, cette petite maison d'aisance à quelques cent pieds de la résidence. Henri Bergeron mentionne bécosse dans son livre Un bavard se tait pour écrire. Ce terme pourrait venir de l'anglais big house.»

Plutôt que de venir de l'anglais «big house», je crois que le terme vient probablement de l'anglais «back house». Allons voir ce qu'en disent les autres.

Léandre Bergeron, dans son Dictionnaire de la langue québécoise offre: «Bécosse n.f. – Cabinet extérieur. – Salle de bain.» Robert Dubuc et Jean-Claude Boulanger dans leur bottin Régionalismes québécois usuels propose: «les bécosses n.f.pl. Toilettes. Autrefois les bécosses étaient au fond de la cour. Équivalent populaire ou familier de chiottes.» Gilles Colpron dans son Dictionnaire des anglicismes suggère: «Bécosse, bécosses f. (backhouse) 1. lieux d'aisances sans installation sanitaire, logés dans un édicule annexé à la maison ou érigé dans ses environs; latrines. 2. (humor.) tous lieux d'aisances: cabinets, communs, toilettes, chiottes (pop.).»

Si vous êtes comme moi, vous n'avez aucune idée ce que monsieur Colpron veut dire par édicule. Selon le Petit Robert, un édicule est «1. un petit temple, chapelle ou dépendance d'un édifice religieux, ou 2. une petite construction édifiée sur la voie publique (kiosque, chalet de nécessité, urinoir).» Admettons-le, pour certains la bécosse pouvait devenir un temple – le temple des bouleversements des grandes idées.

L'abbé Étienne Blanchard dans son Dictionnaire du bon langage et Bélisle dans le Dictionnaire nord-américain de la langue française concordent avec Gilles Colpron pour dire que le terme vient de l'anglais «backhouse».

Au sujet de la bécosse, le docteur Rosario Morin nous raconte quelques anecdotes: «Ça me rappelle la farce de l'abbé Dugas (ancien curé de Gravelbourg) à l'occasion d'un bingo. On venait de nommer B1, puis B2. L'abbé se tourne vers moi et me dit – le prochain va être bécosse!» Et, «le Père Piédalue (pendant longtemps enseignant au Collège Mathieu) nous racontait qu'un théologien fit installer toute la somme de Saint Thomas d'Aquin dans sa bécosse. Chaque jour, presqu'à la même heure, il allait trôner et méditer! Il est devenu une autorité et pouvait citer son grand maître par coeur!» La morale de cette histoire: si vous voulez apprendre votre par-coeur, écrivez-le sur le mur de votre bécosse et allez trôner chaque jour à la même heure.

Dans une autre lettre, le docteur Morin se souvenait de son jeune âge lorsque dans les cours de français de l'A.C.F.C. on essayait de redonner des mots français aux différents sports – gouret (hockey), balle au camp (baseball), etc.

Il déplore qu'aujourd'hui, les commentateurs sportifs à la télévision et à la radio semblent trop facilement accepter des termes anglais comme un beau catch (un bel attrappé), un score (but), le bullpen (l'enclos d'exercice). Je suis d'avis avec lui. Si les commentateurs sportifs ne font pas l'effort de bien traduire ces termes, comment les jeunes viendront-ils à les apprendre.

Au sujet de bullpen, le docteur Morin écrit: «Bullpen me laisse avec l'image d'un taureau qu'on garde dans un enclos pour l'empêcher d'incommoder les vaches.»





 
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