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Société historique de la Saskatchewan

Des mots

Avant-propos

En 1981, au cours des recherches pour ma maîtrise sur les chansons traditionnelles françaises en Saskatchewan, j'ai interviewé une trentaine de personnes au sujet des chansons qu'elles connaissaient et qu'elles pouvaient toujours chanter. Au cours des séances d'enregistrement qui eurent lieu, les informateurs ont eux-mêmes choisi les chansons qu'ils voulaient bien communiquer. Je leur demandais de chanter une pièce en particulier seulement si je m'apercevais qu'elle était bien connue dans la région et si, jusque là, je n'avais réussi à en recueillir que des bribes.

Chaque fois que c'était possible, je m'informais des origines de la chanson dans le répertoire de l'informateur. Bien souvent la chanson avait été 'donnée' par quelqu'un de la connaissance de l'informateur ou par un proche parent, et cela se faisait depuis plusieurs générations. C'est ainsi qu'il n'était pas rare que l'informateur ou l'informatrice me dise: 'Ça, c'est une chanson à mon oncle. Il l'a donnée à mon frère, et mon frère me l'a donnée.' Le sentiment de propriété des chansons est fort répandu. Une informatrice a même demandé de ne pas faire chanter ses chansons dans la même région, faisant de cette demande une condition sine qua non à la séance d'enregistrement, car 'les soirées sont plus intéressantes si tout le monde ne connaît pas les mêmes chansons.'

D'autres informateurs, souvent des femmes, me disaient qu'ils avaient appris certaines chansons à force de les écouter chanter. Ceci était le cas pour des chansons plutôt grivoises qui ne devaient, normalement, pas faire partie d'un répertoire féminin.

Les techniques modernes de transmission de l'information ont joué un certain rôle dans la conservation des chansons françaises en Saskatchewan. Loin des milieux français, les gens lisaient les journaux français, et plus tard ils écoutaient la radio, pour conserver des liens avec leur langue et leur culture. Plus d'un informateur a avoué avoir appris des pièces en écoutant la radio, ou des disques importés. Ainsi, nous ne pouvons plus dire que la chanson se transmet uniquement par la voie de la tradition orale, mais plutôt par la tradition ancienne à laquelle se sont ajoutées les techniques modernes de communication.

Puisque les informateurs donnaient souvent des titres différents à ce qui était en fait diverses versions de la même chanson, les titres qui apparaissent avec les textes des chansons dans cette étude sont des titres communs qui se retrouvent dans le Catalogue de la chanson folklorique française de Conrad Laforte. Cet ouvrage magistral en plusieurs volumes définit des chansons types à travers les chansons traditionnelles. Laforte a élaboré une série de catégories parmi les chansons selon les thèmes et les motifs que l'on y retrouve. Selon ce système, la chanson type porte un titre critique qui permet de la reconnaître, même sous le couvert de nombreuses variantes. Ce sont ces titres que le lecteur trouvera à travers cet ouvrage, à l'exception des chansons qui n'ont pas encore été identifiées dans le Catalogue. Ces dernières portent le titre donné par l'informateur.

Marie-Louise Perron





 
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