Des gensAlbert Pascal, o.m.i.
Arrivé à Montréal, une violente attaque de fièvre met sa vie en danger; il est inconscient pendant deux semaines entières, toujours entre la vie et la mort. Il se rétablit toutefois rapidement et il se rend au noviciat des Oblats à Lachine, près de Montréal, où il prononce ses voeux perpétuels à la fin de septembre 1873 et célèbre sa première messe à la Toussaint. Le jeune religieux désire ardemment partir le plus tôt possible pour les missions, mais il est d'abord affecté au ministère dans une paroisse de Montréal. Ses supérieurs l'envoient ensuite à Plattsburg, aux États-Unis, puis dans les chantiers de l'Outaouais, puis encore une fois à Plattsburg. Ce n'est qu'au printemps de 1874 qu'il part enfin pour les missions du Mackenzie. Après un voyage relativement facile de Montréal à Winnipeg, en passant par les États-Unis, il parcourt les quinze cent kilomètres jusqu'à Saint-Albert (Edmonton) en charrette à boeufs. De là, il doit entreprendre un pénible voyage pour se rendre aux missions du lac Athabasca. Il passe ensuite seize ans dans la solitude et l'isolement presque complet, d'abord à la mission de la Nativité au Fort Chippewyan, puis à la mission des Mangeurs de Caribou, à Fond-du-Lac, avant de revenir au Fort Chippewyan. Dans ce pays éloigné, le courrier n'arrive qu'une seule fois par année et le plus proche confrère est à plusieurs semaines de marche en raquettes. Quant aux conditions matérielles de l'existence, elles demeurent primitives et dures à supporter: le climat est excessivement rude et le missionnaire, comme ses ouailles, doit se contenter pour toute nourriture de poisson du lac et de gibier sauvage; souvent, la famine menace. Les tâches les plus banales de la vie courante requièrent une somme de temps et d'énergie inimaginable; et, à tout moment de la journée, il faut être là, disponible. À l'été de 1890, le missionnaire est forcé de rendre le chemin du sud et de se rendre à Saint-Albert pour y conduire un frère qui a perdu la raison, à cause de la solitude et l'isolement, et qui devient dangereux. D'ailleurs, sa propre santé commence à donner des inquiétudes et il se repose quelques semaines à Saint-Boniface. Le supérieur général des Oblats de Marie-Immaculée le mande alors de Paris pour s'enquérir de vive voix de la situation dans les missions du Nord. Il est entendu que le Père Pascal en profitera pour aller passer quelque temps dans sa famille, qu'il n'a pas revue depuis vingt ans. Il se prépare à revenir dans ses missions lorsqu'il apprend son élévation à l'épiscopat. Il est sacré évêque de Mosynopolis en la cathédrale de Viviers à la fin de juin 1891 et nommé Vicaire Apostolique de la Saskatchewan. Les débuts sont humbles, puisque le vicariat ne compte qu'une quinzaine d'Oblats, missionnaires ou frères convers. Mais on sait déjà que le pays accueillera bientôt des milliers, sinon des centaines de milliers d'immigrants, venus cultiver le sol: ce n'est plus, ou du moins ce ne sera plus longtemps un pays de mission. Le prélat, qui n'a encore que 43 ans, s'assure la collaboration de plusieurs prêtres séculiers, favorise la fondation de paroisses catholiques et se bâtit une cathédrale. Comme un grand nombre de Galiciens s'installent dans le vicariat, il passe en Autriche vers 1898 afin de recruter des prêtres ruthènes et d'obtenir des secours financiers pour leurs paroisses. Devant la rapidité et l'ampleur du mouvement de colonisation, le Saint-Siège érige le vicariat en diocèse régulier en décembre 1907 et Mgr Pascal en devient le premier évêque. Le courant d'immigration semble vouloir s'accélérer. Alors que le diocèse comptait 8000 fidèles à sa création, on en dénombre plus de 40 000 en 1920. Un tel accroissement cause bien des difficultés, d'autant plus que le troupeau comprend plusieurs ethnies. Si les franco-catholiques forment le groupe ethnique le plus important en nombre, ils ne constituent néanmoins qu'une minorité, étant donné la présence de très forts contingents allemands et ruthènes, en plus des éléments anglais. C'est cette diversité autant que le manque réel d'accord entre prêtres français et canadiens français qui rendent l'administration du diocèse particulièrement délicate. Plusieurs membres du clergé et même Mgr Mathieu, archevêque de Régina, portent un jugement plutôt dur sur l'attitude de Mgr Pascal face à l'immigration française et la lutte pour la survivance de l'élément français. Il ne fait toutefois aucun doute qu'il s'y intéresse, notamment en appuyant moralement et financièrement le journal Le Patriote de l'Ouest, et en encourageant les efforts des missionnaires-colonisateurs dans son diocèse. Les privations en pays de mission avaient ébranlé, sinon délabré la santé de Mgr Pascal; il semble bien qu'il ait longtemps souffert de troubles chroniques de l'appareil digestif. L'intervention chirurgicale qu'il doit subir à la clinique Mayo de Rochester, au Minnesota, à l'âge relativement avancé de 69 ans, laisse supposer qu'il s'agissait d'un cancer. Le prélat se rétablit tant bien que mal et il s'embarque à la mi-mars 1919 à destination de Rome et de la France. Il compte se reposer que temps chez sa soeur, religieuse à Luynes en Provence, avant de reprendre le chemin du Canada. Mais c'est là qu'il meurt le juillet 1920. Il est inhumé dans le caveau des Oblats à Aix-en-Provence. (renseignements: Le Patriote de l'Ouest, 31 août 1910, 9 octobre 1913, 29 1916, 31 octobre 1917 et 21 juillet 1920, passim) |
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